En 1992, The Cure accède à la plus grande popularité mondiale avec son neuvième album Wish qui atteint la première place des charts anglais et la deuxième aux USA, porté par le single Friday i’m in love que vous fredonnez peut-être déjà au moment d’en lire le titre. Une nouvelle écoute du disque qui ressort dans une version remasterisée par Robert Smith et « augmentée » (mot à la mode mais qu’il ne faudrait pas abandonner au monde de la réalité digitale) de 24 titres et démos inédits nous ouvre à un authentique joyau subtilement poli par les 30 ans qui nous séparent de sa création.
Wish, paré d’une somptueuse couverture bleue et rouge (la forme ronde est-elle planète, œil ou hublot ?), déploie l’essence-même du groupe, déplie l’exposé quasi scientifique, concentré de leur art : rock gothique sur clavier glacé (Apart, Trust ), pop qui bout de plaisir (High, Friday i’m in love, Doing the unstuck), compositions complexes et sophistiquées (From the edge of the deep green sea, End) et attaques électriques délirantes de grandes envolées à la pédale wah-wah (Cut, Open). Du chaud, du froid et leur paroxysme alterné, destin unifié du projet initial de Smith qui avait l’intention au moment d’entrer au studio The Manor dans l’Oxfordshire en 1991 de créer deux disques séparés. Aujourd’hui, Wish poursuit sa course dans le temps grâce aux titres inédits, petites pièces de studio finalement délaissées qui disent une créativité ahurissante, Robert Smith déclarant d’ailleurs à propos de cette période du groupe : « Nous étions en feu ».
Miss Van Gogh et Frogfish, deux démos sautillantes et sucrées se dégagent, chansons instrumentales tout comme les quatre titres de haute altitude émotionnelle Uyea sound, Cloudberry, Off to sleep… et The three sisters disponibles jusqu’à présent uniquement sur une cassette sortie en édition très limitée. Smith, cette tête chercheuse qui a toujours fouillé dans la matière première du rêve depuis les premières chansons protopunk a traversé l’enfer d’une trilogie sombre (les disques Seventeen Seconds, Faith et Pornography) et produit des albums de pop à succès mais avec Wish il excelle en unifiant son art et installe son groupe d’alors (Porl Thompson – guitares, Simon Gallup – basse, Perry Bamonte – clavier, guitare, et Boris Williams – batterie) sur un sommet duquel on ne peut que descendre. À moins que le prochain album du groupe, Songs of a lost world, dont la sortie est sans cesse repoussée, ne vienne relancer la trajectoire de ces adorables géants.
The Cure, Wish, édition du 30ème anniversaire, cd, vinyle et streaming.
25 novembre 2022, Polydor.