Avec Gangs of London, Gareth Evans revisite la série de mafia en injectant un cocktail d’adrénaline et d’hémoglobine qui emprunte aux films d’action américain et asiatique (Die Hard, la saga Jason Bourne, le cinéma de John Woo ou de Takeshi Kitano). Des toits de Londres à la campagne galloise en passant par les faubourgs respectables où s’épanouissent les familles mafieuses, Gangs of London renvoie à Snatch ou à Peaky Blinders et esthétise l’ultra-violence jusqu’à la fascination coupable.
Quand Finn Wallace (Colm Meaney) est assassiné, son meurtrier ignore qu’il vient de signer la fin de la coexistence relativement pacifique entre différentes organisations criminelles, Kurdes, gens du voyage gallois, Albanais, Irlandais, Pakistanais… Si la succession est assurée par son fils Sean (Joe Cole) et Ed Dumani (Lucian Msamati) son principal associé, la mort du parrain aux allures de gentleman-farmer augure d’une guerre des clans inévitable.

Parce que l’héritier veut faire toute la lumière sur le meurtre de son père, Sean met un coup d’arrêt à tous les trafics en cours. Ce qui n’est pas du goût des associés et « partenaires », gangsters avérés ou businessmen à l’allure respectable (la famille s’est dotée d’une vitrine légale avec employé.e.s, conseil d’administration et actionnaires ayant pignon sur rue). Et derrière la quête de Sean Wallace, des complots, des secrets et l’enquête d’un policier infiltré (Sope Dirisu) qui flirte dangereusement avec l’illégalité tandis qu’il travaille à asseoir sa couverture.

Venu du cinéma et passionné d’arts martiaux, Gareth Evans a fait ses classes en Indonésie, avec trois longs métrages qui l’ont révélé au public des films d’action qui a notamment encensé The Raid. Avec un budget hors normes – 30 à 40 millions de dollars pour 9 épisodes –, la série a bénéficié de conditions de tournage inhabituelles, 20 à 30 jours de tournage pour un épisode, voire une semaine pour une seule scène d’action…

Mais le résultat n’est pas que dans la prouesse technique. S’il s’agit bien d’une histoire « classique » de vendetta, d’honneur et de guerre de territoires sur fond de trafics en tous genres (drogue, prostitution, armes…), l’intrigue se déploie aussi et surtout grâce à un scénario retors et une galerie de personnages très écrits (jusqu’aux clichés, non exempts de critiques), très bien dirigés et interprétés. Un ensemble qui fait de Gangs of London un thriller complexe et d’une radicalité fascinante.

De l’ouverture crépusculaire qui convoque Gotham version Pennyworth jusqu’au final cathartique, on ne compte plus les alliances éphémères, les trahisons, les stratégies des uns et les agendas des autres. Les personnalités se révèlent à mesure que l’on avance dans ce qui ressemble parfois à une surenchère de violence primaire. Gangs of London enchaîne les scènes choc et fait de chaque épisode un mini-film tout en brutalité parfaitement assumée. Torture, assauts à l’arme lourde, exécutions en règle et tirs de snipers, combats à mains nues chorégraphiés au millimètre qui repoussent les limites du supportable, explosions et impacts de balles en gros plan et en caméra subjective… À grand renfort d’effets spéciaux impressionnants, tout en creusant ses personnages, la série de Gareth Evans visse le spectateur au fond de son fauteuil face à tant de violence brute, sanglante et jusqu’au-boutiste. Loin de l’ambivalence et de la subtilité des Sopranos ; loin de la violence en col blanc de Billions ou de la furie trashy comique de The Boys, Gangs of London est une mécanique narrative et visuelle implacable.
Gangs of London. De Gareth Evans et Matt Flannery. Avec Ray Panthaki, Joe Cole, Lucian Msamati, Paapa Essediu, Sope Dirisu, Michelle Fairley, Pippa Bennett-Warner, Brian Vernel, Jing Lusi,Colm Meaney… produite par Pulse Films & Sister Pictures pour AMC © 2020 Sky Atlantic / AMC – intégrale disponible en replay sur Starz.com et Starzplay sur My Canal.