Bien qu’elle ne soit pas une inconnue, on ne peut pas dire que la grande Séverine fasse partie des références fréquentes de nos savoirs. Elle revient en librairie grâce à un livre bienvenu, édité par L’Échappée : Séverine L’Insurgée, avec une préface de Paul Couturiau et une postface de Laurence Ducousso-Lacaze et Sophie Muscianese.
Publiquement né en 1924 avec le manifeste d’André Breton, le Surréalisme n’en finit pas de fasciner depuis près d’un siècle.
Le titre du roman de Philippe Joanny, Quatre-vingt-quinze, fait écho à celui de Victor Hugo, Quatrevingt-treize. Cependant, de l’un à l’autre, l’époque a changé, la littérature aussi. Et l’événement historique n’est pas non plus le même. La Terreur postrévolutionnaire a laissé place à un autre événement, une autre terreur : celle liée à l’épidémie de Sida, à une mort omniprésente, à une décimation quotidienne, indifférente.
Avec Programme de désordre absolu : décoloniser le musée, Françoise Vergès signe un des essais majeurs de ce début d’année. À rebours de l’idée néo-libérale selon laquelle la décolonisation du musée occidental serait impossible, Vergès propose, dans le sillage de Frantz Fanon, une puissante réflexion qui repasse par l’histoire du musée, qui n’a jamais été un espace neutre. Participant à l’élaboration d’un pseudo-universel, le musée occidental est un outil de domination qui, désormais, doit être déconstruit dans un monde post-raciste et post-capitaliste. A l’heure où Emmanuel Macron annonce une loi accélérant la restitution des œuvres volées aux peuples africains, Diacritik est allé interroger le temps d’un grand entretien Françoise Vergès sur ce programme de décolonisation des musées occidentaux.
Un paradis en enfer : l’essai de Rebecca Solnit est de ces livres dont l’actualité ne se dément pas. Publié d’abord en 2009, révisé en 2020, le livre vient de paraître dans une traduction française d’Hélène Cohen. Si, depuis 2009, les catastrophes environnementales, les attentats, les guerres semblent s’être intensifiés, la ligne de force de l’essai n’a, elle, pas bougé : la lucidité est une résistance et ces catastrophes sont aussi des moments où se manifestent le plus intensément solidarité et entraide, des décisions citoyennes qui peuvent être le creuset de nouvelles manières d’habiter le monde et penser notre rapport aux autres.
Anne-Cécile Vandalem raconte des histoires. Avec des personnages, des secrets, des rebondissements, des lieux angoissants. Elle a déjà déployé son univers mi-réaliste mi-fantastique dans Tristesse et Arctique, des fables où affleurent la monstruosité, au croisement du roman policier et du film catastrophe. Le vrai monstre y est souvent l’humain, avec sa folie destructrice et son désir de maîtrise. On y questionne l’urgence climatique et on y fait surgir les pulsions latentes, on y enterre les secrets et on y regarde l’infini.
Le titre de l’essai de Pierre Jakob est inspiré d’une citation de Kafka rappelée en exergue : « Il suffit que les flèches soient à la mesure des plaies qu’elles ont faites ». Cet élan aphoristique entre en tension féconde avec le sous-titre plus propice au traité : « Essai d’une métapsychologie de l’écoute ».
Elle a un cerveau érotique. Ce sont les mots du peintre Francis Picabia (1879-1953) au sujet de celle qui va devenir sa femme, Gabriële Buffet (1881-1985), la musicienne et théoricienne avec qui il vécut une quinzaine d’années et eût quatre enfants. Les éditions Seghers publient aujourd’hui grâce à leurs arrière-petites-filles Anne et Claire Berest – aussi préfacières de l’ouvrage – la correspondance inédite de Francis avec Gabriële, lettres et poèmes couvrant une dizaine d’années, entre les prémices de la deuxième guerre mondiale et le début des années 1950.
J’ai découvert le travail du Primesautier Théâtre avec Mais il faut bien vivre, mise en corps agile et éclairante de l’œuvre du sociologue Hoggart, auteur d’une Culture du Pauvre (1970) que le plateau du théâtre mettait en lumière mais aussi en volume, en bouche, en chœur…
« Quelque grief qu’on ait contre le mariage, on ne saurait lui refuser d’être une expérience. » Oscar Wilde
65 rue du Faubourg-Saint-Honoré, à deux pas du palais de l’Élysée, Loris Azzaro établit en 1970 sa boutique-atelier. Le styliste sicilien né à Tunis, célèbre pour ses robes, mix de la sensualité méditerranéenne et du chic parisien, habille pour le soir Claudia Cardinale, Raquel Welch, Jane Birkin, Marisa Berenson, Dalida, Romy Schneider et… Sheila. Mince, musclée, tout en jambes, elle chante chez Guy Lux en combinaison pailletée bleu électrique style Avenger, danse chez les Carpentier en robes de jersey de soie vert jade ou rose shocking qui fluidifient ses déhanchements. Sur son site officiel, l’idole yéyé publie un livre de ses tenues de scène, soit 60 ans de show mode.
On parle presque toujours des œuvres que l’on voit, que l’on lit, que l’on écoute, dans une sorte de relation unique avec elles, comme si on vivait dans une « mono-réalité », comme s’il n’y avait d’un coup que le livre, le film, la pièce, et soi, comme suspendus dans le vide, sans même le temps qui passe, ou l’espace.
Se promener dans les livres – enregistrant au passage certaines lignes, certains enchaînements ; faisant des pauses ; oubliant momentanément ce qui vient d’être enregistré ; reprenant le parcours, en attente d’on ne sait quel surgissement – me rappelle ce que j’ai accompli quasi-quotidiennement durant des décennies pour une chaîne de radio nommée France Culture.
C’est une scène placée à l’exact centre de Babylon, le film de Damien Chazelle sorti il y a quelques semaines et dont tout le monde parle encore à juste titre, tant sa furieuse exposition du cinéma américain des années folles de la vingtaine du vingtième siècle tient de la merveille.