C’est un petit livre à la couverture barrée de rouge, empli de l’ironie et l’autodérision caractéristique de l’œuvre de Guy Delisle. L’auteur de Chroniques de Jérusalem, Pyongyang, Shenzen ou Chroniques Birmanes signe avec Le Guide du mauvais père une BD drôle et tendre, aux textes travaillés qui balancent entre second degré et réalisme emprunté au quotidien.

Le Guide du mauvais père, c’est un vade-mecum à l’envers, un anti-guide empirique, une compilation de ce qu’il ne faudrait pas dire, ni faire, ni même oser penser face à nos chères têtes blondes qui tiennent la parole parentale pour leur évangile personnelle. Guy Delisle relate et illustre des perles tirées du quotidien, des moments choisis quand le père ne sait comment (et surtout pourquoi) avouer à son fils qu’il ne s’est pas réveillé deux nuits de suite pour jouer le rôle de la petite souris ; ou quand il démontre comment un abricotier pousserait dans le ventre de sa petite fille qui vient d’avaler un noyau, carnet de croquis à l’appui.

Dessiné sur planche puis numérisé pour être intégré dans son blog, Le Guide du mauvais père est un cocktail finement dessiné et pensé de situations drôles et bien senties qui illustrent toute la difficulté d’être (ou ne pas être) le père qu’on aurait souhaité. Guy Delisle a lu Françoise Dolto et Claude Halmos et il s’est beaucoup amusé à écrire ce livre à partir de son expérience personnelle de papa, qui n’est pas toujours au top.
Mais que l’on se rassure, Guy Delisle n’a pas vécu toutes les saynètes du guide, il a surtout puisé dans son imagination : je n’ai pas mis une tronçonneuse dans les mains de mon fils. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que l’auteur met ses enfants en scène et apparie le contexte (Israël, la Corée du Nord, la Birmanie, la chambre au moment du coucher…) et son sens de l’humour acéré, parfois cruel. Mais c’est uniquement pour en jouer et dans le but avoué de faire rire. Et à ce jeu-là, Le Guide du mauvais père est d’une efficacité redoutable.