En quelques mots, Pennyworth, c’est la jeunesse d’Alfred, futur majordome de Bruce Wayne et serviteur dévoué des Batman et Robin des livres et des films. En quelques notes d’un générique inspiré, Pennyworth est un prequel très graphique qui dépasse largement le seul univers de DC Comics et renvoie à l’âge d’or de la série télévisée britannique.
Dans une réalité alternative et une Angleterre qui porte encore les stigmates de la guerre, le jeune Alfred Pennyworth revient à la vie civile après 10 ans passés dans l’armée. Créateur de Gotham (la jeunesse du commissaire Gordon), Bruno Heller entreprend de raconter le passé d’Alfred et sa rencontre avec le père de Bruce Wayne, alors que des forces obscures tentent de renverser la royauté et d’instaurer un régime autoritaire. Dans ce swinging London reconstitué, Alfred et ses ex-compagnons d’armes vendent leurs services aux plus offrants, quitte à se mettre hors-la-loi, tout en étant persuadés d’être du bon côté du revolver. À la fois fils prodigue, amoureux transi aspirant à une vie tranquille et brute froide qui n’a pas peur des bas-fonds et de la pègre, le jeune Alfred est un personnage énigmatique, ambigu, bien loin du flegmatique majordome que l’on connaît aujourd’hui.

Une bande son ne fait pas tout mais la partition décalée fait beaucoup pour cette série qui hésite entre dystopie et espionnage, science-fiction et action… À la manière d’Avengers (Chapeau melon et bottes de cuir en VF) pour son ambiance onirique, Pennyworth affirme à l’envi son ancrage dans la culture pop des années 60 à 80, pour preuve avec ces titres d’épisodes portant les noms de chanteuses et actrices : Cilla Black, Shirley Bassey, Julie Christie, Sandie Shaw, Marianne Faithfull… convoquant au passage des titres emblématiques des Who, Clash, Tin Soldier, Sex Pistols et des Rolling Stones. Et on a aimé d’emblée la tonalité imprimée par Paint it Black sur des images de chasse à courre dans la campagne anglaise.

Si le personnage principal est obscur, le scénario se révèle tout aussi torturé, affectant parfois un certain classicisme mais restant souvent sur le fil, avec des scènes qui tutoient le fantastique, renvoient à Conan Doyle, au Prisonnier, à Dr Who (ou même Magnum PI années 80 avec ses flashbacks guerriers dans la jungle de Bornéo). De fait, la rencontre avec Thomas Wayne en devient anecdotique et l’avènement d’un régime dictatorial au Royaume-Uni qui sert de trame à Pennyworth s’affranchit de l’histoire attendue (la relation d’Alfred avec les parents de Batman) pour privilégier une série d’atmosphère et de violence qui emprunte à ses aînées pour mieux les réinventer.

Enfin, sans réduire Pennyworth à sa seule forme et à ses inspirations, on ne pourra pas manquer de souligner que les premières notes de qanûn du thème principal signé David E. Russo, en appellent immédiatement à John Barry et Amicalement Vôtre (The Persuaders) et The Adventurer, propulsant le sérivore au cœur d’un spin-off référentiel, porté par une bande son sixties et servi par une photographie crépusculaire.
Séance d’attrapage, saison 2, épisode 6. Pennyworth, de Bruno Heller, d’après les personnages créés par Bob Kane et Bill Finger. Avec Jack Bannon, Ben Aldridge, Hainsley Lloyd Bennett, Emma Paetz, Ryan Fletcher, Dorothy Atkinson, Ian Puleston-Davies, Paloma Faith, Jason Flemyng, Polly Walker, Emma Corrin dans les rôles principaux. Diffusé sur Epix et Amazon Prime Vidéo. Produit par Warner Bros.
Crédits photos © DC Entertainment, Warner Bros. Studio