Martinique 1902. Volcanologie littéraire : Anne Terrier (La Malédiction de l’Indien. Mémoires d’une catastrophe)

Éruption du mont Pelée, 1902 (Wikicommons)

En septembre 2021, Anne Terrier a publié La Malédiction de l’Indien. Mémoires d’une catastrophe. Roman biographique (Gallimard). Le titre éveille notre curiosité et la quatrième de couverture nous transporte dans l’événement mémorable pour la Martinique et pour la volcanologie : la destruction de la ville de Saint-Pierre par l’éruption de la Montagne Pelée, le 8 mai 1902, catastrophe naturelle qui s’est étalée sur plusieurs mois ;  il y aura 120 ans cette année.

Anne Terrier n’est pas la première, et sans doute pas la dernière, à prendre appui sur cet événement pour sa fiction. Comme l’écrit Cyrille François qui s’est intéressé à trois romans antérieurs : « face à l’analyse et à l’inscription scientifique ou documentaire, la littérature donne sens à l’éruption et déclenche « l’éclairage » du volcan sur la nature et l’histoire antillaises ». Ainsi en 1949, Raphaël Tardon publiait La Caldeira, insistant sur l’effervescence électorale qui a étouffé l’inquiétude qu’aurait dû provoquer l’activité volcanique, antérieurement au 8 mai, car l’enjeu électoral était grand entre le Parti Blanc et le Parti Mulâtre. En 1992, dans Texaco de Patrick Chamoiseau (Prix Goncourt), le père de Marie-Sophie Laborieux, Esternome, s’est alors exilé à Fort-de-France car cette explosion a provoqué le départ de ceux qui ne furent pas anéantis mais ont vécu l’horreur de la destruction : « Bientôt, il n’y eut plus d’os, ni de chair ni de corps. La montagne couvrit de cendres nouvelles les mounes mortes impossibles à griller. Et le tout fondit en des pierres grises aux formes molles. Avec le temps, elles charbonnaient, sans pourrir, sans odeur ». Dans son roman, Chamoiseau en fait un épisode sans lui donner une place centrale. En 2015, Daniel Picouly, dans Le Cri muet de l’igname, insère aussi cette explosion dans le récit de la vie du grand-père du narrateur-auteur. Bien d’autres titres pourraient être cités. Arrêtons-nous sur deux œuvres particulièrement marquantes par leur réussite littéraire, éditées lors du Centenaire en 2002 : le roman de Raphaël Confiant, Nuée ardente, qui met en scène le réveil du volcan déchaînant les pulsions en une débauche qui fait oublier le danger. Il faut lire aussi la nouvelle poétique de Lyonel Trouillot dans L’Odyssée Atlantique (Actes Sud), Six nouvelles inspirées par le Belem réunies dans un coffret dont les couvertures sont illustrées par Laurent Corvaisier.

Raphaël Confiant propose une fresque passionnante de Saint-Pierre en quatre temps rendant bien compte de l’aveuglement face à la catastrophe annoncée : Temps de la doucine, Temps de l’intranquillité, Temps de l’apocalypse et Temps de l’inconsolation. Son roman s’appuie sur une large documentation, comme tous ses livres, et revendique les droits de l’imaginaire en le désignant sous par le terme de « Conte » dans la page conclusive, « Final du conte » où une coupure de presse informe du destin de Syparis, rescapé glorieux de Saint-Pierre : « Grâcié, il est engagé par le cirque Barnum pour une tournée en Amérique où on le présente comme le seul rescapé de la catastrophe, sous le slogan Le seul objet vivant qui survécut dans la cité silencieuse de la mort ! » On reconnaît là l’humour et la dérision que privilégie le romancier.

Une riche galerie de personnages porte le romanesque — « l’honorable Hughes Dupin de Maucourt dont les deux établissements de commerce occupent un large empan de la Grand-Rue », le jeune professeur de philosophie, Pierre-Marie Danglemont, « jeune mulâtre de douteuse extraction » et sa bande de noceurs, habitués des bouges de la rue Monte-au-Ciel, le mystérieux Lafrique-Guinée, hanté par le souvenir du temps de l’esclavage. Les personnages féminins ne sont pas en reste :  les femmes du bouge, Thérésine la câpresse, Hermancia la chabine-rouquine, ou Mathilde ; par ailleurs Marie-Egyptienne, blanchisseuse, amoureuse de Danglemont : « notre nuit de noces, nous la passerons là-haut, au beau mitan du cratère de la Pelée, au bord de la lave en fusion ! » ou Rose-Joséphine et surtout Edmée Lemonière, qui cultive le mystère et qu’aime Danglemont.

Confiant a le souci d’animer cette ville dont tout le monde vantait le charme : les soirées lyriques de la Comédie, les déjeuners de rivière, les duels à l’épée au Jardin Botanique et les joutes politiques. Les désastres n’inquiètent personne : « Mais Saint-Pierre ne s’émouvait pas longtemps pour si peu […] La ville entonnait son habituel hymne à la joie dès que la Montagne se découvrait et l’on préparait, en vue du prochain samedi, des déjeuners de rivière ou des excursions a lac des Palmistes, voire, pour les plus courageux, au paisible cratère de l’Etang sec ». Ce roman vaut vraiment le détour, avec cette manière inimitable d’insérer des citations de documents ou de différents textes dans la narration, lui conférant un rythme étourdissant et entraînant.

Dans le roman d’Anne Terrier, le premier chapitre est consacré à la commémoration de l’événement en 2002, avec le Belem en majesté : « Dans un silence absolu, le Belem se profile à l’horizon, glissant lentement sur l’eau parallèlement à la plage. Le vent est tout juste suffisant pour gonfler ses vingt-deux voiles réparties sur trois mâts. Le plus haut mesure trente-quatre mètres. La foule frissonne en voyant passer le seul bateau survivant de cette terrible journée devenu le symbole du triomphe de la vie. C’est la première fois que le trois-mâts rejoint le lieu de sa légende ». Anne Terrier rappelle alors le hasard chanceux qui a empêché le Belem d’accoster dans la rade de Saint Pierre et l’a obligé à mouiller au Robert : « L’apocalypse s’abat sur Saint Pierre. A l’endroit exact où le Belem aurait dû se trouver, le Tamaya et son équipage coulent par trente mètres de fond ». Ainsi le retour du Belem est le point d’orgue de la commémoration.  Le magnifique Trois-mâts nantais faisait la navette commerciale vers le Brésil et les Antilles depuis 1896. En février 2002, il réalisa une croisière de six mois, s’arrêtant dans différents ports où il avait fait escale dont, bien entendu, Saint-Pierre. Le voyage se fit avec six écrivains qui écrivirent chacun une nouvelle. Chacune d’elle rappelle à sa façon une page de l’épopée du Belem. Sur l’éruption, Le testament du mal de mer de Lyonel Trouillot est prenant. Il faut lire aussi, en rapport avec notre sujet, Sur le flanc gauche du Belem, d’Aminata Sow Fall et Le dernier chant de l’Ernestine d’Alain Guédé. Le testament du mal de mer de Lyonel Trouillot ne peut laisser indifférent. Une voix pose « au mal de mer » trente deux questions. L’ensemble est riche de poésie et organisé comme une scène théâtrale. On ne peut entièrement le citer mais, simplement, en donner une idée :

« Raconte-moi le volcan.
– On ne raconte pas les volcans,
leur histoire est trop souterraine.
La terre la garde comme un secret,
puis elle le crache d’un seul jet,
et nul ne voit jamais que la surface
du récit, son fragment le plus terrifiant

Quelle fut l’image la plus forte ?
– Le ciel courait dans tous les sens.
On aurait dit que le vent perdait
le sens du vent.
Le port, es arbres, les toitures,
les objets et les éléments,
tout ce que l’on prend d’ordinaire
pour des données très stables,
se liquéfiaient, fragiles.
Sur le flanc droit de l’île,
des hommes et des bateaux mouraient.
Le feu descendait la montagne
et sa lumière marchait dans l’eau.

[…]

Tu as vu tant de ciels, tant de pays,
tout s’embrouille dans ta mémoire…
– Mémoire est un mot creux,
et l’on ne se souvient des choses
qu’à l’instant où l’on se souvient.
Je me souviens de ce marin que
la mer emporta le temps d’un regard
et redéposa sur le pont.
Un coup de lame, il était parti.
Un coup de lame.
Je me souviens de lui en ce moment
où je te parle de lui. Et bientôt,
je l’aurai oublié jusqu’à ce qu’une
image, un vent, un désir le ramènent.
Les souvenirs vont et viennent,
se succèdent sans se remplacer.
Je ne connais rien d’interchangeable.

[…]

On a déjà dit qu’il faut aimer
Les différences, tu n’ajoutes rien
Aux vérités les plus banales.
– Il y a deux façons de construire
sa légende.
Les routiers courent après les lignes
d’horizon, ils créent le mythe
du passage.
Les autres ont la fierté d’un parcours
vertical et regardent venir, campés
sur leurs racines.

[…]

Dis-moi quel est ton nom
– Si j’étais un bateau, je serais
Le Belem
Et si j’étais une île, je porterais un nom d’île.
Et si j’étais un homme, je serais
ton voisin.
Mais je suis tout cela sans en faire
la somme.
Une voix.
Presque rien. »

Avec Anne Terrier, c’est une histoire de famille qui nous est contée : cette fois l’éruption est l’événement explicatif des méandres de l’Histoire de l’île et de l’histoire de la famille. L’origine, c’est le sauvetage par le Dr. Dancenis – qui lui-même a fait partie des victimes –, de sa fille Passion, grand-mère de la romancière. L’ouverture du roman que nous venons de rappeler, installe le lecteur dans le souvenir et la mémoire, dans un hommage aux survivants. Le chapitre suivant rappelle les semaines qui ont précédé la Catastrophe avec ses signes avant-coureurs et les aveuglements des décideurs. Ce n’est qu’après ces deux premiers chapitres que s’enclenche ce qui est la colonne vertébrale de ce récit : des coïncidences de dates entre l’éruption et la vie de la famille de la narratrice : « Nous, les descendants du docteur Dancenis, entretenons avec la Catastrophe un rapport mouvant, changeant, insaisissable : plusieurs membres de la famille possèdent un morceau du puzzle, mais ces différents morceaux peinent à s’emboîter les uns dans les autres ». Face à la pulvérisation de la vie qu’a provoquée l’explosion et ses prolongements, l’écrivaine se propose de tenter de rassembler traces et bribes pour réparer la mémoire disloquée. Ainsi dans un mouvement très actuel, Anne Terrier juxtapose mémoire collective et histoire familiale et personnelle, ce qu’elle nomme « métissage littéraire », révélateur de l’histoire des Antilles « puisque c’est par le métissage que s’est fait le peuplement de ces îles ».

Ce chapitre qui éclaire le projet d’ensemble annonce bien ce qui est déjà à l’œuvre depuis la première page : la juxtaposition plus que la conjonction entre l’intime et le collectif en citant des entretiens anciens et récents, recueillis ou lus, des témoignages, des articles et des documents d’archive. Tel qu’il se présente, dans la succession de ses chapitres, ce roman biographique est moins un roman au sens habituel du terme qu’une enquête et un dossier sur la Catastrophe. Le chapitre 4 reprend le récit en mai 1902 en s’appuyant sur toutes les précisions que donnent les archives. Le chapitre 5 s’attarde sur les difficultés rencontrées pour enquêter. Il est suivi, au chapitre 6 par un ensemble de télégramme des acteurs, les 8, 9, 10 mai 1902. Il est temps alors, au chapitre 7, de revenir à l’histoire de la narratrice et au récit familial : « les grondements souterrains du passé continuent leur travail de sape. Ils ternissent l’atmosphère de l’île comme la fumée du volcan a noirci le ciel et assombri l’avenir de ses habitants ainsi que celui de leurs descendants ». On a alors le récit bref du sauvetage de la grand-mère, alors petite fille. L’arrière-grand-père, lui, a « été abandonné sur le bas-côté de l’existence – puisque les autorités avaient refusé d’évacuer la ville ». Le chapitre 8 rappelle la couverture médiatique de l’époque et le chapitre 9 fait état de la découverte de la base de données sur les bateaux – on comprend ainsi la place inaugurale du Belem : « ainsi, la magnifique baie aux eaux turquoise […] est en réalité un cimetière. Au moins quarante bateaux y ont péri par le feu du volcan ». Le chapitre 10 est une invention fictive du Journal de bord du capitaine d’un bateau miraculé, L’Albertine. Le témoignage ne pouvait être que celui d’un rescapé ; ne l’ayant pas, Anne Terrier l’invente sur la base de sa documentation dont il est question dans le chapitre suivant. Elle découvre enfin des fiches sur des membres de sa famille et dessine le portrait de sa grand-mère : « Des yeux immenses et noirs qui fixent l’objectif avec un mélange d’effroi et de détermination, comme si elle était prête à braver les obstacles malgré la peur ».

Le chapitre 12 commence par la citation de l’article qu’écrivit Rosa Luxemburg, le 15 mai où elle exprime sa colère : « Mont Pelé, géant au grand cœur, tu peux en rire ; tu peux les mépriser, ces fauves pleurnichards, ces bêtes en habits de Samaritains. Mais un jour viendra où un autre volcan fera entendre sa voix de tonnerre, un volcan qui grondera et bouillonnera et, que vous le vouliez ou non, balayera tout ce monde dégoulinant de sang de la surface de la terre. Et c’est seulement sur ses ruines que les nations se réuniront en une véritable humanité qui n’aura plus qu’un seul ennemi mortel : la nature aveugle ». La militante allemande dénonce ce qui se passe après toute catastrophe naturelle : une prise en charge défectueuse par les autorités, les déplacements, l’entassement, l’hygiène déplorable, des pillages et l’impossibilité de récupérer ce qui était récupérable. Mais, petit miracle, la narratrice recompose le sauvetage du coffret de bijoux de sa mère par Passion.

Le chapitre 14 est consacré aux répliques du 8 mai qui plongent les survivants dans la terreur. Anne Terrier fait le parallèle avec le temps de l’esclavage où leurs ancêtres vivaient dans la peur constante. Elle montre les autorités obsédées par la reprise du travail et du vote pour les élections législatives, en obligeant les habitants à rentrer chez eux sans écouter les avertissements du vulcanologue, Alfred Lacroix. Le chapitre 15 revient au récit familial : le récit sur la grand-mère par l’oncle Victorin  et les tantes. Il est difficile de se fier aux mémoires contradictoires. Néanmoins, toujours attentive à reconstituer le puzzle, Anne Terrier replace tout ce qu’on lui dit dans une chronologie. Après les mémoires familiales, les découvertes scientifiques n’empêchent pas, puisqu’on ne les écoute pas, les 2000 morts au Morne Rouge, de l’éruption du 30 août. Elle a recueilli assez d’éléments pour dessiner le portrait professionnel de l’arrière-grand-père dans le chapitre 17. Dans le chapitre 18, elle tente de faire le bilan des responsabilités et des polémiques, bien consciente que « l’intensité de l’émotion supplantait l’objectivité des informations » et de situer Passion dans ce magma. Le chapitre 19 est éclairant sur les comportements de la grand-mère et de ses enfants dans l’affaire familiale. Passion a été spoliée de ses terres et a quitté la Martinique. Il est temps de sonder le mythe des origines entretenu par la famille autour des différentes composantes de la société martiniquaise dans le chapitre 20. C’est une histoire métisse qui est à reconstituer et qui la conduit à cette conclusion pour sa sœur et elle : « Nous étions désormais plus blanches que noires. Un changement de perspective qui aurait pu, si nous n’avions pas déjà atteint l’âge où l’on sait que le sentiment de négritude ne dépend pas de la couleur de la peau, infirmer tout ce en quoi nous croyions depuis l’adolescence : notre appartenance à la communauté noire ».

Les Antillais, à la recherche de leurs origines, ont tous une vision « embrouillée » car, « le métissage n’en était pas pour autant un fait accepté, et le rejet de l’autre – qu’il soit blanc ou noir, du moment qu’il est différent – a persisté malgré la décolonisation, malgré la départementalisation, malgré le fait qu’Aimé Césaire avait revendiqué avec fierté la négritude du peuple antillais et Edouard Glissant sa créolisation. La société coloniale post-esclavagiste était fondée sur la hiérarchie des couleurs de peau, exactement comme au temps de l’esclavage ».

Passion a brodé sur l’histoire de ses origines qu’elle n’acceptait pas et a ainsi fabriqué un piège dans lequel toute la famille a sauté à pieds joints. Sa grand-mère lui apparaît alors « pétrie des préjugés de race et de classe, plus soucieuse de son image que de la vérité, et surtout manipulatrice ». Après avoir rectifié les mensonges familiaux, la narratrice entreprend, dans le chapitre 21 de rectifier les fausses informations du reportage de l’époque de Jean Hess qui dénonçait l’administration coloniale : ce qu’elle dit être faux, c’est l’ordre de non-évacuation de la population. On comprend mal la violence du propos dans la mesure où plusieurs passages ont mis antérieurement en question cette administration (en particulier à la p. 62). Le chapitre 22 va complexifier le portrait de Passion aux visages contradictoires et le lien est fait avec ce qu’elle a subi, le 8 mai 1902. Au chapitre 23, le roman biographique ne se termine pas sur la famille mais sur une mise en perspective historique et surtout légendaire qui renvoie au titre de l’œuvre. C’est la légende, maintes fois racontée, des chefs caraïbes entraînant les leurs dans un suicide collectif « sous les yeux ébahis des Français » ; l’un d’eux aurait prédit : « La Montagne du feu nous vengera » et c’est ce qui est arrivé.

Anne Terrier s’inscrit donc dans la suite d’historiens et d’écrivains qui, depuis Oruno Lara et son Histoire de la Guadeloupe, en 1921, font des catastrophes naturelles des actrices de l’histoire et pas de simples éléments géo-climatiques. Un des personnages de Daniel Maximin affirme : « La Soufrière n’est pas un simple décor […] elle est notre géographie » et, peut-on ajouter notre histoire ; et remplacer la Soufrière, volcan de la Guadeloupe, par la Pelée. En fin de parcours, Anne Terrier arrive-t-elle à convaincre de l’intrication de l’intime, du géographique et du collectif ? Ce n’est pas sûr mais le dossier qu’elle donne à lire est très intéressant et vient enrichir la bibliothèque de la Catastrophe. Ce qu’elle réussit sûrement, par contre, c’est à faire réfléchir sur le métissage antillais avec ses acceptations et ses rejets. Il est présent aussi bien en 1902 qu’aujourd’hui. Pour finir ce panorama de lectures, on peut signaler le bel ouvrage d’Ina Césaire sur « l’échange de paroles » entre Cyrilia et Lafcadio Hearn. Celui-ci a résidé à Saint-Pierre en 1888 et c’est la ville, quatorze années avant sa disparition, que la romancière restitue, reconstituant le parcours et le regard de ce voyageur différent des autres, ce « questionneur étrange », comme l’interpelle Aimé Césaire dans le poème qu’il lui a dédié en 1960, auquel il tend sa « « cruche comparse » ; celui même qu’à son tour Daniel Maximin nomme « Frère Volcan » car il a plongé très tôt dans les « éruptions d’être » de sa poésie. Décidément le volcan et ses mystères travaillent fortement l’écriture antillaise.

Anne TERRIER, La Malédiction de l’Indien – Mémoires d’une catastrophe – Roman biograhique, Gallimard, « Continents noirs », septembre 2021, 202 p., 19 €