Psychiatrie et littérature : trois romancières à l’honneur

Geneviève Peigné, L'interlocutrice, Le Nouvel Attila

Les troubles mentaux et l’univers psychiatrique ont souvent nourri la littérature. On se souvient tous des personnages en proie à la folie des classiques russes, de la galerie des fous dans Les Mystères de Paris d’Eugène Sue, ou encore de La Dame en blanc de William Wilkie Collins et de la mère de Charles Juliet dans le bouleversant Lambeaux mais aussi des romans qui se passent dans des institutions psychiatriques tels Vol au-dessus d’un nid de coucou de Ken Kesey ou Shutter Island de Denis Lehane.
En cette rentrée, au moins trois écrivains se sont emparés de cet univers bien particulier et propice à la création. Trois écrivains, trois femmes, trois voix.

mary.inddEmily Barnett situe une partie de son premier roman Mary (Rivages) dans un « château », véritable institution psychiatrique pour enfants et nous plonge dans les méandres de l’esprit de son héroïne, de secrets en rebondissements, manipulant le lecteur et laissant plusieurs interprétations possibles à l’histoire. A la fois un roman d’ambiance où l’institution plus qu’un décor devient presque un personnage, mais aussi un roman sur le New-York étouffant d’après-guerre et sur la condition de la femme.

DorsanMary Dorsan, avec son (également premier) livre au titre magnifique, Le présent infini s’arrête (P.O.L), relate son expérience d’infirmière psychiatrique dans un appartement thérapeutique qui accueillent des adolescents aux pathologies souvent lourdes et dont personne ne veut. Entre roman et récit, poésie et parole brute s’entremêlent pour former un texte d’une puissance assez sidérante. Complexité des rapports humains, fragilité, exclusion, violences, difficultés et doutes pour les soignants, ce livre donne une visibilité à ces oubliés, ces « cachés » de notre société.

Tout aussi réussi et intriguant est le texte de Geneviève Peigné, L’Interlocutrice (Le Nouvel Attila). L’écrivain a retrouvé après la mort de sa mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer, le journal de sa maladie. Mais ce journal était disséminé dans les marges, interstices et même dialogues des romans de sa bibliothèque, plus précisément des romans policiers de la collection « Le Masque ». Véritable témoignage de la douleur et de la perte de la raison et certainement celle du langage à venir, ce livre est aussi l’espace du dernier dialogue d’une fille et de sa mère, comme une ultime tentative pour la romancière de sortir l’être cher de ce diagnostic de démence.

11953123_10204887023998361_3012926677078196181_nAlors même pas peur, quand on aime, on fonce : je réunirai Emily Barnett, Mary Dorsan et Geneviève Peigné autour d’une même table pour parler de leurs romans, échanger autour de ce thème et de ce qu’il nourrit dans l’acte de création et ce sera ce jeudi 22 octobre à la librairie Le Monte-en-l’air, 2 Rue de la Mare, 75020 Paris, à 19 heures

(toutes les infos ici)

Emily Barnett, Mary, Rivages, 2015, 192 p., 16 € 50 – Lire un extrait
Mary Dorsan, Le présent infini s’arrête, P.O.L., 2015, 24 € 90 – Lire un extrait
Geneviève Peigné, L’interlocutrice, Le Nouvel Attila, 2015, 16 €

A signaler et à découvrir, dans la même thématique :
Journal d’un caméléon de Didier Goupil, paru en cette rentrée également, aux éditions Le Serpent à plumes.
Depuis qu’elle est morte, elle va beaucoup mieux de Franz Bartelt dans la nouvelle collection « Ce que la vie signifie pour moi » des éditions du Sonneur
La collection « en démence » des éditions Cambourakis.
Et le livre de Marie Depussé, Dieu gît dans les détails. La Borde, un asile, éditions P.O.L.