En mode gonzo loin d’Angoulême

A la recherche de Peter Pan, Cosey

Cette année, je ne suis pas allé à Angoulême. Et je le regrette. Je le regrette parce que malgré une propension à la misanthropie et à l’agoraphobie qui me conduisent parfois à préférer les bulles dévorées en solo dans mon salon aux salons rassemblant des bédévores dans une bulle, le programme de cette 44e édition était au demeurant et a posteriori très alléchant.

souviens-toi-jonathanCette année, je ne suis pas allé à Angoulême. La faute à un emploi du temps bien chargé qui m’a imposé de choisir entre passer du (bon) temps à lire des albums choisis, glanés au hasard de déambulations mercantiles dans des temples de la consommation pour cadres atteints de fièvre acheteuse et remplir mes obligations de critique devant se dépêcher de finir ses articles à temps pour la mise en ligne dictée par l’actualité plus ou moins brûlante.

Je ne suis pas allé à Angoulême parce que (au choix) :

— Je n’avais pas envie,

— Aucune chambre n’était disponible et la réceptionniste qui a entendu mon cri de surprise quand elle m’a dit « mais Monsieur Bry, vouloir réserver une chambre avec vue sur les Halles cinq jours avant le début du Festival, c’est comme demander à un socialiste de savoir compter la participation à sa primaire »,

— En 2014, j’ai voyagé en compagnie de Georges Wolinski en n’osant pas lui adresser la parole et lui dire combien j’aimais son travail, ne sachant pas que j’allais le regretter moins d’un an plus tard…

Je n’ai donc pas assisté au sacre de Bernard Cosendai, dit Cosey, grand prix 2017 du Festival, préféré à Manu Larcenet et Chris Ware. Un prix largement mérité (le nom du dessinateur suisse était régulièrement évoqué lors des éditions précédentes) et qui a fait resurgir en moi d’heureux souvenirs de lecture des aventures de son héros totémique : Jonathan. L’idée de me rendre dans la cité angoumoisine et de sauter dans un TGV m’a alors étreint, histoire de m’improviser reporter subjectif comme j’avais pu le faire il y a deux ans pour ne pas devoir me contenter d’une information à distance et lire et relire les dépêches AFP copiées-collées ici, et encore ici.

Mais je ne suis pas parti finalement. Et j’ai recommencé à le regretter (plusieurs choix possibles) :

— En relisant le programme de la 44e édition. Pensez-donc : 16 expositions (celles de Kazuo Kamimura et Will Eisner sont respectivement visibles jusqu’aux 12 mars et 15 octobre 2017 au Musée de la bande dessinée), 7 spectacles et rencontres, des espaces partenaires et marchands où l’on peut satisfaire les collectionnites aiguës moyennant espèces sonnantes ou plastifiées et augmenter de fait et exponentiellement un nombre sûrement déjà conséquent d’albums, livres ou objets divers et dérivés en même temps que le chiffre déjà impressionnant des étagères destinées à les recevoir. A tel point que le bédéphile a parfois l’impression de davantage collectionner les bibliothèques que les œuvres complètes d’Hergé, Pratt, Morris, Goscinny ou Franquin.

L'homme qui tua Lucky Luke

— Quand j’ai découvert le palmarès qui a couronné Paysage après la bataille d’Eric Lambé et Philippe de Pierpont Actes Sud / Frémok (Fauve d’Or Prix du Meilleur album) ; Ce qu’il faut de terre à l’homme de Martin Veyron chez Dargaud (Prix spécial du jury) ; L’homme qui tua Lucky Luke de Matthieu Bonhomme publié chez Dargaud (Prix du public) ; Chisakobé t.4 de Minetarô Mochizuki publié par Le Lézard noir (Prix de la Série); Mauvaises filles d’Ancco publié chez Cornelius (Prix Révélation) ; Biscoto édité par L’Association Biscoto (Prix de la bande dessinée alternative) ; La Jeunesse de Mickey par Fred Tebo chez Glénat (prix Jeunesse) ; Le Club des divorcés de Kazuo Kamimura aux éditions Kana (prix du patrimoine) et L’été Diabolik d’Alexandre Clérisse et Thierry Smolderen chez Dargaud (prix polar).

— Quand j’ai lu les commentaires unanimes des auteurs, dessinateurs, scénaristes que je suis sur Twitter qui disaient que c’était une belle édition, calme et sans polémique pour une fois. Cela dit, on m’a rapporté que ça manquait de filles. Mais je crois celui qui m’a écrit ce sms pendant la soirée de clôture ne parlait pas du palmarès…

Mais je dis ça sans savoir : je n’y étais pas.
L’année prochaine ?