Dans son manteau noir il marche sur la corniche comme un fou aujourd’hui il n’a pas encore parlé il n’a croisé personne de particulier ou alors il s’est arrangé pour ne rien dire du tout il a fait des airs avec ses yeux des gestes avec ses mains des signes de la tête son téléphone n’a pas sonné depuis des lustres et encore maintenant il ne sonne pas il fume le monsieur dans le manteau une cigarette en regardant vers rien et à l’intérieur de sa tête tout le monde parle il entend les chiens de la rue qui aboient quand il passe les gens qui se disent des mots dans les oreilles quand il s’arrête sur la corniche pour rien ou pour jeter sa cigarette par terre les feux rouges qui éclairent sa tête en rouge quand il se concentre pour respirer l’air qui est froid comme de la menthe et la mer qui lui crie dessus (…)

Le pogrom de Kishinev de 1903 prend, dans le cours de l’histoire mondiale, une importance particulière. Considéré comme précurseur de l’Holocauste, c’est l’événement avec lequel l’horizon du XXᵉ siècle s’assombrit, non seulement pour les territoires de l’Empire russe mais aussi pour l’Europe. Il sonne le glas de l’ancien monde, annonçant l’avènement des nationalismes totalitaristes, la destruction des juifs d’Europe et une crise de l’humanisme similaire à celle qu’avait connue le XIXᵉ siècle.

Notre croisière d’écriture se poursuit.  Rappelons que quiconque peut réserver une cabine sur Pandémonium, Péan pour les morts de ce printemps et pour l’agonie du monde, et y confiner un texte comme une capsule de temps. Chacun.e est invité.e à faire toute une histoire de ce silencieux printemps. Le confinement est notre condition, le récit le seul remède.
Diacritik, partenaire de cette expérience d’écriture collective, vous propose aujourd’hui de (re)découvrir le texte de Vivianne Perelmuter.

Il est des moments où il faut savoir se taire. Je n’ai jamais su. D’autant moins lorsque les relents d’une polémique nauséabonde viennent me chatouiller les naseaux. Les polémiques sont inventées de toutes pièces, chacun le reconnaîtra en privé. Il faut déjà du temps libre pour écrire ; il faut bien du temps à gâcher pour nourrir une polémique qui ne concerne et n’intéresse que ceux qui la nourrissent.