Quentin Pradalier : L’œil à l’ombre par Carole Berthonneau

© Quentin Pradalier

Il y a ça de beau. On cherche constamment l’auteur de cette photographie qui n’en est pas une.

Les objets.

L’auteur raconte que ce sont dans ses mains qu’il les trouve. Ils apparaissent avec la magie qu’on connaît des puces. L’artiste les construit aussi, toujours dans ces mêmes mains. Une mise en abîme d’objets où l’œil du photographe se cache.

Se cacher n’est pas être absent.

A l’époque de Jérôme Bosch, les oiseleurs utilisaient le hibou comme appât. Le rapace, perché près de branches dégoulinantes de colle, attirait d’autres oiseaux. Embastillés de gluau, leurs libertés s’achevaient.

Est-il là son œil ?

À côté de ce piège sirupeux où l’on se cloue sans trop saisir comment ?

À côté de cet objet d’objets, emprisonné par l’ancestral calotype ?

Ou à côté de ces poisons qu’il manipule avec la sagesse d’un initié ?

Ces venins qui nous tueraient tous ?

On ne sait toujours pas. Et l’on ne veut pas savoir, on ne veut pas mourir.

Regarder ce trépas noir fondant comme neige au soleil est bien assez suffoquant.

Se laisser toucher par le gris d’ennui est suffisamment affamant.

Et s’abandonner à notre propre capture dans ces boîtes trop pleines et trop chaudes est déjà si chatouillant.

L’œil à l’ombre, c’est l’oubli de celui-ci.

La disparition du photographe, c’est sa force.

L’œil est dans l’obscurité, il rôde.

Ce sont ses pièges, ses objets qui nous attrapent, pas sa dorure.

 

Quentin Pradalier
© Quentin Pradalier

Carole Berthonneau est étudiante en dernière année de psychologie clinique à l’Université Libre de Bruxelles. Elle est également passée par l’école Supérieure des Beaux-Arts de Rennes.