L’abécédaire du tout-Paris de Paul de Vallonges

C’est un livre qui se présente sous la forme d’un abécédaire passant en revue les acteurs de la vie parisienne, dans la lignée revendiquée du Petit Almanach des grands hommes d’Antoine de Rivarol (1788) ou des Noctambulismes de Jean de Tinan (publication posthume en 1921) : l’Abécédaire du tout-Paris de Paul de Vallonges se veut la version contemporaine de ces entreprises visant à croquer et chroniquer un petit monde, assez fermé, avec ses têtes d’affiche et ses figures plus underground, ses lieux, son idiome.

9782840495789L’auteur — dont le pseudonyme rappelle le nom d’un personnage de Jean de Tinan, le Raoul de Vallonges dont Penses-tu réussir ! narre les « diverses amours » — saisit un air du temps, l’atmosphère d’un certain Paris et du milieu de l’art et des lettres, version portative et légère des physiologies balzaciennes et autres Français peints par eux-mêmes (avec focale sur un petit groupe). Les illustrations sont dues à Audrey Bussi.

L’ensemble, mondain voire snob, est toujours piquant, parfois drôle, sans doute un peu vain, de A comme Kev Adams à Z comme Elsa Zyberstein, mais comme le ton est assumé et la méchanceté volontaire, ne boudons pas notre plaisir (tout lecteur aime quand c’est méchant) et partons à la découverte de ce livre en quelques lettres formant le mot abécédaire du titre :

Acomme cet extrait de la notice « Adams, Kev », jackpot du box office. « Après avoir rançonné les parents d’élèves de l’Hexagone, Kev Adams envisage de conquérir Hollywood et l’Amérique. Même Dorothée n’était pas si obscène ».

B comme Banlieue : « Juste avant la province ». Une province ainsi définie, à P, « Enfer du Parisien. Quelques rares exceptions, selon les saisons : Deauville, Trouville, Guéthary, Saint-Tropez, Cannes, Porto-Vecchio, Megève, etc. Des lieux « authentiques ». »

E comme les Écolos (de Paris), « agités » : « rien ne les calme autant que de pédaler » (on en profite pour noter l’absence de « bobo », dans cet abécédaire).

C comme Césars : « Partouze annuelle du cinéma français. Préliminaires interminables. Jouissance rare ».

E comme Virginie Efira, actrice qui « mériterait à elle seule que la France annexe la Belgique ».

D comme Catherine Deneuve : « Actrice aussi historique que le Général de Gaulle. Pour ses compatriotes, elle incarne une certaine idée de la France, et, pour les étrangers, une idée certaine de la France ». Une des dernières stars authentiques (les autres sont « rebaptisées « people » à mesure que la race s’éteint ».)

Acomme « Attachée de presse » (on notera le féminin presque idiomatique) : « Sœur Emmanuelle pour le dévouement, Zahia pour la séduction. Parvient, presque toujours, à ses fins ».

I comme Eva Ionesco, « petite-fille du dramaturge Eugène Ionesco. Fille de la photographe Irina Ionesco. Fétiche érotique de sa mère à l’âge tendre, muse de son mari romancier, Simon Liberati, à l’âge mûr. Cinéaste de ses déboires ».

Rcomme Rouquet, « Café sis à l’Angle du boulevard Saint-Germain et de la rue des Saints-Pères. Annexe des éditions Grasset. Refuge de ceux qui trouvent le Café de Flore ou les Deux Magots mal fréquenté ».

E comme Gad Elmaleh, « un humoriste qui rêve d’une banque n’est qu’un triste sire ».

Dommage qu’il n’y ait pas de G dans le mot abécédaire, on aurait pu citer notre préféré : G comme FOG, Franz-Oliver Giesbert, « journaliste et animateur de télévision. FOG écrit trop d’éditoriaux pour être bon écrivain et présente trop de magazines culturels pour avoir le temps de se cultiver ».

Paul de Vallonges, Abécédaire du tout-Paris, éd. Séguier, 2015, 160 p., 21 €