Depuis bien des années, l’Afrique du Sud donne à la littérature mondiale des romanciers d’envergure. Nous avons lu et aimé ceux qu’entraînent dans leur sillage John Maxwell Coetzee ou Nadine Gordimer. Ainsi Damon Galgut, natif de Pretoria, dont La Promesse, Booker Prize 2021, un copieux roman de 300 pages s’étendant sur trois décennies à cheval sur deux siècles et évoquant le déclin d’une famille protestante et blanche, vient de paraître en poche, chez Points.

Vue de Paris, la littérature espagnole nous semble florissante aujourd’hui. Et voilà qu’un poète espagnol tard venu au genre romanesque illustre une bien autre avant-garde que l’on qualifierait volontiers de bourgeoise, quitte à donner dans une formule oxymorique. Auteur de deux œuvres grands récits remarqués (Ordesa, 2018, et Alegría, 2019), Manuel Vilas, natif de Barbastro (Aragon), joue fortement dans ses deux œuvres majeures de la carte familiale (ses parents décédés, ses fils, et l’amour qu’il porte à tous ou qu’il leur a porté). Nous parlerons surtout ici d’Alegría et de quelques motifs récurrents à l’intérieur d’une construction qui évoque immanquablement une forme de puzzle.

Voici un récit pour le moins étrange qui nous relate en 200 pages le parcours que fait un narrateur dans une zone qui a pour singularité de n’appartenir ni à la ville ni à la campagne et qui relève tantôt de l’une et tantôt de l’autre le plus souvent des deux à divers moments. Le randonneur qu’est ce narrateur nous rapporte donc le parcours qu’il fait autour de Paris sans pour autant trop s’écarter de la capitale et sans non plus pénétrer dans des villes et villages clairement identifiables — encore que plusieurs soient nommés.

Parmi la vingtaine d’ouvrages que nous a donnés Pierre Bayard au cours des ans, plusieurs ont trait à des moments d’histoire où le canon littéraire ou philosophique n’a pas été respecté tel qu’il l’était jusque-là et ce sont, en chaque occasion, des formes de transformation dont le public lisant ne s’est pas toujours avisé. C’est qu’un ordre que l’on croyait acquis durablement était mis à mal aux dépens d’auteurs et de penseurs jusque-là célébrés.

C’est alors qu’il vient d’obtenir la licence en Arts et Sciences de la Communication qu’Yves Winkin quitte son pays pour les États-Unis où il passera quelques années. Il maîtrise déjà l’anglais ou plus justement l’américain et s’installe à Philadelphie qui est désormais devenu un centre important de l’étude des sciences humaines. Quelques-uns des meilleurs spécialistes du domaine résident sur le campus de l’université ou, le plus souvent, passent par la ville. Yves Winkin va se lier tantôt avec l’un et tantôt avec l’autre et il s’attachera très tôt à la personnalité d’Erving Goffman qui est tout ensemble ukrainien, juif et canadien. Ce Goffman deviendra peu à peu une vedette dans le milieu universitaire, se montrant tout à la fois attachant et déroutant. Paradoxal dans tous les cas.

Comment départager le bon grain de l’ivraie dans ce qui s’écrit sur Proust en cette année du centenaire de la disparition de l’écrivain ? Il se publie tellement de commentaires à son sujet que l’on demande grâce. De quoi vous passer le goût de la phrase à rallonge tant associée à l’écriture proustienne. Bertrand Leclair — car c’est de lui qu’il va être question ici même — nous gratifie pour sa part d’un essai de 300 pages paraissant chez Pauvert. C’est beaucoup et c’est sans doute un peu trop. Et le critique ne saurait être inspiré à tout moment.

Les ouvrages sur l’actuelle pandémie se multiplient. Non que l’on en ait fini avec cette crise mais, même si elle s’est ralentie, un phénomène d’accoutumance — peut-être tout illusoire — s’est produit. Dans le passé, différentes zones de l’humanité connurent de semblables ravages épidémiques. Mais jamais un tel phénomène n’affecta la totalité du globe terrestre ainsi qu’il fait aujourd’hui, ce qui donne tout son sens au titre du présent ouvrage, Un temps immobile.

Depuis bien des années, l’Afrique du Sud donne à la littérature mondiale des romanciers d’envergure. Nous avons lu et aimé ceux qu’entraînent dans leur sillage John Maxwell Coetzee ou Nadine Gordimer. Nous n’avions jamais découvert jusqu’à aujourd’hui Damon Galgut, ce natif de Pretoria. Nous venons de réparer l’oubli en question avec La Promesse, Booker Prize 2021, un copieux roman de 300 pages s’étendant sur trois décennies à cheval sur deux siècles et évoquant le déclin d’une famille protestante et blanche.

« Ou le récit d’un épisode somme toute mineur, voire carrément négligeable, dans l’histoire d’une famille très célèbre » : après le titre sous-titre du roman de Joshua Cohen, retenons encore cet incipit à valeur épigraphique — « Je m’appelle Ruben Blum et je suis historien, oui, c’est ça : historien. Quoique d’ici peu de temps, je suppose que je serai devenu moi-même historique ».

Silvia Ferrara est rompue à la linguistique et à la philologie. À ce titre, elle dirige le programme de recherche européen INSCRIBE consacré aux inventions des écritures. Et cela convient à ce qui est tout ensemble son expertise, son enthousiasme, son goût du mystère et son sens de l’humour. Écrit en italien (Ferrara enseigne à l’université de Bologne), traduit en français, joliment illustré de photos de pierres ou d’autres matériaux recueillant des inscriptions en diverses langues, La fabuleuse histoire de l’invention de l’écriture paraît en poche aux éditions Points.

Annie Ernaux est décidément l’une des grandes romancières de notre temps, surtout lorsqu’elle prend des risques autobiographiques, ce qu’elle fit en plus d’une circonstance. C’est bien le cas avec Le Jeune homme que vient de publier Gallimard et qui suscitera sans doute plus d’une réaction de rejet chez certains lecteurs ou lectrices. C’est que la mise en scène d’elle-même au bras d’un très jeune homme, alors qu’elle est pleinement adulte, pourrait choquer.