Manifeste électrique aux paupières de jupes, Des siècles de folie dans les calèches étroites : voilà des titres qu’on n’oublie pas. Leur obscure flamboyance pourrait faire penser à une queue de comète du surréalisme. Mais Michel Bulteau (né en 1949), à qui on doit ces titres (livre collectif, pour le premier), ne relève pas du canon surréaliste tel que codifié et théorisé par André Breton, même si ce dernier a parlé d’un état d’esprit surréaliste traversant les époques.
Jean-Pierre Cescosse
Tandis que des millions de congénères se massait par écrans interposés devant le spectacle des stades qataris climatisés au cadavre népalais, je suis retombé par hasard sur Les Dépossédés de Robert McLiam Wilson.
Phobes en série
L’usage du suffixe « phobe » atteint des fréquences stratosphériques. On a parfois l’impression que s’y concentre toute la tournerie pavlovienne de l’époque, avec ses « clashs » ineptes quémandant la part d’audience. L’emploi effréné de ce suffixe ne mériterait qu’un éclat de rire s’il ne dénotait pas un appauvrissement du langage et de l’esprit critique confinant au psittacisme.
Héléna était sortie de sa formation Prévenir et lutter contre toutes les formes de discriminations au travail (Mardi 30-10h-11h30. « Sans inscription sur la base du volontariat, je me verrai contrainte de vous y inscrire d’office », précisait assez comiquement le mail des ressources humaines) résolue à ne plus commettre le mal.
Voilà l’été chantaient les Négresses Vertes en 1988. Tu m’étonnes. On a eu le temps, depuis, de voir de quel bois il se chauffe, l’été. À l’époque, ça pouvait encore passer pour une chanson festive. Mais depuis, même les présentateurs météo ont abandonné leur sourire béat à l’annonce d’anticyclones à répétition. Tout s’est mis à cramer autour de nous, jusqu’à la forêt de Brocéliande. « Canicule » est devenu le mot le plus mondialement redouté, après « nucléaire » « Poutine » et « moussons ».
« Qui voit les rives de la Seine voit nos peines : on n’y trouve plus que les colonnes précipitées d’une fourmilière d’esclaves motorisés. » (Panégyrique, éditions Gérard Lebovici, 1989, Gallimard 1993)
Cette phrase signée Guy Debord me traversa l’esprit sans crier gare dans le bus 68 (c’est son vrai numéro). Dont la trajectoire trainarde à l’approche du tunnel du Carrousel laissait présager le pire.
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Si l’on en croit Christopher Hitchens (Dieu n’est pas grand. Comment la religion empoisonne tout, traduction d’Ana Nessun, Belfond 2009), « certains anciens Égyptiens croyaient que la sodomie était la cause des tremblements de terre. » Cela donne à penser sur la solidité de nos croyances et convictions d’aujourd’hui.
Rodolphe Burger, par exemple, est un chanteur chic. La preuve : Pierre Alferi et Olivier Cadiot lui fournissent du matériau verbal. Ils entendent, ai-je cru comprendre, se tenir à distance de la chanson à texte, laquelle leur paraît assez peu opérante, opératoire, moderne, assez peu chic.
Un jour, il y a bien longtemps, dans un de ces cafés où nous nous réfugions les après-midis quand l’appel des cours de terminale se faisait peu sentir, une amie m’expliqua qu’elle rencontrait des problèmes avec sa bonté. Nous étions jeunes, nous avions des discussions empreintes de gravité.
L’intimité est sacrée. C’est un « besoin vital de l’âme ». Même si Simone Weil ne l’a pas retenue dans sa liste qui en compte quinze (L’enracinement. Prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain). Selon Simone Weil, après le besoin de vérité, « plus sacré qu’aucun autre », les besoins vitaux de l’âme humaine sont, dans l’ordre où elle les expose : le passé, l’ordre, la liberté, l’obéissance, la responsabilité, l’égalité, la hiérarchie, l’honneur, le châtiment, la liberté d’opinion, la sécurité, le risque, la propriété privée, la propriété collective.
Gaëtan Brulotte se présente comme « écriveur ». Rien à voir avec « l’écrivant » de Roland Barthes (lequel dirigea sa thèse de doctorat, Aspects du texte érotique, à l‘EHESS). C’est plutôt une manière à la fois modeste et orgueilleuse, voire québécoise, d’exprimer sa passion pour l’écriture et la lecture.
Passion qu’on perçoit avec netteté dans Nulle part qu’en haut désir.
Attendu que :
vous souhaitez ardemment vous rafraîchir la mémoire quant à la Commune de Kronstadt, au Grand Jeu et aux Phrères Simplistes, à Claude Tchou (ça vous dit quelque chose), à Jean-Louis Brau, à Ali Ibn Muhammad (ça ne vous dit rien et vous allez le découvrir), à Anna Mahé (non plus, pareil), à Flora Tristan et à Clifford Donald Simack ;
L’autre soir au métro Solférino (mon lieu de travail est sis dans un quartier chic, si vous voulez savoir, un ancien hôtel particulier du septième arrondissement, je n’en dirai pas plus, il y a tant d’envieux), une jeune femme m’a abordé. Elle portait une tablette et un sur-gilet orange, ou bleu je ne sais plus. Elle faisait une enquête. Officielle, apparemment. Elle procédait à un sondage. Pour la RATP ?
Claude Arnaud est, entre autres, l’auteur de Chamfort (Robert Laffont, 1987) et de Proust contre Cocteau (Grasset, 2013). Il n’est pas impossible que ces deux livres aient pu inspirer à des lecteurs l’envie de recourir au mot « chef d’œuvre ». Sans me porter à ces extrémités (dans l’incapacité où je me trouve de définir en quoi consiste précisément un « chef-d’œuvre »), je me contenterai de souligner qu’outre leur précieux contenu informatif, il est indéniable que des lectures réitérées n’en épuisent ni la substance ni la singularité.
Ceux qui tentaient de s’échapper, qu’on rattrapait, qu’on pendait par les pieds, qu’on fouettait et qu’on achevait par balles.