Est-ce qu’il faut faire un texte Diacritik de plus ? Ou pleurer en silence, de rage, de désespoir, d’impuissance, de dégoût, de fatigue… pleurer dignement, dans son coin, pudiquement dans sa chambre, c’est mieux ?
Mais mieux comment, mieux pourquoi, ça veut dire quoi mieux maintenant alors que ce cœur ne bat plus, que ce sang ne réchauffe plus ce corps ?
Il s’appelait Samuel Luiz il et a été battu à mort par treize … ordures, sous-merde, je ne sais pas le mot, je ne trouve pas le mot, je cherche le pire des mots, le plus vulgaire, le plus dur… ils l’ont battu aux premières heures du 3 juillet 2021 à La Corogne, en Galice.
M. le maudit. La foule. L’horreur.
Luiz était aide-infirmier et il sortait de la boîte de nuit El Andén lorsque ses agresseurs ont cru qu’il les enregistrait sur son téléphone. Avait-il soigné la mère d’un de ses agresseurs ? Ma pensée est romantique, je sais, mais c’est possible.
L’un des membres du groupe a frappé Luiz avant que les autres ne lui tombent dessus. La police a décrit l’attaque brutale comme une meute humaine donnant des coups de pied à un jeune sur plus de 150 mètres.
Une meute. Des hommes. Des femmes. Des monstres.
Des femmes, il paraît, ont encouragé la chose, leur fils. Malheur sur elles, à jamais, les putes, les chiennes, c’est méchant pour les vraies putes et vraies chiennes qui ne méritent pas telle comparaison.
Aucun pardon, jamais.

Luiz a tenté de s’échapper à plusieurs reprises, il a voulu fuir, vivre. A quatre pattes, s’enfuir.
Il est tombé et s’est relevé jusqu’à trois fois, il a réussi à traverser la rue, mais ils l’ont rattrapé à nouveau et ont continué à le battre. Il y avait beaucoup de gens, hommes et femmes, et ils ne l’ont pas agressé mais ils ont encouragé la chose… il y avait des cris… jusqu’à ce que Luiz tombe définitivement au sol.
On raconte que deux sans-papiers d’origine sénégalaise ont essayé de s’interposer, en vain. C’est presque trop beau. Est-ce vrai ? Si oui tout est dit sur le monde d’aujourd’hui.
Luiz est décédé plus tard des suites de ses blessures à l’hôpital.
Il s’appelait Samuel Luiz et il avait 24 ans, 24 ans.
Le Talmud dit que celui qui sauve une vie, sauve l’humanité tout entière. À l’inverse j’ai envie de dire que cette foule, cette petite foule de merde, misérable, infâme, vient de tuer toute l’humanité.
Qu’ils aillent en enfer. Non, ils y sont déjà.
Les pédales contre les nazis désormais !
Partout ! Tout le temps !
Alors c’est la guerre ?
C’est une forme de guerre.
Contre tous les fascismes, les soft et les hard.
« Justice pour Samuel. L’homophobie et le fascisme c’est la même chose », clamait une gigantesque banderole tenue par des manifestants partis lundi soir de la célèbre place de la Puerta del Sol à Madrid.
Et dimanche c’était à Paris et Jean-Philippe Cazier était là : « Sous les pédés la rage ».

C’est le début de l’été 2021.
On parle surtout des vaccins.
On va oublier, il ne faut pas oublier.
On ne peut pas oublier.
N’oublions pas.
C’est les vacances pour beaucoup d’entre nous, l’homophobie ça commence par des petites blagues pas drôles, il fait chaud, on a un peu bu, on croit qu’on est drôle alors qu’on se moque de la « tarlouze » du coin… non, plus possible, zéro tolérance cet été, cassons de l’homophobe.
Le stigmate commence par l’injure, le regard en coin, le petit mépris, l’humour pas drôle…
Après, c’est Luiz.
Je vais casser de l’homophobe désormais.
Mais sans tuer. Personne.
Même les 13 monstres, là… je ne veux pas leur mort.
Qu’ils subissent leur existence misérable.
Je ne tue pas, moi.
Suis pas comme eux.