Diffusé sur TF1 depuis le 10 mars avec un battage raisonnable, Prodigal Son débarque en France quelques mois après son démarrage sur la Fox en 2019. Une série qui vient avantageusement remplacer l’horrible Magnum PI sans pour autant convaincre avec un pilote qui déborde de déjà-vu tout en essayant d’innover ça-et-là. Séance d’attrapage (ou pas), saison 2, épisode 5.
TF1 n’a pas francisé le titre original pour ne pas confondre la série de Chris Fedak et Sam Sklaver avec un soap hexagonal qui parlerait de la relation entre un rejeton marseillais parti s’émanciper loin des calanques et de son père ou une saga insulaire sur fond d’héritage mafieux. Prodigal Son est un thriller américain qui louche sur Le Silence des agneaux (pour la collaboration entre un serial killer et un agent du FBI) et emprunte aussi et pêle-mêle à Mindhunter (pour la psychologisation sur les scènes de crimes) ou aux Experts pour les scènes de crimes à répétition.
Malcolm Bright (Tom Payne) est profiler au FBI, agent (très) spécial qui a la double particularité de pouvoir entrer dans la tête des criminels pour mieux les traquer et d’être le fils d’un criminel en série qu’il n’a pas vu depuis plus de 10 ans. En 1998, Martin Whitly (Michael Sheen, avocat barré dans The Good Fight) dit « le chirurgien » a été arrêté pour avoir commis au moins 23 meurtres. Depuis, Il a beau avoir changé de nom, s’être fait une réputation en tant que criminologue, Malcolm Bright est toujours en proie à des terreurs nocturnes et à des cauchemars post-traumatiques. A peine viré du FBI, Bright est contacté par le Lieutenant Gil Arroyo du NYPD (Lou Diamond Philips) pour l’aider à résoudre un meurtre qui les confronte à leur passé commun : le flic et le fils ont affaire à un copycat, qui règle ses crimes sur ceux du père.
Les ressorts des intrigues possibles sont donc tous là : les relations entre le fils justicier et le père tueur, la quête de la vérité (sur le passé, sur les crimes violents qui fleurissent à chaque épisode), les secrets de familles (la mère, la sœur, les non-dits), les démons de Malcolm… Mais si le pitch est attractif, la réalisation est beaucoup trop classique et rappelle la construction très éprouvée de séries comme Law & Order ou Les Experts.
Ça tourne même à la mécanique trop bien huilée quand il s’agit de passer de l’appartement de Malcolm à l’extérieur jour sur une scène de crime, avec un détour par le labo du coroner, avant de filer direct chez un premier suspect en n’oubliant pas d’aller interroger papa au passage… Et puis que dire des dialogues qui se veulent érudits lorsque Malcolm dispense son savoir de brillant profiler devant un corps sans vie et lisant la lettre manuscrite de l’auteur du crime (dans l’épisode 3) : « regardez l’inclinaison de son écriture qui varie, ces fioritures, ces mots en gras (…) sûrement quelqu’un qui est atteint de graves troubles psychiques ». Sic. Ça tourne même au ridicule quand au moment d’annoncer son analyse : « le tueur a des visions, des hallucinations, c’est un tueur visionnaire, la plupart d’entre eux sont convaincus d’obéir à une puissance supérieure (…) une voix dans leur tête, celle de Dieu ou du diable » tandis qu’en fond sonore des notes de musique ne sont pas sans rappeler la bande son de X-Files… La vérité serait-elle ailleurs ?
Grand public – ce qui n’est pas un défaut –, Prodigal Son souffre de vouloir trop se distinguer des séries de genre tout en utilisant les mêmes codes. Qui plus est, avoir un personnage principal traumatisé et sur la corde raide demande de la rigueur dans l’écriture et une narration sans faille. Ce qui n’est pas le cas de Prodigal Son qui négocie mal la balance entre les enquêtes policières et les histoires personnelles. Prodigal Son ne renouvelle pas le couple meurtrier-justicier-que-tout-oppose-pour-combattre-le-crime : en s’enlisant dans un pathos familial qui tutoie le grotesque, Prodigal Son se révèle plutôt chiche. Un fils prodigue que l’on peut s’épargner en somme.
Prodigal Son, créé par Chris Fedak et Sam Sklaver. Avec Tom Payne, Lou Diamond Phillips, Halston Sage, Aurora Perrineau, Frank Harts, Keiko Agena, Bellamy Young, Michael Sheen… Deux épisodes tous les mardis sur TF1. Prochains épisodes : #5 & #6 le 27/03 à 21h05.