Phèdre : KRYSTIAN feat Isabelle Adjani

KRYSTIAN feat Isabelle Adjani

Le personnage principal de cette Phèdre des Temples urbains n’est pas cette meuf, cette Queen de Phèdre mais Hippolyte, un gars d’aujourd’hui qui vient de Marseille et vit maintenant à Paris, qui est le batteur de Jul et de Trust. Cet Hippo est assez pur, et il fait ce qu’il peut avec cette vie et ces désirs qu’on nous inflige et qui nous affligent, pour le pire et le meilleur.

Hippolyte est en butte à une crise existentielle : blasé. Il désespère parfois du genre humain. Il pleure, il rit, s’enfonce dans la dépression, il doute, il a des regains d’espoir, des joies. Il a aussi cette jeunesse comme atout, force, et source de perdition : Éros et Thanatos, toujours le même combat, la même danse. Agonie veut dire combat, vous savez ? Mais il y a aussi que son petit corps est plein de santé, il encaisse bien, il vit des épiphanies, c’est la vida loca ! Kalash, kalash, allez, ça va passer crème ! De toute façon, quand on est dans la merde jusqu’au cou, disait Beckett, reste plus qu’à chanter !

Ceux qui aiment n’ont souvent à offrir qu’un amour de papier mâché. – T’es dispo, mec ? – Tfq ? – Plan direct ? – On se perche ? Or Hippolyte est en manque d’amour : un prince fut-il charmant est rarement aimé pour lui-même. Manque d’amour, vide, on a tendance à remplir tout ça par de la merde. Car la merde est dispo, et pas chère.

La triste ironie d’Hippolyte est une sorte de politesse : par amour-propre, il préfère faire chier son monde, quitte à ce que les gens le fuient, plutôt que de se plaindre – de quoi peut décemment se plaindre celui qui possède tout ? Tout, c’est-à-dire la jeunesse, la santé, le soleil, la mer.

Il ne mesurera l’amour vrai de Phèdre qu’après la musique, qu’une fois terminées les errances nocturnes et diurnes, une fois qu’il aura maté le craving. Bébé a besoin de câlins, mais « bébé veut du sale », aussi. Mais il écrit, et plutôt pas mal, et l’écriture sauve, alors… Il connaîtra l’envers de l’amour et ses théâtres, la traversée des apparences, la fucking jalousie qui fait qu’on se perd, qu’on souffre de ouf, mais qu’on se connaît mieux aussi ; il croisera la guedro, mais l’amour quand même, et il finira révélé à l’altérité.

La représentation de la sexualité est omniprésente : elle va de pair avec la conscience de la finitude, de l’abandon, elle est une fausse monnaie qui stérilise la vie du corps et celle de l’esprit. S’opposent à cette facilité des appli et des réseaux l’exaltation du désir vrai et de l’union mystique indiqués par la douceur de Phèdre, qui est là, pas là, qui est toute compassion et empathie. Cet instant de compréhension et d’acceptation ultimes ne pourra s’éterniser que dans l’instant précédant la mort, saine et définitive. Liebestod ? On verra. En même temps, si ça se trouve, c’est beaucoup plus simple et beaucoup plus doux. Ne nous prenons pas trop la tête.

Phèdre : KRYSTIAN feat Isabelle Adjani ! J’ai été heureux d’accompagner Krystian, comme je vais continuer de le faire sur l’EP à venir, Théâtres de l’amour, qui va mélanger du Barthes / Roland à la culture street. C’est un premier clip fait avec les moyens du bord, on espère que ça vous plaira, ainsi que la chanson – c’est pas la prod de Beyoncé, hein ! De Phèdre à aujourd’hui, tout a changé et rien n’a changé. Si vous aimez, vous connaissez la chanson : ne pas hésiter à liker, commenter, partager ! Merci.

 

(merci idem à Isabelle Adjani the ultimate Phaedra, à Jérémy Niels Circus le réal avec moi pour sa gentillesse, à Fabio Giovi aux arrangements, à Emmanuel Lagarrigue à la post-prod, et à Bertrand Grimont pour l’amitié, la fidélité et le set)