S’il s’agit de nourrir la pierre, celle-ci est-elle donc en même temps autre chose qu’une pierre : un vivant ? un organisme ? Et ce dernier serait-il aussi autre chose qu’un vivant : un minéral mais qui, donc, ne serait pas un minéral ? Dans Nourrir la pierre, les objets sont omniprésents, et les choses et les êtres, mais en étant également autre chose, absents à eux-mêmes, circulant sur les frontières du paradoxe, du devenir, au sein du monde de l’enfance.

Essai sur l’histoire et la littérature, Faire trace analyse les différents types de textes relatifs aux camps d’extermination nazis pour en approfondir les enjeux et implications, pour mettre en évidence leurs choix formels, stylistiques, mais aussi leur prolongement jusqu’à aujourd’hui. Entretien avec Maxime Decout.

Dans le récit d’Adrien Girault, les mots forment une surface qui laisse passer un silence, des choses non dites, non articulées par un langage qui les exposerait en plein jour. Le livre est fait de ce rapport entre la surface et ce qui existe au-dessous, ce qui s’agite sous cette surface et y produit des ondes, des remous – des signes qui cachent autant qu’ils font pressentir une obscurité, des ombres.

Dès le début du livre, les repères sont brouillés : « il est quinze heures du matin ». Quelle est cette heure qui n’existe pas ? Quelle est cette voix qui la dit ? Qu’il soit quinze heures du matin signale un désordre de la pensée mais aussi du monde : s’il est quinze heures du matin, c’est qu’un désordre du monde a lieu, que son ordre habituel s’est écroulé. Ce désordre, ce monde écroulé, ont pour nom : Alep. L’écriture de cette voix est celle qui écrit depuis ce désordre.

L’art voyage, nous dit Jacques Rancière, il se déplace et franchit des frontières – celles qui le constituent, qu’il traverse et reconfigure pour, en lui-même, devenir. Les voyages de l’art est un livre qui explore et déploie cette logique par laquelle l’art est mouvement avant d’être identité ou essence – son essence étant une forme de nomadisme.

Le roman de Caroline Deyns est un livre sur les murs qui se multiplient et emprisonnent. Ce ne sont pas n’importe quels corps qui sont emprisonnés : ce sont les corps des femmes. C’est aussi un livre sur la possibilité de faire passer, d’écrire, dans les interstices des murs, dans les failles, un murmure, une voix qui dit l’emprisonnement, revendique la destruction des murs.

Le livre de Kathryn Scanlan est le récit d’une vie, de la singularité d’une vie – le récit d’un monde, d’un désir qui circule dans ce monde. Il s’agit également d’un livre singulier par ses choix d’écriture et stylistiques. Entretien avec l’auteure.

En traduisant et publiant la poésie de Galina Rymbu, Marina Skalova et les éditions Vanloo permettent la découverte en France d’une œuvre enthousiasmante et forte. Réunissant des textes de 2016 à 2023, Tu es l’avenir propose non seulement un panorama de celle-ci mais surtout un ensemble dont la puissance et la qualité s’affirment à chaque page.

Livre d’une mémoire trouée, d’une recherche dont l’objet se dérobe, Donato est aussi un récit par lequel, de la manière la plus belle, apparaît une vie, un monde. Ce premier livre d’Éléonore de Duve, s’impose par la beauté de sa langue, par la sensibilité de son écriture, par la recherche formelle, narrative, qui font naître la vie la plus singulière de cette figure qu’est Donato. Un livre qui est une des très belles découvertes de cette rentrée littéraire. Entretien avec l’auteure.

Construit autour de la figure de Donato, le livre d’Éléonore de Duve crée un objet pris dans une écriture qui le fait apparaître et, dans un même mouvement, le dissémine. Il ne s’agit pas pour l’auteure de rédiger une biographie dont le récit manque mais de créer un agencement entre la présence de Donato et son absence. Entre cette présence et cette absence, dans l’articulation des deux, l’écriture a lieu.

Le livre de Sergio González Rodríguez est une enquête menée au sujet de l’enlèvement et du très probable assassinat de 43 étudiants au Mexique, en 2014, et dont les corps n’ont jamais été retrouvés. Les 43 d’Iguala est aussi un livre politique, un état des lieux politique, en même temps qu’un livre qui obéit à une injonction morale, un devoir qui s’impose et auquel on ne peut se soustraire.