Le journal d’un cinéphile (2)

Réactions à chaud, commentaires et emportements (positifs comme négatifs) de Jérémy Sibony, critique ciné pour notre magazine. La vie d’un cinéphile, en fragments (presque) quotidiens. Subjectivité et passion assumées.

Mercredi 27 janvier

355502.jpg-r_215_290-f_jpg-q_x-xxyxx« Je continue de penser que le cinéma, c’est de l’émotion collective. On ne voit pas de la même façon un film d’Hitchcock, ou même Creed, seul dans sa chambre sur un petit écran qu’en salle Henri Langlois ou au MK2 Bibliothèque. Il faut vibrer avec les gens autour de soi. Ou bien ne pas vibrer, et même s’ennuyer, mais avec d’autres êtres humains. Sortir un peu de chez soi et aller rencontrer d’autres gens, ce n’est pas mal », Frédéric Bonnaud en entretien dans Télérama au moment de prendre ses fonctions de directeur de la Cinémathèque.

Nominations aux césars, peu de fautes de goût, malgré quelques bourdes : peu de nominations pour SK1, Comme un Avion nommé une seule fois, Fatima nommé pour le meilleur film (?), Noémie Lvovsky pourtant insupportable pour La Belle saison et surtout l’horrible Mon Roi, un peu partout (la présence de Vincent Cassel étant toutefois logique).
On attend la consécration pour La loi du Marché, Vincent Lindon, et Le Fils de Saul (ou Mia Madre, ok).

Comme d’habitude, la cérémonie devrait ressembler à un Ukraine/Suisse qui durerait 4 heures…

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Même si sa carrière nous invite à relativiser, Chuck Norris s’est quand même compromis en acceptant de jouer dans Porté disparu 3.

Jeudi 28 janvier

Mettons les choses au clair, le seul point commun entre Sarkzoy et Racine, ce sont les talonnettes.

Vendredi 29 janvier

120x176Mort de Jacques Rivette, l’un des grands pontes de la nouvelle vague, pas le moins intéressant. Si, comme pour la plupart de ses compagnons, on peut trouver l’oeuvre globalement surestimée, il est films comme Céline et Julie vont en bateau ou La Religieuse.
Du milieu des années 70 jusqu’au début des années 90, Rivette semble à court d’inspiration, jusqu’au consternant Bande des quatre, sorte de caricature de ce que la nouvelle vague pouvait avoir de plus faux.
Les années 90 marqueront un retour de flamme. Il obtient succès critique et populaire avec La Belle Noiseuse (Grand Prix à Cannes en 1991, Polanski aurait détesté paraît-il) puis Jeanne d’Arc (film que j’avais détesté mais curieusement entêtant, au point de le revoir plusieurs fois…).

C’est en 2001 qu’il réalisera son meilleur film Va Savoir, avec l’excellent Sergio Castellito. Parfois ridicule (Histoire de Marie et Julien), mais toujours audacieux (il aura touché à presque tous les genres : le film d’époque, le polar, la comédie musicale), il restera aussi l’auteur d’une critique aussi assassine qu’inepte sur le (médiocre) Kapo de Gillo Pontecorvo : « De l’abjection« . Godard en tirera un lieu commun sur le travelling et la morale.

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Spotlight : film séduisant car totalement anachronique. Un (bon) film des années 70, avec les qualités et les défauts des films dossiers de l’époque. Bavard, c’est vrai, didactique évidemment, mais surtout passionnant, révoltant (l’église camouflant les affaires de pédophilie), réalisation sobre et efficace qui va à l’essentiel. Comme à la grande époque, les acteurs sont bons (Mark Ruffalo, Michael Keaton ou Liev Schreiber) et le scénario bien écrit.

Du cinéma d’adulte, pour les adultes qui rappelle Jewison ou Lumet. Pas un chef d’œuvre mais un très bon film comme on n’en espérait plus venant d’Hollywood. En prime, un petit hommage au travail des journalistes de la presse écrite, ce qui, en ces temps d’imbéciles « les journalistes sont aux ordres » ou du sourire niais Yann Barthes fait toujours plaisir.

Spotlight de Tom McCarthy
Spotlight de Tom McCarthy

***

Extrait de la liste des nominations aux Césars 2016 : 

Meilleur film
Dheepan de Jacques Audiard
Fatima de Philippe Faucon
Marguerite de Xavier Giannoli
La Loi du marché de Stéphane Brizé
Mustang de Deniz Gamze Erguven
Mon roi de Maïwenn
La Tête haute d’Emmanuelle Bercot
Trois souvenirs de ma jeunesse d’Arnaud Desplechin

Meilleur réalisateur
Emmanuelle Bercot pour La Tête haute
Arnaud Desplechin pour Trois souvenirs de ma jeunesse
Maïwenn pour Mon roi
Jacques Audiard pour Dheepan
Stéphane Brizé pour La Loi du marché
Xavier Giannoli pour Marguerite
Deniz Gamze Erguven pour Mustang

Meilleur acteur
Jean-Pierre Bacri pour La Vie très privée de Monsieur Sim
Vincent Cassel pour Mon Roi
François Damiens pour Les Cowboys
Gérard Depardieu pour Valley of Love
Vincent Lindon pour La Loi du Marché
Fabrice Luchini pour L’Hermine
Antonythasan Jesuthasan pour Dheepan

Meilleure actrice
Catherine Frot pour Marguerite
Isabelle Huppert pour Valley of Love
Sofia Zeroual pour Fatima
Loubna Abider pour Much Loved
Emmanuelle Bercot pour Mon Roi
Cécile de France pour La Belle Saison
Catherine Deneuve pour La Tête haute

Meilleur acteur dans un second rôle
Michel Fau pour Marguerite
Louis Garrel pour Mon Roi
Benoit Magimel pour La Tête haute
André Marcon pour Marguerite
Vincent Rottiers pour Dheepan

Meilleure actrice dans un second rôle
Karin Viard pour 21 nuits avec Pattie
Agnès Jaoui pour Comme un avion
Noémie Lvovsky pour La Belle Saison
Sarah Forestier pour La Tête haute
Sises Babett Knudsen pour L’Hermine

Meilleur espoir masculin
Swann Arlaud pour Les Anarchistes
Quentin Dolmaire pour Trois souvenirs de ma jeunesse
Félix Moati pour À trois on y va
Finnegan Oldifield pour Les Cowboys
Rod Paradot pour La Tête haute

 Meilleure espoir féminin
Lou Roy-Lecollinet pour Trois souvenirs de ma jeunesse
Diane Rouxel pour La Tête haute
Zita Hanrot pour Fatima
Sarah Girafeau pour Les Bêtises
Camille Cottin pour Connasse

Meilleur scénario original
Dheepan
Marguerite
Mustang
La Tête haute
Trois souvenirs de ma jeunesse

Meilleure adaptation
L’Affaire SK1
Asphalte
L’Enquête
Fatima
Journal d’une femme de chambre

Meilleur film étranger
Mia Madre de Nanni Moretti
Youth de Paolo Sorrentino
Le Tout Nouveau Testament de Jaco Van Dorsale
Birdman de Alejandro Gonzalez Inarritu
Le Fils de Saul de Laszlo Nemes
Je suis mort mais j’ai des amis de Guillaume et Stéphane Malandrin
Taxi Téhéran de Jafar Panahi

Meilleur premier film
L’Affaire SK1 de Frédéric Tellier
Les Cowboys de Thomas Bidegain
Mustang de Deniz Gamze Erguven
Ni le ciel ni la terre de Clément Cogiter
Nous trois ou rien de Kheiron

Meilleur documentaire
Le Bouton de nacre de Patricio Guzman
Cavanna de Denis et Nina Robert
Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent
L’Image manquante de Rithy Panh
Une jeunesse allemande Jean-Gabriel Périot

Meilleur film d’animation :
Adama de Simon Rouby
Avril et le monde truqué de Franck Ekinci et Christian Desmares
Le Petit Prince Mark Osborne

La cérémonie sera présentée par Florence Foresti et se déroulera le 26 fevrier 2016 et retransmise sur Canal+ — Liste complète des nominés ici