Partenaire du 32e Salon de la Revue, Diacritik vous invite ce samedi à sa Carte blanche qui, cette année, rend hommage à Jean-Luc Nancy en compagnie de Philippe Beck et Christian Rosset.
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En 2012, dans un entretien amical, Jean-Luc Nancy et Jean-Clet Martin échangeaient au sujet de Derrida, du corps, du politique, de Spinoza – échanges ouvrant ou soulignant des résonances, des lignes possibles entre l’œuvre de l’un et celle de l’autre, des transversales à l’intérieur de chacune de ces œuvres qui sont aussi des lignes qui tendent vers un dehors, comme pour toute pensée véritable.
À l’annonce de la mort de Jean-Luc Nancy, ma première réaction a été le silence, suivie de près par l’écoute de musiques que nous avions partagées. Puis, le désir de réentendre sa voix se faisant sentir, je me suis repassé quelques-uns des travaux que nous avions élaborés en commun dans le cadre de la création radiophonique à France Culture, au tournant des siècle XX et XXI. Beaucoup de souvenirs. Toujours agréables.
C’est avec tristesse que nous apprenons le décès de Jean-Luc Nancy.
Le Président Emmanuel Macron, lors de l’annonce du premier confinement, au soir du 16 mars 2020, encourageait le peuple de France à la pratique de ce vice encore impuni qu’est la lecture. On se souvient de ses mots : « Lisez, retrouvez aussi ce sens de l’essentiel… » Nous sommes un certain nombre à n’avoir pas attendu ce précieux conseil prodigué sur un ton douceâtre et paternel, mais qu’importe ?
Une lecture de Jean-Luc Nancy par Jean-Clet Martin : Comment fait sens un « corps sans organes »?
Francfort, le 17 juillet 2017
Werner,
Werner, toi ici avec nous, toi si proche et si lointain, aussi lointain que proche,
Werner, plus loin…
Aurélien Barrau : Chers amis, nous voici réunis, sans direction claire, sans but annoncé, sans thème identifié. Alors, Carlo, pour le physicien théoricien que tu es — quoique tu sois loin de n’être que cela — cette pierre qui est devant nous, c’est quoi ?
Jean-Luc Nancy, j’en porte sur moi quelques souvenirs, comme on dirait d’un portrait, en ce qu’un portrait, c’est bien quelque chose que l’on porte, emmène et qui se déplace par la vertu de ce port. Il se porte d’ailleurs tout en me portant avec lui, souvenir où je suis inclus non seulement à titre d’observateur mais en tant que figure de fond.
Il y a plus d’une manière d’être immortel. On peut l’être à la façon des dieux, par insensibilité au temps. On peut l’être à la façon d’Achille, choisissant la gloire resplendissante plutôt qu’une longue vie en retrait. On peut l’être à la façon des académiciens, portés par la reconnaissance institutionnelle. On peut l’être à la façon des vampires, en se nourrissant du sang frais de ses proies.