Je note ces quelques réflexions au sortir de la double exposition Claude Monet – Joan Mitchell, dialogue et Joan Mitchell, rétrospective qui se tient à la Fondation Louis Vuitton, non loin du Jardin d’Acclimatation (tiens, un lipogramme en “e”) jusqu’au 27 février prochain.

Très tôt, Jean-Christophe Bailly a eu la conviction qu’il serait écrivain, quelqu’un donc qui écrit, qui écrit des livres. On aurait tendance à penser qu’il s’agit principalement d’essais. Ils le sont, certes, mais des essais qui s’écriraient avec les autres genres, qui les élargiraient, qui ne désolidarisent pas le « désir de comprendre » d’une « expérience d’écriture ».

Sylviane Coyault s’entretient avec Jean-Christophe Bailly, notamment autour du Parti pris des animaux dans le cadre du festival Littérature au Centre 2021, cette année en ligne en partenariat avec Diacritik. Une édition centrée sur « Littérature et animal ».

« La langue se souvient de toutes les phrases qu’elle a dites, de tous les mots qui sont venus la rendre vive et la parer. Chaque mot est la surface d’apparition d’un sens qui s’est constitué peu à peu, au cours de siècles et de siècles de formation. » Il en va, d’une certaine manière, de même avec l’œuvre de Jean-Christophe Bailly (dont je viens de citer deux phrases, extraites de Saisir, 2018, p. 121) : chacun de ses essais se souvient de toute une constellation de livres dont il actualise et relance la réflexion proliférante.

Au cœur des années 1960, hanté par la civilisation de l’image à laquelle il commençait à réfléchir, Barthes est soudain déchiré par cette évidence : il n’existe aucune image à l’état adamique. Toute image viendrait après un impossible paradis, n’obéirait à aucune idée de nature et serait toujours, selon Barthes, le fruit d’une culture parfois si ancrée en elle qu’elle en viendrait à oublier son geste culturel même. Nul doute qu’une telle réflexion sur l’impossible nature de l’image pourrait figurer en exergue du splendide nouvel essai de Jean-Christophe Bailly, L’Imagement paru au Seuil.