Elle marchait dans les rues de l’année dernière avec un air triste, des yeux tristes, des pas lents. Le monde autour était froid et bleu, des gens parlaient. Personne ne la regardait en particulier quand elle passait devant les magasins et autour du port et même de loin il n’y avait personne pour lui regarder le dos. Comme si c’était l’été, la mer reflétait plein de petits morceaux du ciel.
Jade Lorenzelli
Tout seul, il étire ses rayons dans le ciel bleu-gris, le soleil. Il y a des gens qui parlent et des gens qui ne parlent pas, des gens qui marchent, et des gens qui font exprès de ne rien faire. La rue sent le fût vide, la cigarette, les rats. L’été a rempli la ville de groupes de gens qui parlaient fort, qui filmaient tout, qui cassaient les verres, vidaient les supermarchés et remplissaient les bus. Depuis, les pavés qui entourent le port sont : noirs. La ville semble : vide.
Ce matin il y a du vent sur la mer et pourtant tout est déjà chaud. La télé parle en continu et en même temps que la radio et que les gens qui font la queue de partout. Les avions low cost font des allers-retours dans le ciel et déversent sur le Vieux Port des gens qui se ressemblent tous. Et qui se perdent comme ils peuvent dans les petites rues. Et qui cherchent un morceau de la mer. Et qui achètent des savons. En plein milieu d’une tempête de soleil qui bombarde tout.
C’est le matin sur le Vieux Port. Il fait beau et tout autour de la mer, plein de gens ne font rien. Le vent balaye les touristes de l’automne et Jérôme Bertin marche sous l’immense miroir moche sous lequel le monde entier s’est pris en photo.
Quand les vagues ne remuaient pas les claquettes et les vélos électriques comme le tambour de la machine à laver, elles ne s’échouaient sur rien. Tout l’été la mer n’a rien donné et le soleil a brillé sans aider personne.
C’est vrai que cette nouvelle année ne commence pas fort. On travaille et on dort mal, on fait les courses, on range les souvenirs de voyage les projets de voyage, on trie les bibliothèques. Le téléphone sonne de moins en moins, les conversations tournent en rond et dès que c’est le week-end, il pleut. On attend on attend on attend et on vieillit.
Comment à Marseille, chacun rentre chez soi une bière à la main comme on porte sa croix.
Dimanche 1 – « On réussit bien mieux à contempler la vie quand on la regarde par une seule fenêtre » (Gatsby le magnifique).
Lundi : La blague
Sur les terrasses des cafés ou debout au comptoir, personne ne rigole. On a peur de tomber malade, peur de la guerre ou de faire une gaffe. On ne parle pas de grand-chose. Et d’habitude, les cérémonies on s’en fout.
Lundi (mais peu importe) Paris Orly
Prendre l’avion, en long courrier et avec plein de correspondances, c’est quand même l’occasion de polluer un bon coup.
Lundi : tout seul
Cette année encore, mais plus que d’habitude on a voulu couper : le portable, les mails, les photos, le travail, les amis. On a voulu disparaitre des radars, revenir bronzé et sec comme un pruneau, les bras plein de cadeaux faits à la main par quelqu’un là-bas.
Lundi : Game of what
Les semaines en immersion s’enchainaient bien. On était à l’affut de la gaffe et de la bonne nouvelle, on écoutait les histoires des gens, on prenait des notes on disait « tu peux répéter ? ». Puis sans trop savoir pourquoi on a pensé vacances. On a voulu un autre air, voir s’il se passe quelque chose ailleurs et prendre l’avion.
Lundi : Sur la banquise
Lundi : Faust à Ibiza
Ils étaient serveurs barmen strip teaseuses et gogo dancers, ils étaient tatouages piercings nombril et bronzage cabine. Ils ne croient aujourd’hui en plus grand-chose et vivent de bookings en boîtes de nuits de province : ce sont les Anges de la télé-réalité, les Marseillais, les Cœurs brisés.