Le premier roman de Jeremie Brugidou est un roman d’aventure et une forme de dystopie, une réflexion anthropologique et politique autant qu’une œuvre qui tend vers la SF, un livre de rêves comme une enquête où la science et l’imaginaire vont ensemble. Le livre articule toutes ces dimensions pour dire et imaginer le monde – notre monde, ce qu’il est et ce qu’il pourrait être.

Une étude sociologique montre que les jeunes Américains entre 10 et 14 ans sont capables de reconnaître 1000 logos de marques mais qu’ils ne sont pas capables d’identifier 10 végétaux de leur région. Le constat est sans appel : nos rapports à la nature sont totalement désaffectés. En cause : notre modèle de civilisation moderne qui réduit la nature à un domaine extérieur et indifférent à l’homme. La pensée de Baptiste Morizot apporte, à travers l’exemple du pistage, un éclairage à la fois original et très accessible à ce problème écologique classique du « grand partage » entre nature et culture.

Du 7 septembre 2019 au 31 juillet 2020, la Halle Saint Pierre présente une exposition exceptionnelle de Roger Ballen – exceptionnelle du fait de sa durée mais aussi parce qu’il s’agit d’un des photographes sans doute les plus puissants. A cette occasion, seront exposées des installations, un ensemble important de photographies en noir et blanc ainsi que, pour la première fois, une série de photographies en couleurs. Rencontre et entretien avec Roger Ballen.

Lascaux, véritable lanterne magique, n’est pas qu’un simple témoignage du passé, qu’une antique archive de l’humanité, elle est le lieu de notre naissance, notre scène originelle, notre trame intérieure. Lascaux est notre premier rêve, notre toute première vision dont le souvenir hante nos nuits sans que l’on sache à vrai dire ce qui nous hante : « Un homme qui pénètre dans une caverne paléolithique, alors que c’est la première fois », écrit Pascal Quignard, « la reconnaît. Il revient » (Dernier royaume, Tome 3 : Abîmes, 2002).

La définition de vivant ne va plus de soi depuis des années notamment face à une médecine dont le progrès brouille les frontières entre corps vivant, malade et cadavre. L’état de mort cérébrale en est l’exemple le plus frappant. Cependant une approche du concept semble apparaître en ce début du XXIe siècle : après l’ère de la robotique, de l’homme androïde, du corps métallique qui fut le fantasme du siècle dernier – depuis les hommes robotisés des peintures de Fernand Léger au mouvement cyberpunk des années 90 –, la chair organique revient comme modèle du nouveau vivant. Mais ce n’est pas cette chair saine et bien portante à laquelle certaines médecines douces tentent de redonner ses titres de noblesse mais une chair qui retourne à sa définition originelle. Chair modeste, trop modeste, une simple chair comestible… Car le corps humain, roseau pensant, malgré la grandeur d’âme qu’il peut contenir, qu’est-il au final si ce n’est un assemblage d’os, de muscles et de veines ? Que devient-il, privé de sa pensée, si ce n’est un simple tas de viande ?

Spécialiste de la condition animale, philosophe, Florence Burgat a consacré de nombreux essais à l’Animal notre prochain et à nos pratiques de consommation. Son dernier livre, L’Humanité carnivore, interroge notre rapport à la viande, cette humanité carnivore que nous sommes… devenus : pourquoi mangeons-nous de la viande ? L’avons-nous toujours fait et le ferons-nous toujours ? Son analyse de notre « raison carnivore » est à la fois historique, éthologique et culturelle, elle se déploie selon un axe qui élargit la question initiale au rapport de l’humanité à la violence, au sacrifice, dans un essai fondamental et passionnant qui redéfinit les frontières de ce que nous pensons notre humanité, pourtant hautement questionnable.

De Caroline Lamarche, nous avions aimé Le Jour du chien, L’Ours, La Chienne de Naha, tous relevant au ras de leurs titres du registre animalier.
Voici que sort à présent de la même fabrique romanesque « un grand cerf » venu d’une comptine de l’enfance, que jadis nous avons chantée et mimée. Mais que nous disent ces références à un bestiaire pas seulement imaginaire ?

Si le regard animal, l’animal que nous regardons et qui nous regarde font depuis toujours partie des préoccupations humaines, ne serait-ce que pour scruter la part animale dans chacun de nous, la visibilité de cette préoccupation a beaucoup augmenté depuis la circulation incessante des images et des informations dans les réseaux mondialisés.

« L’homme est une maladie mortelle de l’animal » déclarait Alexandre Kojève dans un élan hégélien dont il portait en lui l’exigeante intimité afin de témoigner de ce qu’est devenu l’homme dans une histoire terriblement inexorable et achevée, afin de définir ce qui reste d’humain, après que, hagards de triomphe, les hommes ont consumé leur noir temps d’histoire sur terre : afin de dire combien, au crépuscule aride de notre temps, l’homme est l’espèce négative du vivant.

Les éditions Galilée viennent de publier le second volume du séminaire que Jacques Derrida consacra à la peine de mort. Le philosophe Patrick Llored, auteur d’un livre original et novateur sur Derrida, souligne dans cet entretien ce qui, à partir de ce séminaire, lui semble ouvrir des pistes de réflexion et de compréhension nouvelles.