The Boys (saison 3) : amours, gloire et bottés

© Cinémax - Amazon Prime Vidéo

Alors qu’on avait laissé les 7 en pleine crise, leur réputation mise à mal avec la découverte d’une nazie bitch dans leurs rangs et les exactions de leur leader toujours plus psychopathe, les créateurs de The Boys auraient voulu faire oublier une deuxième saison un peu molle du super genou qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement.

La troisième saison de The Boys — disponible sur Amazon Prime Video à raison d’un épisode chaque vendredi — s’est ouverte sur un changement de paradigme où les supers privatisés d’Eric Kripke sont désormais sous tutelle du gouvernement et où chacun de leurs faits et gestes IRL ou sur les réseaux sociaux est plus scruté qu’un tweet de Manuel Valls. Pour ceux qui découvriraient cette série inspirée des comics de Garth Ennis et Darick Robertson, The Boys est le récit d’un combat entre un groupe d’humains « normaux » et des super héros markettés et propriété d’une multinationale aux méthodes aussi dévoyées que leurs « employés » en capes, bottes et costumes moulants.

Parue initialement en 2006, la bande dessinée a été un succès dès sa parution (même si un changement d’éditeur a dû avoir lieu parce que le ton de la série le gênait…) et jusqu’à sa conclusion en 2012 avant d’être adaptée en 2019 avec une fidélité incroyable et presque à la limite du supportable. Parce que The Boys a été conçu comme une satire, voire un pastiche, on aurait pu croire impossible la transposition avec des acteurs de chair et de sang. C’était sans compter sans le culot des show-runners qui ont sûrement créé la série la plus trash et la plus (ultra) violente de la décennie.

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Hugh (Jack Quaid) émarge désormais dans l’agence gouvernementale qui surveille les supers tout en filant le parfait amour avec Starlight (Erin Moriarty) qui va très vite prendre du galon au sein de l’équipe Vought ; Homelander (Antony Starr, plus inquiétant que jamais) voit sa e-réputation bien entamée après une exaction de plus ; au régime sec pour raison de santé, l’homme le plus rapide du monde (A-Train joué par Jessie T. Usher) court au ralenti tandis que l’homme poisson et Billy Butcher (Karl Urban) tentent de se faire à une nouvelle vie maintenant que tout est sous contrôle…

Avec ce postulat, The Boys poursuit son entreprise de démolition du genre en reprenant les thématiques des débuts et le chemin de l’hémoglobine à haute dose, et s’ébat sans retenue dans la provocation jusqu’au-boutiste, les viscères à l’air libre et les explosions de toutes sortes, têtes, corps, membres, et même organes. Âmes sensibles s’abstenir : on ne peut pas reprocher à la série de ne pas repousser les limites, du décalé potache au mauvais goût crasse en passant par le soap mielleux… The Boys semble s’être donné pour tâche d’enterrer la mythologie des super héros à chaque séquence, emballée dans un nihilisme certain.

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Dès lors, comment rendre la trashitude revendiquée sans divulgâcher ? Et ce, même au moyen d’images choisies ? Il est en effet compliqué de dire comment en ouverture du premier épisode, un « super » doté de la capacité de rétrécir jusqu’à faire la taille d’un termite se sert de son super pouvoir pour satisfaire son partenaire lors d’un jeu sexuel se soldant par un interruptus sanglant… Si derrière les provocations et les images et propos explicites, les créateurs ont retrouvé la vista des débuts, on peut tout de même s’interroger sur la pertinence d’un tel déballage gratuit : devant les scènes de sexe malsaines, la galerie de personnages pervers et pervertis, face à des instincts primaires à foison, on pourra éventuellement se réfugier derrière le second degré, dire la liberté et souligner la volonté des auteurs et scénaristes de toujours plus se jouer de l’imaginaire lisse cher aux franchises grand public. Cela étant, on pourra aussi pointer que tordre les codes, se poser en antithèse et en étendard de la contre-culture ne justifie pas certains errements, dont celui d’égrainer les scènes dérangeantes qui justifient et de loin un « parental advisory ++ » .

Pris sous l’angle de la critique de la représentation policée des super héros, The Boys pourra toujours se vanter de pointer une société aux dérives multiples, avec ces figures supposées inspirantes et données comme telles qui ne sont en réalité que des produits déviants. Entre les Boys chasseurs de supers ou la bande des 7 acteurs de leurs propres aventures dans des films à gros budget à même de faire encore plus de cash et de clics on ne sait qui et quoi aura le dernier mot. Les super-femmes et super-hommes sandwich esclaves de leur image et de leur employeur ne sont pas au bout de leurs surprises et de leur peine. Le spectateur non plus.

The Boys, créé par Seth Rogen, Evan Goldberg et Eric Kripke. D’après le comics de Garth Ennis et Darick Robertson. Avec Karl Urban, Jack Quaid, Laz Alonso, Tomer Kapon, Antony Starr, Erin Moriarty, Jessie T. Usher, Simon Pegg… Produit par Cinémax. Développé et diffusé par Amazon Prime Vidéo. Un épisode chaque vendredi.

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