« Tiens, une autre cigarette. Il s’en alluma une. Regarda autour de lui. Personne aux fenêtres de l’hôtel. Personne à celles des maisons voisines. Personne dans la gare autoroutière. Et pour ce qui était des flics, il ne devait même pas y avoir de patrouille. Parfait. Il tire lentement le fil de suture de sa poche. Attend d’avoir fini sa cigarette. Puis en un clin d’œil passe le fil autour du cou de l’enfant. Elle se débat. Il l’immobilise avec les jambes. À présent, il sait parfaitement comment s’y prendre. Il sait parfaitement doser ses efforts. Elle écrase sa clope sur son visage. La douleur est insoutenable, mais la cigarette ne tarde pas à tomber. La braise attise sa haine. Il tire de toutes ses forces. La petite se vide de ses gaz intestinaux. Le regard désespéré. Les mains qui essayent d’écarter le fil. Un doigt qui parvient à passer en dessous. Sérgio serre une dernière fois, et la phalange tombe par terre, sectionnée. Tout s’est passé très vite. À bout de souffle. Une érection encore complète. Il n’a pas joui. La brûlure à la tempe a interféré avec son mode opératoire. Il récupère son fil de suture. Ramasse deux mégots de cigarette. Pousse le corps sous le banc. Regarde à droite, à gauche. Puis s’en va sans presser le pas, en s’efforçant de reprendre son souffle. Monte dans sa voiture, descend l’avenue du Gouverneur-José-Malcher, vitres baissées, le vent s’engouffre puissamment, et il pousse un cri de joie qui libère son corps de toute tension. Retour à l’hôpital. Tous les patients stables, sauf un, hémorragie digestive, sous moniteur. Fin de service. Retour au bercail. »
Edyr Augusto, Casino Amazonie (2020), traduit du portugais (Brésil) par Diniz Galhos, Asphalte Éditions, mars 2021, p. 83.
