Je n’y allais pas pour faire un reportage
Encore moins pour faire la révolution
Non
L’usine c’est pour les sous
Un boulot alimentaire
Comme on dit
Joseph Ponthus, À la ligne (2019)

 

Le récit de Claire Baglin, En salle, qui vient de paraître aux éditions de Minuit, est une succession de deux côtés : l’enfance et l’âge adulte, l’usine et le fast-food, au sein de l’empire des frites la salle et le drive, et, quel que soit l’espace, un écart, un pas de côté qui refuse à l’histoire tout manichéisme ou sentiment sans partage. Il est rare d’entendre une voix aussi originale et aussi posée dès un premier roman. Celle de Claire Baglin s’impose, comme héritée du récit social mais brûlante d’une singularité farouche et quasi insaisissable.

Pour une révélation, c’est une révélation : En salle, premier roman de Claire Baglin aux éditions de Minuit, s’impose comme l’une des belles découvertes de cette rentrée. Dans une langue sèche et mesurée, le récit croise le double fil de souvenirs d’enfance puis d’adolescence d’une jeune femme qui, bientôt, travaillera dans un fast food. Récit sur le travail, récit travaillé par la valeur du travail, En salle offre, dans le sillage des récits de Leslie Kaplan, Robert Linhart et Thierry Metz, une saisie de l’aliénation et de l’exploitation dans l’usine à burgers. Pour la dénoncer mais peut-être par-dessus tout pour en garder trace, nous confie la jeune romancière dans un grand entretien que Diacritik n’a pas manqué de susciter pour saluer la parution de ce roman remarquable.