A l’heure d’une crise de la presse partout commentée, nombre de titres ne cessent pourtant de naître : Society, The Conversation, pour n’en citer que deux, l’un en version papier glacé, l’autre sur la toile. Les Jours continuant de se faire attendre.
Diacritik, donc. Un magazine dont le titre souligne l’ambition : mettre l’accent sur la culture. La culture dans toute sa gamme, de la plus populaire à la plus pointue. « Dia », comme le dit l’étymon, « en traversant », « à travers », en croisant les voix, les manières, en laissant les arts dialoguer, les critiques se répondre, se mettre en regard et en perspectives. Un dialogue que l’on espère voir se poursuivre dans les commentaires de nos lecteurs.
L’autre enjeu de ce nouveau magazine répond à une poétique du support : varier les formats d’articles, travailler sur les ressources de l’image (photographie et vidéo), traiter un livre à travers les photos des lieux qu’il traverse, commenter des strips ou des tableaux, des bibliothèques d’auteurs, de dessinateurs, d’éditeurs, de lecteurs, de traducteurs, donner un sens à la parole théâtrale, aux jeux scéniques, rencontrer les auteurs du monde de l’art, faire découvrir les coulisses de celui du livre ou du cinéma. Commenter, aussi, le discours porté sur la culture, dans la presse française ou étrangère. Toujours considérer l’objet artistique comme un sujet, dans son épaisseur et son feuilleté, ne pas refuser le langage technique mais privilégier un ton décalé. Ne jamais se prendre au sérieux, surtout, tout en restant exigeants.
Diacritik donnera des rendez-vous, mais sans se plier au diktat de l’actualité, en profitant de la souplesse qu’offre Internet. S’abonner au journal, nous suivre sur les réseaux sociaux, c’est pouvoir suivre les mises en ligne des nouveaux articles, des brèves et annonces de manifestations, du Chutier du jour.
Le magazine tel que vous le découvrez aujourd’hui mercredi 23 septembre 2015, même si la rédaction a les mains dans le cambouis depuis un moment, est le laboratoire de ce qu’il deviendra. Toujours tendu vers un horizon, un ailleurs, une altérité.
Il s’ouvre avec un dossier Barthes, dont la lecture fut fondatrice pour beaucoup de membre de la rédaction de Diacritik. Barthes, lecteur des signes, chercheur de sens, commentateur de textes et d’images, dont on célèbre le centenaire de la naissance, Barthes sujet d’un formidable et sensible documentaire d’Arte, diffusé ce soir — lire ici l’article de Johan Faerber et là celui de Christine Marcandier. Barthes dont Laurent Binet a réécrit la mort, et Johan Faerber critique et commente sa Septième fonction du langage qui vient de paraître. Le Barthes des Mythologies, du Journal du deuil, Barthes et son voyage en Chine, Barthes par Barthes, Barthes écrit par Thomas Clerc, Italo Calvino ou Thiphaine Samoyault. Mais aussi les écritures de Barthes telles qu’exposées à la Bibliothèque Nationale de France : l’exposition est terminée, une série de photographies nous permet de la rouvrir pour nos lecteurs. Feuilleter Barthes n’est jamais clos. D’autres articles viendront.
Dans cette première livraison, aussi, une rencontre bouleversante avec Jean-Jacques Pauvert, l’un de ses derniers entretiens avant sa mort. Et, parce que Diacritik ne reculera jamais devant un grand écart, Zep, Houellebecq, des nouvelles en trois lignes, Claire Chazal, Tyler Cross… Du théâtre, avec Pirandello mis en scène à La Colline (avant une tournée en régions), une exposition à New York, des livres de poche, et un aperçu de la presse culturelle en France à la mi-septembre. L’annonce du prix de la page 111, qui met en perspective tous les grands trophées de l’automne, le Grand Journal, la crise des migrants et cette terreur en nous qui ne veut pas finir, des annonces de rencontres et festivals.
Pour rompre avec la critique « classique », celle que l’on aime détester. Pour prendre les lecteurs, les spectateurs, les visiteurs… pour ce qu’ils sont : des lecteurs, des spectateurs, des visiteurs qui ne nous ont pas attendus pour être eux-mêmes critiques devant un spectacle, un film, une émission, après lecture d’un livre. Faire de la critique autrement, parler de la culture, tout simplement, échanger. Porter un autre regard sur les œuvres, changer de point de vue – au sens strict du terme – en faisant un pas de côté.
Un sacré chantier, un laboratoire de la culture telle qu’elle se construit aujourd’hui et demain, à partir d’hier, une passion que l’on espère communicatrice…
Diacritik : Lire, interroger, comprendre.