Prologue : Maladie mélodie (en souvenir de Maurice Roche). Je fais rapidement le compte des ouvrages qui ont formé la matière des “papiers” que j’ai publiés ici-même en 2021 – de la toute première Constellation d’hiver à cette huitième et dernière d’automne – et j’obtiens 155, soit un multiple de 31. Il faut leur ajouter un film et un disque : on obtient alors 157, 37e nombre premier. Ce sont des chiffres en apparence assez élevés, mais dans cette somme, il n’y a pas dix romans, et la plus grande partie de ces ouvrages ne déborde pas de mots. De plus, l’image, qu’elle soit liée aux arts plastiques, au cinéma, à la bande dessinée, etc., y est souvent présente. 155, en vérité, c’est en-dessous du nombre de lectures nécessaires pour alimenter une année d’émission radiophonique quotidienne (du lundi au vendredi, à l’exception de sept ou huit semaines d’été) comme par exemple Du jour au lendemain, la regrettée émission d’Alain Veinstein : un peu plus de 220 jours d’antenne avec dans sa besace un à deux livres par jour, soit un total pouvant dépasser les 300 (comme 310 : le double de 155). Et si je m’amusais à compter les signes (espaces comprises) de la totalité de ces “papiers”, je ne serais pas étonné d’obtenir un nombre palindrome, du genre 939939 ou 940049. Frôler le million de signes donne l’indication qu’une profonde mélancolie a été à la source de cette frénésie d’écriture – mais aussi la preuve qu’elle a été combattue. Quatre saisons de Constellations, c’est une expérience, et non une performance ; et plus précisément une expérience du confinement, même si aucune autorité ne nous en a imposé, cette année. À situation critique (opération / convalescence), réponse en forme de chroniques – comme un journal où l’intime ne ferait que de timides percées et où l’on ne parlerait que de ce qui nous a donné le désir d’entreprendre une forme de dialogue. L’année 2021 a été prodigue, côté livres, et certains de ces 155 ouvrages figurent, me semble-t-il, parmi les meilleurs de ces dix dernières années. En sera-t-il de même en 2022 ? Ce serait épatant en ces temps lugubres et régressifs où nulle lumière ne se profile, même au loin. Triomphe de l’inactuel sur l’air du temps. So May we Start ?
1.
Je ressors d’un tiroir du petit meuble où j’ai entassé, pêle-mêle, mes archives de la seconde moitié des années 1970 (où, entre mes 20 et 24 ans, j’ai timidement participé aux activités, rencontres, expositions du collectif Change et de la revue Action poétique) le premier livre publié par Liliane Giraudon : Têtes ravagées : une fresque (1979). Tiré à 100 exemplaires (+ 50 H.C.), il a été repris en 1982 dans Je marche où je m’endors, publié chez Hachette P.O.L et sous-titré “chroniques” (et non : “poésie”). Les derniers mots de Têtes ravagées : une fresque sont : “comme grattés à vif”. Je me souviens de ma première rencontre avec Liliane Giraudon à l’occasion d’une exposition proposée par Paul Louis Rossi à Amiens en 1978 qui s’intitulait Américains provisoires. Parmi les œuvres exposées, certaines avaient été faites par empreintes sur du papier, grattées au cutter, avant d’être recouvertes d’encre ou de peinture. C’était le temps où on faisait ce genre d’expériences – grattage et frottage – auxquelles Liliane se montrait sensible, comme elle l’a écrit dans le n°77 d’Action Poétique : “Papiers, tissus ou toiles (déroulées à la verticale, sans squelette de châssis), désignant un travail dont l’enjeu serait le plaisir d’un tatouage sans « prime de séduction ». Ainsi se constitue un véritable réseau alternatif – paupières lourdes et clignotantes –, où se croisent et s’emmêlent les divers gestes portant même force contagieuse dans leur répétition ample ou retenue.” En ce temps-là, les rencontres n’étaient pas individuelles, mais collectives : on ne sortait de nos tanières qu’en bande. Liliane avait un peu moins de dix ans de plus que nous, elle était donc à peine trentenaire : très jeune. On imaginait qu’une longue vie nous attendait pour échanger, et du coup j’ai oublié de l’enregistrer – ou plutôt, j’ai attendu le moment où le numérique est arrivé (le début des années 1990, quand on pouvait s’offrir à prix raisonnable un D.A.T. portatif et un couple de micros de bonne qualité) pour l’inviter, non pas à répondre à des questions, mais à improviser sur un thème (Les ténèbres) qui était bien plus un prétexte qu’un sujet, au sens journalistique. On faisait ça à la maison ou dans la rue, et non dans un studio. Fragment : “Les ténèbres, c’est le gris. Moi j’écris avec des mines de plomb, dans des cahiers, parce qu’on peut gommer ; et quand on gomme, ça fait quelque chose d’assez nuageux, ténébreux, sur la feuille blanche. L’écriture, celle vers laquelle je tends et que j’aimerais atteindre, a certainement à voir avec les ténèbres. D’abord, c’est surtout échapper à un savoir-faire, écrire sans savoir qu’on écrit, c’est une façon de marcher dans le noir, correctement, en ayant avalé les repères avant de les oublier.”
En l’an 2000, Liliane Giraudon a participé à une émission de plateau qu’on m’avait demandé d’animer – ce genre de rencontres en public où l’intime n’a pas trop sa place. Jean-Jacques Viton était dans la salle, et je me désolais qu’il n’ait pas été invité. En 2005, nous avons enfin retrouvé le chemin de la création radiophonique, dans le cadre d’un nouvel essai autour du thème “mélancolies érotiques”. Nos échanges ont alors repris, comme s’il ne s’était passé que deux ou trois jours depuis la diffusion des Ténèbres – je veux dire qu’après avoir posé la question la plus brève et ouverte possible, je me mettais à l’écoute de la voix de Liliane, et c’était passionnant, au moins autant que de lire ses écrits, et infiniment plus que d’en faire le commentaire. Au cours de la décennie suivante, j’ai tenté de convaincre la chaîne de m’envoyer en “mission” à Marseille, afin de l’enregistrer chez elle (en intérieur comme en extérieur), en compagnie de Jean-Jacques Viton, mais je n’ai pas été entendu. Ce sont des collaborations fortement espacées. Entre temps, nous nous retrouvions parfois dans des revues. Et il nous est bien entendu arrivé de nous croiser, sans intention particulière. Il me semble que la dernière fois, c’était à l’occasion d’une soirée où Henri Deluy avait convié quelques amis pour fêter la sortie du dernier n° d’Action poétique, il y aura bientôt dix ans. Henri nous a quittés, cette année, le 20 juillet, quatre mois après Jean-Jacques Viton (le 14 mars).
Intimidé de devoir écrire au sujet de Polyphonie Penthésilée, l’opus le plus récent de Liliane Giraudon publié chez P.O.L, je raconte ces souvenirs afin de reporter à plus tard le moment de passer à l’acte. Ce livre, je l’ai lu, et même relu (mais cette fois, de manière désordonnée) et il m’a beaucoup impressionné. J’ai aussi écouté son autrice en parler un assez long moment. Au cours de mes traversées, en ligne droite comme en zigzag, je n’ai jamais ressenti le besoin de prendre des notes. Je le faisais par pur plaisir – et relever ce plaisir est ce qui est le plus urgent à faire passer, même si cela paraîtra trop imprécis, voire suspect, à certains. Cependant, j’ai mémorisé un numéro de page : 81. Comme je ne me souviens plus pourquoi, j’y retourne et tombe sur ces mots : “c’est la pression de l’expérience qui pousse la langue à la poésie”. Ce qui m’impressionne le plus, c’est la force d’entraînement de ce poème. D’où cet enchaînement de relectures pour saisir ce qui, à chaque fois, m’échappe, tout en me touchant au plus près. Ceci par exemple : “Tout le poème tente de répondre à la question : « Que fait le poème par ces temps de malheur ? »”.
Il serait facile de privilégier dans un “commentaire” le rapport au monde qui s’y manifeste en le passant au filtre des obsessions de l’époque : en faire une romance des années 2020, alors que, finalement, c’est ce me semble relever de certains archaïsmes qui me fait le plus signe. Ou ce qui fait surgir certains fantômes : Romance ou Ghost story ? Ou encore Journal de guerre – civile (d’une assez grande violence parfois, mais manifestant aussi une très sensuelle tendresse) ? Ou plutôt quelque chose qui naîtrait avec ce livre sans avoir encore trouvé de nom. Je reprends ma lecture de Polyphonie Penthésilée, et fais une capture des premières lignes de la première partie (sur cinq) du livre (Exposition de moments opératoires), afin d’éviter d’en trahir la mise en page :
Six pages avant cet incipit, on trouve cette dédicace : “Pour JEAN-JACQUES VITON et HENRI DELUY, qui étaient encore vivants quand j’ai écrit ce livre”. Polyphonie Penthésilée est un titre (octosyllabe : 4 + 4) dont le premier mot sonne plus familier que le second (“Penthésilée, reine des amazones, y chevauche dans sa petite armure peinte et dans la polyphonie des voix emmêlées”). Le musicien que je suis ne peut s’empêcher de relever page 50 ces vers (je ne respecte pas la mise en page cette fois) : “du ciment entre les touches du piano / comme pour les oignons / l’essayer c’est commencer à pleurer” ; et page 65 : “elle dit la langue pas la vie / vous ne pouvez pas comprendre / ni même imaginer / risque d’orage comme de prison / il fallait attendre que ça coule / Schönberg permettant de comprendre Beethoven / l’art n’est qu’un trou / flottaison des excréments / dans ces conditions accoucher était un péché / autant que de ne pas faire d’enfants”. De L. G., on trouve aussi ces mots, publiés sur le site de P.O.L : “Ce long poème, entre divagation ou scénario, est le fruit d’un braconnage dans la vie de tout le monde. On y rencontre des mots plus vivants que les vivants, un homme y mord un chien, une femme aboie, partout la peur avec une pratique de vies jetables alliée à l’énigmatique beauté du monde.” Souvenirs : Fear is a Man’s Best Friend (John Cale, 1974) ; et bien entendu, Divagation des chiens (Liliane Giraudon, 1988) qui s’ouvrait par cette citation de Thomas Bernhard : “Après trois volumes de poèmes, je me suis dit : est-ce que ça a un sens ? Dix, vingt volumes de poèmes, où est-ce que ça va s’arrêter ? ça devient de plus en plus idiot…”. Trente-trois ans ont passé et Polyphonie Penthésilée montre très concrètement l’extrême force de résistance du poème, tout en ne démentant pas, avec humour bien entendu – cet humour qui manque terriblement à tant de poètes – le constat de Bernhard.
Mue de Stacy Doris, publié chez P.O.L dans une traduction de Pierre Alferi et Anne Portugal, est un livre bref : “testament charnel et intrépide qu’elle adresse à son mari [le poète Chet Wiener] et à leurs enfants, saisis dans leur envol, leur premier plumage.” Stacy Doris, née à Bridgeport dans le Connecticut en 1962, est morte à San Francisco en 2012. Mue (Fledge en VO) est son cinquième livre publié chez P.O.L (parmi lesquels Parlement, écrit directement en français). Il s’agit donc d’un livre testamentaire, mais amoureux, “écrit juste avant cette mort qu’elle voyait venir sans ployer” – et composé de “poèmes particulièrement adressés”, tel celui-ci (quinzième poème, page 31) :
“Viens voir mon bout mon
bout fait du bruit mon
bout fait ce bruit dans
ce brin court lasso
qui dehors te tire
quand tu pinces noies
des fourmis se massent
en file hurlements
faits par toi j’ai nacre”
Ou encore le quatre-vingt-unième (page 97 – sans respecter cette fois le passage à la ligne) : “Tu t’enroules en ce / que je te veux prêt / notant ce que tu / veux pas. Swing des feuilles / en nous nervure où / tu me veux debout // tout le déshabille / en chœur on arrache / ta robe à ma liste / tu sais souligner / le temps son brandon / est inextinguible”
Sans entrer dans les détails, relevons qu’en note préliminaire à ses poèmes (qui forment un continuum), Stacy Doris écrit qu’“À part les mots librement combinés, il n’y a pratiquement pas de bisyllabes dans ce livre de vers de six syllabes”. Cependant, les traducteurs on fait le choix de “l’adoption forcée, artificielle, d’un vers impair, de cinq pieds […] car l’hexamètre français ronronne, blotti contre son frère pour devenir l’hémistiche d’un alexandrin. Le vers de cinq pieds, au contraire, est raide ; il impose son couperet”. Ce choix de l’impair a imposé le bannissement des mots longs, privilégiant l’usage – “plus rare en français”, écrivent Pierre Alferi et Anne Portugal – des monosyllabes : comme un “apprentissage du mot veuf, de l’impair du veuvage que Stacy anticipe et prépare dans ses vers, et qui est un moteur puissant du recueil, le générateur d’outre-tombe d’une douceur-douleur inouïe”. On pourrait aussi prendre en compte l’inscription (la présence matériellement fantomale) dans le poème d’“une traduction fidèle de La phénoménologie de l’esprit de Hegel” et d’“une reprise sauvage de quelques poèmes de Paul Celan”, mais je retiendrais plutôt que, selon Stacy Doris elle-même, ce livre se compose d’“un registre des désastres, un compte-rendu de miracle” et que “c’est aussi une brassée de poèmes d’amour d’amour éternel” :
“Yeux pompant les bruits
dans leurs bols de biens
tressez je remballe
cette maison pour
arroser la pluie”
(page 90 – cinq derniers vers du soixante-quatorzième poème).
Au risque de me répéter (c’est un réel plaisir que d’enfoncer certains clous), ce qui concerne la typo, le graphisme, la mise en page, le choix du papier, les rabats de couverture, etc., m’importe énormément – ce qui ne m’empêche pas d’apprécier certains livres “mal gaulés” à condition que le contenu proposé soit de premier ordre (mais alors quel dommage…). De ce côté-là – et pas seulement – les Éditions Unes sont irréprochables. Je songe à leur manière, classique et singulière, d’apposer en couverture une vignette au-dessus de leur nom. Pour Je cherche l’obscurité, recueil de poèmes d’Emily Dickinson (1866-1971 : après la guerre) traduits par François Heusbourg, cette vignette est un autographe de la poète américaine (je me rends compte que c’est probablement la première fois que je découvre quelque signe de sa main). Cette fois, nulle préface – une simple page de présentation resituant la place de ces poèmes dans la vie et l’œuvre d’Emily Dickinson : “72 seulement de 1866 à 1870. Une forme de repli, et une intensité confiée à l’infime. Une lutte même, secrète, sous-jacente, contre « le givre de la mort », contre le malheur et la séparation.”
“L’Énigme qu’on peut résoudre
Nous la méprisons bien vite –
Rien n’est plus éventé
Que la surprise d’Hier – ”
Circulant très librement dans ce recueil de poèmes écrits au lendemain de la Guerre de Sécession, je n’ai jamais senti le besoin de comparer cette nouvelle traduction (proposant l’original en page paire) avec de plus anciennes, tant la lecture se fait limpide (non le déchiffrement du sens, mais celle des enchaînements de sonorités – pas nécessairement sa musicalité, d’ailleurs, même s’il peut sembler naturel qu’une voix chantée en reprenne quelques vers : musique de chambre, mais aussi peu romantique que possible : entre Ravel et Feldman).
“Doux comme le massacre de Soleils
Assassinés par les sabres du soir”
(Soft as the massacre of Suns / By Evening’s sabres slain)
Dans sa postface en forme de portrait (Citadelle sans lieu), Raluca Maria Hanea relève qu’“À partir de 1864, progressivement, Emily Dickinson écrit sur des feuillets épars, des bouts d’enveloppes postales et des emballages divers. […] Abandonnant l’encre pour le crayon à papier, l’écriture frôle non seulement l’illisible, mais aussi l’invisible.” Fragile – au bord de la disparition –, “le poème entame son voyage invisible dans les faubourgs d’un secret.” Grande liberté – et exploration du Théâtre de la Mémoire, une fois encore.
“La Mémoire a une Façade et un Revers
C’est un peu comme une Maison –
Elle a aussi un Grenier
Pour les Déchets et la Souris –
Outre le plus profond Cellier
Jamais bâti par un Maçon
Regardons-la par ses Profondeurs
Nous ne serons pas pourchassés – ”
(En aparté – à mi-voix) Je m’étais juré de me procurer Il n’y a pas assez de feuilles, comme je l’avais fait pour les deux livres précédents de Susan Howe publiés chez Ypsilon, Mon Emily Dickinson et La marque de naissance – les trois bénéficiant d’une traduction et d’une postface d’Antoine Cazé (qui accomplit un travail assez fabuleux, on ne l’en remerciera jamais assez). Bravant une pluie glaciale, je suis sorti de ma tanière pour l’acheter dans une bonne librairie, mais n’aurais pas le temps de le lire – et encore moins de le relire – avant que cette dernière constellation ne soit publiée. Or, s’il est envisageable de composer un bref montage de fragments de tel ou tel livre – le hasard étant éventuellement sollicité dans cette affaire –, sans se sentir obligé de produire le moindre commentaire, Il n’y a pas assez de feuilles requiert de n’affuter le cutter qu’après l’avoir lu attentivement. Donc, en attendant d’y revenir un jour ou l’autre, faire passer : 1. l’image de couverture (le livre est, comme les deux précédents, très agréable au toucher : papiers subtilement choisis – il est nécessaire une fois encore d’accorder de l’importance à ce qui n’est pas un détail) ; 2. première impression après survol : éblouissant – un livre magnifique que je suis navré de n’évoquer qu’aussi brièvement :
“Ah invisible
règle délicates horloges à chaque station
constellations de la durée”
Diverses formes de dialogues – donc d’écoutes – peuvent s’opérer avec les arbres. Guiseppe Penone en sait quelque chose, lui qui réalisé une transcription musicale de la structure des arbres (Ardèche, 2011 : dessins, partition, CD). On se souvient que durant le premier confinement, Bernard Moninot a dessiné chaque jour un arbre, l’envoyant aussitôt à Bernard Noël qui en a tiré de brefs écrits (Un toucher aérien). Le peintre Michel Carrade, grand coloriste qui nous a quittés le 4 septembre dernier, n’a cessé de dessiner des arbres au fusain, en contrepoint de son œuvre radicalement abstraite. Mais s’il y a des arbres à portée de regard – ceux de son jardin ou des environs –, il y a les arbres rencontrés en chemin par les marcheurs. Erik Satie, rentrant tard dans la nuit à Arcueil, les embrassait. Patrick Beurard-Valdoye, grand randonneur, palabre avec eux.
De Beurard-Valdoye, on connaît principalement Le Cycle des exils, “vaste épopée plongeant dans les cultures minoritaires de l’Europe”, dont sept volumes ont été publiés à ce jour, chez Al Dante et Poésie / Flammarion. Palabre avec les arbres, publié aux Éditions Corti, est un ouvrage beaucoup moins épais (une soixantaine de pages rassemblant 19 poèmes), mais d’une belle densité et d’une non moins grande beauté. “L’arbre est un mat mémoriel irrigué par l’histoire et les mythes”, nous dit l’auteur. “Si communiquer avec un arbre est une affaire délicate, ce qu’il nous communique peut l’être aussi. Sous la connaissance pointent quelques racines de l’inconnu.” Le poète fait croître “son modeste arboretum, sa communauté d’arbres singuliers. Le plus souvent ces rencontres résultent de périples. Mais le déplacement n’a pas valeur de dogme : quelques arbres de l’enfance, d’une lenteur attachante, en disent long.” Je suis sensible à cette démarche, ayant longtemps palabré en marchant, magnétophone en bandoulière, et ayant même composé des marches (non militaires : plutôt des boiteries). Pour simplement donner le goût (un des cinq sens qu’il convient de déployer simultanément à l’ouverture de ce livre) de la langue que cultive Palabre avec les arbres, recopions les deux premières strophes (sur cinq) du douzième poème, Le figuier d’Adonis :
“L’ALLONGÉE dorée sous l’odorant figuier dort
dans le chypré de myrte de thym de laurier et
d’ambrette fraîcheur subite dans l’échancrure
de mamelon à hauteur d’aronde à bout
à l’aplomb d’oliviers argent vif-tannés
dans les plis de roche
et l’anfractueuse anse
la voute végétale enveloppant le bassin
elle dort sous un drap de bain jambes
au long de la font et les filets capillaires fluent
à travers la rousseur séminale des racines
rescapées sourdant du grès
horizonte brondes tendues vers
la source lumineuse et leurs nœuds
ces bouts de trous d’aqueduc
renouant avec le transparent”
Mon plan est le titre d’un livre de Maël Guesdon publié aux Éditions Corti. Il est composé d’environ quatre-vingts poèmes – ou morceaux de prose (poèmes en prose ? Corti annonce : “Domaine français • poésie”) en six parties, aucun de dépassant l’espace d’une page. Exemple : “L’apparence de la personne que je crois être est comme la miniature très étirée de celle que je ne connais pas encore. Elle rode autour de moi comme une espèce d’infusoire ou de somnambule qu’il vaut mieux laisser dormir, ça, tout le monde le sait. Au loin une petite fille enfile des pieds d’ours, de véritables pieds d’ours. Elle joue au bord de la rivière avec ses petites sœurs comme si de rien n’était. Elle court et les pieds de l’ours que son père a tué sont ses sandales (p.32).” Maël Guesdon a coordonné, avec Marie de Quatrebarbes et Benoît Bertholier, la revue Le tête et les cornes (les trois susnommés ont aussi traduit Discipline de Dawn Lundy Martin pour la “Collection américaine” dirigée par Olivier Brossard chez Joca Seria). “Mon plan se présente comme une série d’expériences vécues par un narrateur tout à fait consentant, qui tente, plein de bonne volonté, de ramener au présent tout ce qui ne l’est pas. Souvenirs, projections, conjectures, hypothèses. Il tourne autour de quelques questions qui portent sur les présences fugitives dans sa vie : Pourquoi tue-t-on les araignées ? Comment s’installe une image ? Que faire d’une scène qui se répète ? Mais l’expérience tourne mal, et voilà le narrateur pris dans le devenir-intrigue de quelques motifs récurrents qu’il n’a pas vraiment vus venir.” “Tableaux” se déroulant sous un éclairage nocturne (ensomnies persistantes, parfois suivies de quelques virées sur l’autre scène) avant que la “lumière du jour (les lumières du jour dit-il), à son tour (à leurs tours) éclaire(nt) tout aussi cruellement les mystères de la nuit auxquels on espérait, par le réveil, échapper.”
Contrebande de Laurent Albarracin, publié par Le corridor bleu dans la collection S!NG dirigée par Pierre Vinclair (avec une préface érudite et passionnante de ce dernier), est un recueil en trois parties dont la première et la dernière sont composées de sonnets, tandis que la deuxième l’est de poèmes en prose, un peu à la manière de Ponge (mais 1. nous sommes loin du temps du Parti Pris ; 2. je ne vais pas commencer à rechercher les sources et à faire semblant jouer les fins limiers). Concernant le sonnet, j’ai toujours à portée de main l’aussi monumental (et labyrinthique) que très peu lu Quasi-Cristaux de Jacques Roubaud : “un choix de sonnets en langue française de Lazare Carnot (1820) à Emmanuel Hocquard (1998)” – mais pas seulement. Toujours les constellations… chaque livre, chaque poème, renvoyant à un autre. La constellation du sonnet est, dans le domaine de la poésie, probablement une des plus belles, comme celle du quatuor à cordes peut l’être pour le domaine musical. Je le répète : je lis pour mon plaisir, pas pour rivaliser avec plus savant que moi. Inutile d’en rajouter. Après lecture (rarement la première, souvent la suivante), le plus grand plaisir – c’est la troisième fois que j’emploie ce mot plaisir et, croyez-moi, ce qui je vous dis trois fois est vrai – est de prélever quelques vers pour donner le dernier mot au poète… mais lesquels ? S’attacher à un objet – mais lequel ? Disons (d’autant plus que ce n’est pas de saison) LE HAMAC :
“Composer un sonnet couché dans un hamac
N’est pas très confortable et assez difficile
C’est comme balancer en avion un missile
Sans nécessairement décoller du tarmac.
Il faut être ingénieux pour atteindre sa cible
(N’être pas regardant pour la juger atteinte) :
Les mailles du filet, en desserrer l’étreinte
Et s’en remettre au flot du hamac extensible.
Le fuseau de coton tangue alors en pirogue
Amarrée des deux bouts aux deux pins qu’elle esquive
Ainsi que des écueils qui borneraient l’eau vive
Sur laquelle la barque opiniâtrement vogue.
On flotte entre deux eaux comme entre les piliers
Tenant la rêverie qu’il s’agit de lier.”
Jacques-Henri Michot, auteur discret, peu prolixe, mais ayant marqué son temps (Un ABC de la barbarie ou Comme un fracas – Al Dante, 1998 et 2009 – sont loin d’être négligeables et ont trouvé depuis longtemps leur place dans toute bibliothèque éclairée), publie un nouvel, et assez épais (près de 500 pages de texte) ouvrage aux Éditions Nous : Derniers temps – sous-titré Un capharnaüm. Et de nouveau surgit cette question : ouvrage testamentaire ? Michot est né en 1935, mais des natifs de cette année qui continuent, vaille que vaille, à tracer leur sillon (ou, mieux encore, à dévier leur parcours), nous en connaissons plus d’un(e). Comment alors saisir ce nouvel opus dont “le premier titre envisagé aura été Avant qu’il soit trop tard ” et qui prend forme de “journal de l’époque” – “livre composite, à facettes” qui “se tresse avec des morceaux de mémoires, en conjuguant montage (citations, extraits), moments réflexifs, éclats de présent et séquences très construites (lipogrammes, listes)” ? Eh bien, de la manière la plus simple : en s’y plongeant, presque “innocemment.” Curieux comme cela coule, et nous entraîne sans nous couler. Grande proximité – le lecteur n’étant jamais oublié, et encore moins dégagé, à travers un dialogue engagé qui nous conduit à dévorer quasiment ce demi-millier de pages (nuits blanches assurées). Terribles, ces derniers temps d’une vie ? Non, même si la mélancolie y est bien installée. Plutôt un espace de partage, une série d’amorces de conversations, ou d’offrandes : un cadeau à la lectrice et au lecteur aventureux à qui ce travail est, d’une certaine manière, dédié. Capharnaüm me va comme un gant, et le terrain vague de Jacques-Henri Michot n’est pas dépourvu d’ouvertures. Une écriture, comme un souffle, qui nous fait nous remémorer de tant d’événements, de noms, d’écrits, que l’on aurait pu oublier (ou que nous ne savions pas) et qui, via son hypothétique désespérance (qui n’est en aucun cas le sujet du livre), nous redonne plein espoir sur l’essentiel : le passage de relais. Un marathon furieux – et calme, aussi bien – qui nous conduit à penser nous-mêmes nos derniers temps : ce qui n’en finit pas. Un fragment ? Avec plaisir, mais lequel… donnera conscience de la vastitude de ce capharnaüm où on peut lire : “Et même si, lectrices et lecteurs qui êtes encore là” (oui, nous sommes encore là), et qui s’ouvre tellement aux autres ? Impossible. Plaisir du coup à déroger à la règle de la citation obligée pour un livre qui cite autant ! Ou alors, procéder comme l’a fait Pierre Parlant ici-même, dans la présentation de son entretien avec Jacques-Henri Michot au sujet du même ouvrage : citer Stendhal qui, “au début de Vie de Henry Brulard, précisait ainsi les choses : « Je devrais écrire ma vie, je saurai peut-être enfin, quand cela sera fini dans deux ou trois ans, ce que j’ai été ».” Et noter que, peu de temps avant la sortie de ce magnifique Derniers temps, les éditions Nous avaient rassemblé en un volume, 33 récits sur Dante de Jacqueline Risset : remarquable travail d’édition auquel nous restons, plus que jamais, attentif.
“Ces textes traversent près de vingt ans d’interrogation sur des livres et sur beaucoup d’autres choses, avec une écriture partagée entre la tentative de ménager un espace de calme à l’intérieur de ce désordre et la tentation d’y intégrer les bruits, les mouvements.” Cet avant-propos de l’auteur, que je pourrais reprendre à mon compte, ouvre le Journal critique que David Lespiau vient de publier aux Éditions Héros-Limite à Genève. Vingt ans, donc, d’“exercice continu d’écriture devant un ou des livres”, “d’essais de lectures – chroniques n’est pas le mot, critique non plus ; il s’agirait plutôt de lire pour soi, mais par écrit : lire par écrit.” “Toute cette machine travaille et doute en même temps – sur à peu près tout.” Je suis bien d’accord qu’il serait préférable de se débarrasser de ces mots – chronique, critique –, même si le premier me semble curieusement mieux adapté pour qui pense en artiste ou en poète (songeons aux fameuses Chroniques à suivre de Paul Louis Rossi dans Action poétique) que le second, réservé aux journalistes et aux professeurs, pour caractériser ce qu’est une lecture par écrit – “journal de lecture”, au sens de “carnet de bord” : ce qu’on tient sur le pont ou dans la cabine du navire agité sur lequel nous traversons le lac sous l’éclairage nocturne des constellations. Journal critique est un très beau livre, une fois encore (Héros-Limite est de ces éditeurs exigeants qu’on a plaisir à défendre ici). Il travaille et doute en même temps “sur à peu près tout”, “si ce n’est la certitude – ajoute David Lespiau – que ce qui se passe dans un texte poétique est infiniment plus précis (et important) que ce qui se passe ailleurs ; ou en est un condensé extrême – repliant les champs de l’activité humaine et de la pensée dans un même objet, texte, modèle.” Journal critique, dont la plupart des textes recueillis ont été prépubliés dans le Cahier Critique de Poésie (CCP) du cipM, n’est pas de ces livres que l’on traverse à pas réguliers ; plutôt de ceux que l’on ouvre pour en lire quelques pages, que l’on laisser ensuite reposer, avant de le reprendre, soit par désir d’y découvrir quelque lecture par écrit d’un ouvrage dont on ignore à peu près tout ; soit, au contraire, pour frotter sa propre lecture à celle de David Lespiau au sujet d’un livre, d’un auteur ou d’une autrice dont nous sommes familiers (ses choix s’accordant particulièrement aux miens, cela s’avère, en effet, question de frottage). Souhaitons qu’il attire nombre de lecteurs curieux de découvrir ce qui leur ouvrira peut-être quelques portes donnant sur le terrain vague. David Lespiau, lui-même poète (il a publié de nombreux livres chez divers éditeurs, de Contrat maint à P.O.L), a été le remarquable éditeur du Cours de Pise d’Emmanuel Hocquard – un des auteurs les plus lus dans ce Journal critique (d’autres noms ? Anne-Marie Albiach, Jean-François Bory, Jacques Roubaud, Guy Debord, Dominique Fourcade, Roger Lewinter, Claude Esteban, Claude Royet-Journoud, Agnès Rouzier, etc.). “Ce qu’on y trouve parfois : des gestes physiques et mentaux d’écrivains au travail ; gestes que j’essaie de saisir, sans pouvoir toujours les décrire. […] Je me demandais si, d’une certaine façon, les auteurs abordés ici ou simplement croisés, cités, pouvaient, ainsi réunis, se mettre à parler entre eux.” Il me semble que oui – gage de réussite d’un livre singulier, à ranger à portée de main, et sur lequel revenir régulièrement.

Pour conclure cette ultime constellation de la quatrième et dernière saison de l’année 2021, j’accuse réception de quelques livres (ou, comme on dit, plaquettes), suffisamment brefs pour être lus dans la foulée, mais sur lesquels je ne saurais rien dire de pertinent, préférant reprendre rapidement quelques mots de l’argumentaire qui, parfois, les accompagne ; ou en citer quelques lignes. J’aurais toujours le désir, j’imagine, et ce jusqu’à mon dernier souffle, que tout ce qui m’arrive – notamment par courrier – reste énigmatique, voire impénétrable. Et aussi que cette énigme garde un caractère (comment dire ?) “musical” – non au sens où on y trouverait quelque artificielle petite musique (expression que le musicien que je suis rejette violemment quand on parle littérature), car ce sont les rythmes, les tempi, les intervalles, les silences qui me conduisent à pénétrer certains territoires. Ou encore : “dessiné” – au sens où la manière dont est composée la page, en surface, peut m’alerter, me sensibiliser, me conduire à en explorer le sens. Quatre livres reçus, parfois de la main à la main, comme celui de Roland Chopard, Progressions (Bruno Guattari Éditeur). Chopard est poète. Il a créé les éditions Æncrages & Co, il y a plus de 40 ans et on se croise régulièrement depuis, le plus souvent au Marché de la poésie. Ce petit livre, tiré à seulement 150 exemplaires, est ainsi présenté : “L’écriture est un vice sans fin. C’est ainsi que les mots nous remuent quand nous croyons les remuer.” Il a été écrit “sous contrainte” : six “progressions” comprenant successivement 2, 4, 8, 16, 32, 64 poèmes. Voici le 13è de la 6e Progression : “Son apparente obscurité / n’est ni une démission, ni une servitude à un autre ordre, mais seulement une vigilance pour créer à la fois le trouble et le ravissement.”
Pierre et berceaux de Cécile A. Holdban est publié par Potentille. Petit cahier de 16 pages non agrafées, dont treize de poèmes, et une comprenant un dessin (de l’autrice semble-t-il), dont voici l’incipit : “ À présent / c’est dans mes mains / que je construis les maisons / comme les forêts, elles grandissent, s’assombrissent / je les sème directement / dans les veines. / Elles s’agrippent / au souvenir granuleux d’âcres grenier / où jamais la poussière ne se pose, / aux tourterelles voletant dans les combles, / au reflet du chat se faufilant jusqu’aux tuiles, / jusqu’à l’enfant, minuscule, assise / derrière la porte de la dernière chambre / et qui regarde grandir ses paumes vides.” Laborintus Vox est un livre publié sous pseudonyme (ou hétéronyme), celui de Rachelle Holbein, chez EEEOYS Éditions à Saint-Malo. Il s’agit d’une “Petite axiomatique des voix et non voix” sous forme – comment dire (bis) ? – d’une succession de brèves proses méditatives (ou en méditation), parfois aphoristiques, parfois plus développées : “filant le fil étrange et séminal de la tradition ontique inaugurée par Wittgenstein dans son Tractatus.” “Toute voix est un infini non dénombrable / […] Si la voix est cette neige de l’indénombrable, elle est surtout son trait non stationnaire au sein du cométique.”
In fine, deux livres, reçus dans une même enveloppe, de Barthélémy Schwartz, d’une part auteur de bandes dessinées expérimentales, et d’autre part coresponsable (avec Êve Mairot) des éditions Ab irato. Ces dernières publient un recueil de Jindřich Štyrský (1899-1942), “grand nom du groupe surréaliste tchèque et compagnon de Toyen”, qui a été “autant peintre, collagiste, photographe qu’auteur de poèmes – en vers ou en prose – et d’essais critiques”. Ce petit ensemble de textes s’intitule très sobrement Poésie. Il est publié en bilingue – la version française ayant été établie par Petr Král. J’en reproduis ici le quatrième poème, Toujours le même : “Rose / Semblable à un rail-route denté / De construction précise / S’arrêtant capricieusement / Et parfois lâchant des cascades / Liquides / Et multicolores / / Femmes en groupes / Têtes pareilles aux boules de neige / Yeux et bouches diversement agencées / Saillant / En sommets de montagnes où fleurit la gentiane.”

Et enfin, Far West de Barthélémy Schwartz, publié aux Éditions Adverse, “un opuscule sur le racisme, le génocide Indien et l’esclavage. Bien entendu cela ne se résume pas à cela, c’est aussi de la bande dessinée en désordre et de l’approche poétique.” Une fois encore, un ouvrage du terrain vague : “invisible aux radars de la critique, et désespérément coincé dans les bacs BD des librairies”. De l’art du montage (plus que du simple détournement post-situationniste) dont les deux pages ci-dessus apportent l’incipit. Allez donc chez votre libraire fouiller dans ces bacs fourre-tout pour le découvrir de visu. De mon côté, j’y retourne – Yves di Manno venant de signaler dans sa chronique Choses qui gagnent à être lues (publiées par la revue Catastrophes n°32) la sortie très inattendue d’une Pléiade Louise Labbé qui, selon lui, mérite bien davantage qu’un simple coup d’œil.
Liliane Giraudon, Polyphonie Penthésilée, Éditions P.O.L, décembre 2021, 144 p., 18 € — Lire un extrait
Stacy Doris, Mue, traduit par Pierre Alferi et Anne Portugal, Éditions P.O.L, décembre 2021, 108 p., 13 € — Lire un extrait
Emily Dickinson, Je cherche l’obscurité, traduit par François Heusbourg, Éditions Unes, novembre 2021, 128 p., 20 €
Susan Howe, Il n’y a pas assez de feuilles, traduit par Antoine Cazé, Ypsilon, octobre 2021, 256 p., 23 €
Patrick Beurard-Valdoye, Palabre avec les arbres, Éditions Corti, novembre 2021, 78 p., 15 € 50
Maël Guesdon, Mon plan, Éditions Corti, novembre 2021, 96 p., 16 €
Laurent Albarracin, Contrebande, Le corridor bleu, octobre 2021, 96 p., 12 €
Jacques-Henri Michot, Derniers temps, Éditions Nous, novembre 2021, 512 p., 28 €
David Lespiau, Journal critique, Éditions Héros-Limite, novembre 2021, 376 p., 28 €
Roland Chopard, Progressions, Bruno Guattari Éditeur, 72 p., 12 €
Cécile A. Holdban, Pierres et berceaux, Potentille, 16 p., 7 €
Rachelle Holdbein, Laborintus Vox, EEEOYS Éditions, 116 p., 9 € 50
Jindřich Štyrský, Poésie, traduit par Petr Král, Ab irato éditions, 86 p., 15 €
Barthelemy Schwartz, Cow Boy, Éditions Adverse, 36 p., 8 €