« (…) dans des documents de 1920 sur les « Événements de Saramao », j’ai vu un cliché où des femmes de Musha portaient chacune une tête coupée et, alignées sur plusieurs cercles devant le poste de police de Musha, célébraient par des danses « l’offrande de la chasse aux têtes », on peut imaginer comment les Tuuda, avec un butin de cent une têtes, ont dû fêter leurs prises, le soir des Seconds Événements de Musha, dans une ivresse orgiaque qui a duré de l’aube à la nuit tombée, le degré de cette débauche « fusionnelle » les a entraînés de la frénésie de la danse à la transe et à la copulation, nul risque qu’ait pu se manifester, au cours des siècles passés, une débauche comparable chez les Han de l’Île… j’ai écrit « entraînés de la frénésie de la danse à la copulation » parce que j’en ai les preuves, jamais les rituels orgiaques des populations primitives n’ont dévié de de déroulement, les archives le démontrent, il semble évident que la nature humaine évolue de telle manière, même les orgies de l’Occident civilisé ont hérité de ce déroulement ou l’ont imité, les chercheurs peuvent analyser ces phénomènes comme « une vaste libération vis-à-vis de la pression de la société primitive, ayant valeur de légitimation rituelle », pour moi je crois tout simplement que « les déviations sexuelles » et « l’inceste » sont des instincts primitifs qui trouvent une forme d’assouvissement adéquate dans des situations où « chacun oublie jusqu’à la notion de soi », même des témoins extérieurs ont pu être touchés par ces scènes de « fusion dans le non-humain », à la fin ce ne sont plus des cœurs humains qui battent, mais une pulsation prenant sa source dans la terre (…) »
Wuhe, Les Survivants (1999), traduit du chinois (Taïwan) par Esther Lin-Rosolato et Emmanuelle Péchenart, éditions Actes Sud, 2011, p. 147.
