L’année 2016 étant terminée, il est à présent possible d’en faire un bilan cinématographique sous la forme du « top » auquel s’adonnent bon nombre de rédactions. Si l’exercice est critiquable — particulièrement lorsqu’il s’applique aux domaines culturels —, parce qu’il trie arbitrairement et hiérarchise, la contrainte qu’il présente recouvre néanmoins une vertu.
Paul Verhoeven
Elle de Paul Verhoeven est un de ces petits miracles devant lesquels le cinéphile se sent humble, écrivait Jérémy Sibony il y a quelques mois, dans les colonnes de notre magazine. La force du film repose plus que tout sur le mythe que représente Isabelle Huppert, jugeait à son tour Joffrey Speno. Le Golden Globe qu’Isabelle Huppert vient de recevoir est, pour Diacritik, l’occasion de republier leurs deux critiques.
Probable transcription de l’engouement contemporain pour les chats, ces derniers semblent aussi prendre une importance grandissante dans les films. De celui qui filait systématiquement des mains de Oscar Isaac dans Inside Lewin Davis des frères Cohen, à la loufoque Pandora qui ne cessait de s’échapper elle aussi de celles d’Isabelle Huppert, dans L’Avenir de Mia Hansen-Løve, ils constituent un ressort scénaristique à valeur humoristique assurée. C’est avec un certain cynisme que Paul Verhoeven se réapproprie cette tendance en ouvrant son film Elle avec un plan sur le charmant animal de compagnie qui regarde, imperturbable, le viol de sa maîtresse Michèle (Isabelle Huppert) dans son salon.
Elle de Paul Verhoeven est un de ces petits miracles devant lesquels le cinéphile se sent humble. Non pas que le film soit un chef d’œuvre absolu, les coutures du cinéma de Verhoeven sont toujours aussi visibles. Mais à la sortie de la salle, on ne peut s’empêcher de penser que le film revient de loin, que Paul Verhoeven est très proche d’avoir réalisé un film irresponsable ou dégueulasse sur le viol. Miraculeusement donc, Verhoeven ne sombre jamais dans la psychologie de bazar misogyne, au contraire, débarrassé des contraintes des grosses machines hollywoodiennes, il réalise avec Elle son film le plus transgressif, le plus déroutant, son meilleur film.