Le Transperceneige (Snowpiercer) : extinctions et renaissances

Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved

Un train de mille et un wagons qui ne s’arrête jamais, roulant tout autour du monde dans un hiver éternel. Après un cataclysme planétaire (causé par l’homme), des survivants choisis et une poignée de « resquilleurs » ont embarqué à bord d’un convoi géant, unique lieu de vie sur une planète dévastée, dernier bastion de la civilisation : le Transperceneige (en BD), le Snowpiercer (sur les écrans).

En 2020, le train salvateur imaginé par Jacques Lob et Jean-Marc Rochette au début des années 80 poursuit doublement sa route avec la sortie à quelques semaines d’écart de l’album ExtinctionsActe II (scénarisé par Matz et toujours dessiné par Rochette) et l’arrivée sur la plateforme Netflix de l’adaptation en série TV signée Graeme Manson et Josh Friedman.

Près de quarante ans après les premiers pas de l’arche de fer, le Transperceneige n’a rien perdu de sa force narrative, mettant en scène les errements et les travers d’une humanité toujours plus concentrée sur son bien-être personnel au détriment de son environnement.

Parcourant la blanche immensité
D’un hiver éternel et glacé
D’un bout à l’autre de la planète
Roule un train qui jamais ne s’arrête

Tel un mantra, ce quatrain est martelé page après page : le Transperceneige doit avancer à tout prix, pour s’auto-alimenter en énergie, puisant dans le mouvement perpétuel la source de sa survie et de celle de ses passagers. Dehors, la température mortifère (sous les – 100° Celsius) fait que toute vie est désormais impossible, et l’humanité doit attendre et espérer que cette nouvelle ère glaciaire prenne fin. Dans ce contexte qu’il a lui même créé, l’homme (ou le peu qu’il reste) ne doit d’exister encore que par la grâce d’un scientifique de génie. Mais ce « bienfaiteur » a eu l’altruisme sélectif : les wagons ne devaient être accessibles qu’à des passagers ayant acheté leur billet, l’humanité payant au prix fort le maintien des inégalités de classe.

Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved
Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved
Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved
Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved
Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved
Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved

Après l’adaptation cinématographique réussie de Bong Joon Ho en 2013 – le réalisateur coréen avait fait de la dystopie de Lob et Rochette un one shot nihiliste, captant l’essence de la BD sans (trop) sacrifier au tout spectaculaire –, le Snowpiercer renaît donc en télévision. Sur Netflix, on découvre alors une série loin de l’univers de départ, un polar en huis-clos qui se teinte parfois de considérations politiques (sur le racisme social, sur l’opposition dominants / dominés, sur ceux qui ont tout versus ceux qui n’ont rien, sauf l’espoir…). Un parti-pris qui fait parfois du train un simple décor, au risque de flirter avec des écueils de taille : quand l’enquête policière prend le dessus, quand la réalisation soignée devient esthétisante et privilégie l’action pure…

© Rochette – Matz / Casterman
© Rochette – Matz / Casterman
© Rochette – Matz / Casterman
© Rochette – Matz / Casterman
© Rochette – Matz / Casterman

Fable dystopique, Le Transperceneige originel était un récit d’anticipation, désabusé, à l’humour noir très 80’s, sarcastique et brut. La série télé de 2020 tire, elle, du côté de la saga numérique, à l’esthétique certaine – là où le long métrage restait plus proche de la BD, embarquant le lecteur vers une chute finale et une mort inévitables. Le nouvel opus signé Matz et Rochette, second acte d’un prequel destiné à expliquer pourquoi et comment on en est arrivé là, a des allures de requiem : le récit se fait alors road-movie, rappelant La Route de Cormac McCarthy pour mieux questionner ce qui reste de notre humanité dans des conditions climatiques et sociales extrêmes.

© Lob – Rochette – Legrand / Casterman

A l’heure de la pandémie mondiale de Covid-19, Le Transperceneige – Extinctions et Snowpiercer ont en partage de tracer et de suivre un même chemin :  quel monde après ? Et comment prendre conscience  du fait que nos choix d’hier écrivent l’histoire de demain.

Capture Netflix © TM &Turner Entertainment Networks, Inc. A WarnerMedia Company. All Rights Reserved

Rochette / Matz, Transperceneige, Extinctions – Acte II, 94 p. couleur, Casterman, 18€

Snowpiercer, créé par Graeme Manson et Josh Friedman. Avec : Jennifer Connelly, Daveed Diggs, Mickey Sumner, Alison Wright, Sheila Vand… Diffusé sur TNT et Netflix. Production TM &Turner Entertainment Networks, Inc.  WarnerMedia Company.