Lalo Schifrin est le meilleur compositeur et arrangeur du monde. Et Quincy Jones aussi. Et puis, bon, on pourrait encore en citer quelques autres. Les deux ont chacun fait l’objet d’un récent coffret scandaleusement économique réalisé par le label français Écoutez le cinéma ! (l’industrie du téléchargement va finir par mourir de ce genre d’initiatives).
Mais ce n’est pas leur seul point commun. À la fin des années 1950, ils ont commencé comme musicien de jazz, le premier en caressant avec sa sensibilité latine les touches d’un piano, le second en soufflant dans une trompette forcément bop. Et puis, peu à peu, ils font leur entrée dans de grandes formations, les dirigent, composent pour elles, enregistrent des disques sous leur propre nom et deviennent l’incarnation d’un son immédiatement reconnaissable, profondément mélodique, intensément orchestré, gorgé de groove, volontiers plus pop pour l’un, plus soul pour l’autre, urbain et fiévreux dans tous les cas. Rapidement, le cinéma fait appel à eux pour capter l’air du temps et pour apporter aux images une puissance dramatique inédite. Des heures de musique envoutante sont ainsi enregistrées, au sein desquelles on croit saisir la vérité des années 1960 et 1970 – on tâte leur pouls à la faveur des pulsations de batterie tendue, des battements ronds de basse débridée, des éruptions de cuivres et des caresses de cordes aussi voluptueuses qu’inquiétantes. Cette musique est géniale, au point où, en l’écoutant, on en oublie les films – pour vivre à notre tour un film palpitant.
Pour ne rien gâcher : indispensables et intemporels, ces deux coffrets regorgent d’enregistrements jusque-là introuvables en CD. Si les anges étaient badass, voilà ce qu’ils écouteraient à coup sûr.