Le ciel immobile qui cependant s’approche on le prend à la terre, on le regarde dans la flaque on n’y voit aucun visage on le sent avec la paume de la main il s’approche et dès que terrassé il devient pluie et sa pluie devient eau des rizières et devient boue c’est d’un ciel terrassé qu’on a besoin d’un ciel qu’on touche et qu’on peut toucher parce qu’il est à terre. Le ciel est la pluie est l’accident est le riz des rizières est la terre est la boue n’est pas le ciel n’est pas le visage sans mains qui replante le riz dans les rizières qui fait des liens d’inhumanité les liens d’humanité elle les traces sur un bout de papier froissé elle y écrit des noms des listes de noms elle sait que quand elle sortira elle fera des liste de verbes mais ici dans la prison elle cherche les reconfigurations de ce qu’il y a à dire dans les listes qui débutent les liens sans action sans objet elle sait qu’il y a des chinoises qui tressent des liens avec la paille du riz elle sait qu’elles chantent les sœurs des sœurs des bassins pluvieux des prisons les sœurs qui s’aiment une à une qui s’aiment toutes à toutes
Elle écrit nous elle se rappelle vaguement le creux de son épaule à lui et elle a lu aussi quelque part dans un manuel de philo grecque que nous (ou noûs) c’est la raison, l’intelligence, et selon certaines interprétations qu’elle déteste toujours Dieu. Elle retranche dieu il reste nous, la pensée commune la pensée simultanée
Situation 25
plus tard, la crosse du fusil, la balle et l’eau froide
Elle dialogue avec le papier, avec le froid, avec les barreaux, avec les rizières avec tous
Son non à eux est un oui à nous et inversement (logique cubique)
Elle est là
Quand elle entre, c’est avec son chien pour la maintenir en avant elle dit en soulevant du revers de la main ses cheveux roux ou rouges teints et déteints quelquefois la seule manière de rester debout c’est de se pendre et elle commente L’homme sans qualité de Musil en alternance avec Les Vagues de Virginia Woolf elle parle des fous elle parle d’un carton un jour elle croise un jeune homme il est désirable alors elle le désire enfin il porte un carton et elle dit qu’elle désire savoir ce qu’il conserve dans son carton c’est un désir impérieux de savoir sans ce carton elle ne l’aurait pas tant désiré laisse-t-elle entendre c’est vrai ou pas on ne saura jamais on en a parlé tard un soir au café alors elle l’invite chez lui il a l’air louche il est peut-être dangereux mais il faut savoir à tout prix ce qu’il a dans le carton c’est l’histoire entière du désir de savoir ce que les autres portent dans leur carton dans leur sac dans leur ventre elle décrit la ceinture sur laquelle est posé le bord du carton et le pull de mauvaise qualité mais qui est moulant elle dit appelez-moi Marie mon nom est tellement galvaudé elle dit sa compassion pour les fous pour les hôpitaux les couloirs blancs des hôpitaux elle ne dit pas qu’elle écrit sur les hôpitaux elle ne parle pas de la cabane en bois que là-bas elle habite quand il n’y a plus de cours à Paris 7 et pourtant elle écrit (citation) sa parole est là dans sa mâchoire qui se déboite sa chair qui se décompose elle n’a pas d’âge elle parle de Beckett elle dit l’inflation des niveaux de boue qui submergent ceux-là qui sont bons pour l’hôpital elle sait que l’histoire du carton on a compris qu’elle voulait se faire le coursier ou le bandit et elle hurle de rire parce qu’elle en parle selon le désir du carton elle rêve que dans ce carton il y a le butin d’un cambriolage parce qu’il a l’air voleur il a trente ans de moins qu’elle elle lui dit montrez-moi ce que vous avez dans le carton je désire le carton comment supporter de ne pas savoir ce qu’il y a dans ce carton désir aussi fort que celui de Virginia Woolf cherchant dans sa bonté quel personnage faire mourir pour que les autres puissent vivre Marie fait teinter ses breloques sur la table elle allume une clope parce que dire cigarette c’est assez nul elle fait cela d’un geste très masculin en écartant les jambes elle est en pantalon elle fait cela parce qu’elle sait sa beauté de femme défaite sa voix de voix défaite sa défaite de femme défaite les vagues se heurtent et meurent dans le soleil qui sombre au café à une heure du matin elle va partir en laissant le numéro d’un psychanalyste elle sait qu’elle est folle qu’elle joue à être folle que c’est la même chose qu’elle écrit que c’est la même chose que la mise en scène de la folie c’est l’écriture à la fois la vraie vie et rien de la vie et que c’est la même chose sur le carton il y a écrit « fragil » le reste est masqué par du chatterton on la reconnaît à sa démarche titubante dans les couloirs proche de l’effondrement et de la chute à chaque pas avec « Boudu » en laisse son chien c’est lui qui la sauve des eaux c’est pour ça qu’il s’appelle comme cela sans doute la laisse c’est ce qui la fait avancer le chien sa présence sa bêtise détachée de sens qui la sauve pour un moment encore du mouvement des vagues inéluctables qui se brisent (citation) il faudrait se souvenir mieux des tiges de riz figées sous l’eau par sa main ou les plantes d’eau comment elles s’appellent déjà de l’Ouse
Situation annexe
écrire moins écrire plus petit (tenir sur un grain de riz sur la vague)
Tu envisages quoi, quand tu sors de chez toi pour aller chercher le pain
Situation 27
pour bien voir le visage et faut en respirer l’odeur pour bien pénétrer dans un visage il faut voir comment il bave sur d’autres visage de lèvre à lèvre de dent à dent
Situation 28
faire en sorte d’être insituable
On y vient
Quand tu auras lu ça, la situation aura changé
(le
visage aussi)
Il n’est pas si certain que le signe ≠ diffère du signe =
C’est une première attestation du simultanéisme dans lequel les situations expérimentent leur différence
= les deux bandes noires laissées sur le sol par les pneus du freinage juste avant l’écrasement contre un pylône
≠ la roue qui s’est déboitée avant le choc final, ou le pneu de la moto qui suivait, la trace de l’animal écrasé
= est le signe que 2 fait 1 (Hegel par exemple)
≠ est le début du vrai pluriel c’est les raies de pluie sur la ligne d’horizon BONJOUR MON FRÈRE GUILLAUME
pneu ≠ pneu (même si pneu = pneu est vrai encore)
# ≠ # aussi bien que # plus ou moins = b, alors à partir de là, c’est pas le même air
Ce que je dis ≠ ce que je dis (pourtant, il n’y a pas de surcharge, c’est dégraissé de part et d’autre)
≠ ne dit pas < ou > il dit que ≠ diffère de ≠
ATTENTION TU N’AS PAS VU QUE LA SITUATION CHANGE
Bonjour de loin GUILLAUME & CHRISTOPHE bonjour de trop loin
Ce n’est pas le même air (on connait la chanson, jamais de bain dans la même eau jamais même noyé dans le même courant) : en premier lieu parce que c’est physiologique. Le larynx est du cartilage non fixé sur l’ossature du squelette, il est attaché avec des muscles élastiques il bouge il n’est pas stable alors un son émis est toujours mobile ça permet de jouer sur les hauteurs ça permet de faire des effets voulus ou non sur le vibrato le mot bouge tout le temps c’est physiologique il est toujours ≈
les signes noirs sur la page sont plus stables pour eux, mais pour eux ce n’est pas grand-chose
le signe = est une pureté à laquelle je n’arrive pas
le signe ≠ terrasse le signe = (ce qui ne veut pas dire qu’il lui est >)
= est un peu straight, et ≠ encore un peu, mais avec un petit pas de côté
≈ c’est déjà un peu plus queer
Le signifiant ≈ le signifié
Situation 29 : passe une inconnue dont le visage disparaît malgré ta volonté d’en fixer les traits elle est sortie acheter elle-même des fleurs pas pour elle, elle part travailler sous-payée pour faire le ménage dans un hôtel de luxe les fleurs ça n’est pas pour elle c’est une charge de plus elle devra mettre de l’eau dans le vase porter les fleurs et savoir que les fleurs ne sont pas pour elle si on pouvait on lui interdirait même d’en sentir le parfum
Un coup de carton jamais n’abolira le carton (alors carton est presque = carton) un coup sur le carton fait surgir ses six faces ou l’écrase (alors : carton ≈ carton) prenons un carton coupé dans du carton : 80 cm sur 60 cm ou comme on veut, c’est en fonction du slogan qu’on veut y mettre ce carton est plat est à deux faces
Prenons un carton à six faces comme un cube la réalité s’y reflète
Si on a un juste un bout de carton on fera sur une seule face
Alors on peut lire
(c’est un exemple) c’est fou combien de beaux cartons on peut
lire dans une manifestation
Le carton est comme le larynx contrairement à la maison il n’a pas
d’assise il branle il bouge il y a une promiscuité surprenante entre
le carton et le cartilage
Arm aber sexy
La différence de nature entre les deux cartons est que le second
ne porte pas de slogan sur chaque face : il faut l’y mettre