Le ton du temps

Diane Von Furstenberg

Le temps a passé et tu t’es retournée pour voir ce qu’il en était. Tu m’as dit : Viens voir, regarde, l’érable pousse et la vigne bourgeonne… Le temps a passé et nous sommes en avril… Mai. Le printemps que l’on espérait est arrivé, du moins dans le calendrier, les jours étirent leur bras du matin au soir, la bise laisse place à la brise, parfois, mais le soleil est encore frais. Alors oui, le temps a passé et sur nos corps, au taquet, s’apprêtent d’importantes collections d’impressions : des feuilles des fleurs des bois, de la verdure pour le futur.

Tu regardes les défilés de mars en pensant que ce sera un nouvel automne, un nouvel hiver, tu me dis : déjà !  Parfois il arrive que celui-ci ne nous a pas encore vraiment lâchés.

NEW-YORK 

DIANE VON FURSTENBERG habille d’une nostalgie toute 1970 ces jeunes femmes qui auront sans doute froid aux épaules, robes décolletés aux imprimés cravate sur mousseline et petits gilets jacquard, sans manche, sans oublier l’icône draped dress qui laisse entrevoir gorge et haut de cuisse.

Diane Von Furstenberg
Diane Von Furstenberg

MICHAEL KORS propose une collection uptown, chic mais pas ostentatoire, en mode « pas trop » car nous, on travaille dans la mode et on sait … Oui on sait par exemple, qu’en plein hiver, nos jambes sont toujours nues et nos pieds chaussés de sandales parce que le chauffeur attend au corner et que notre sac est juste ce qu’il faut (le cabas qui porte notre vie est, lui, avec le chauffeur).

Michael Kors
Michael Kors

LES SŒURS OLSEN (Mary-Kate et Ashley) offrent la silhouette épurée du grand chic américain. Des manteaux masculins/féminins, des mailles coulantes, des couleurs dunes ondulées telle la moire au soleil couchant. Kirsten Owen, Jamie Bochert, Gunniver van Seenus, Iris Strubegger, une cabine de femmes plus que de mannequins ne peut que nous réjouir. Le look est monochrome et la coupe parfaite sans détail laisse place à la matière 100% super luxe aux yeux des connaisseurs. Tu pourrais me dire que c’est ennuyeux, mais non ! S’approcher d’une certaine forme de perfection éveille au contraire les sens, et cela tient à très peu.

Sœurs Olsen
Sœurs Olsen

MILAN (quelques pics et déclics)


BOTTEGA VENETA 
: Thomas Maier donne une réponse au non-look avec ces premiers passages : manteau « étui » allure tailleur, col roulé rien à dire, pantalon large et petite écharpe au cou, sauf que ça c’est aussi très bien lorsque c’est maîtrisé. Plus loin quelques très jolis mélanges jacquard + carreaux tartan + tweed.

Bottega Veneta
Bottega Veneta

GUCCI : Alessandro Michele s’amuse à confectionner des looks déglingués en nous promenant entre le London des Seventies et la Renaissance. Des silhouettes manches gigot à l’appui, un peu Carnaby Street, un peu Biba-manga version nippone, un peu China girl… pas toujours très évidentes.

Gucci
Gucci
Gucci
Gucci

MARNI : Consuelo Castiglioni joue à l’arlequin et découpe des silhouettes color bloc dans une gamme de couleurs très personnelle à effet de manches ballon.

Marni
Marni

PRADA : Miuccia enserre les tailles de ceintures corsetées, peint nos jambes de carreaux « Burlington », le tout avec des jupes en brocard fleuris-tapisserie. L’effet est compliqué mais quelques très jolies robes peintes sur panne de velours. On voudrait parfois moins d’efforts visuels…

Prada
Prada

ET NOUS VOILA REVENUES A PARIS


BALENCIAGA
 : Demna Gvasalia s’est plongé dans les archives de Cristobal. Il en ressort une collection travaillée au niveau de la coupe, jouant des thèmes chers du maître : déplacer les volumes de corps, déportés, gonflés, redistribués. Tailleurs et robes strictes à carreaux très urbains contrastent avec les parkas à l’encolure ouverte et basculée.

Balenciaga
Balenciaga

Sais-tu, parfois en regardant certaines collections, il faut se souvenir que c’est l’hiver, n’est-ce pas ? Le futur dans le présent, j’en frissonne.

CÉLINE : pieds nus dans les sandales, on porte allègrement un duffle coat à sangles, des robes-débardeur à la jupe pan plié, des tuniques fines sur des pantalons fluides couleur vanille, du beige, du noir et… des bras nus.

Céline
Céline

CHANEL, une collection fleuve presque une rétrospective de toutes les collections de KARL LAGERFELD, le grand Palais, très grand, first row only, installe les plus grands salons de Mademoiselle. Les filles chapeautées du canotier revisité, défilent au pas saccadés — beaucoup de chemin à faire — pour toutes ces allées. Du jean, du tweed, de la mousseline, quelques matières indéfinissables et des perles, des perles, des perles, des perles.

Chanel
Chanel

CHLOÉ : Clare Waight Keller souffle des robes graciles de mousselines à étages volantés et contraste cette douceur avec des combinaisons de motardes petit blouson ceinturé à l’allure voyou. Palette de couleur : ailes de canard, pierres des marais salants couvertes de lichens, genets, et ciels changeants.

Chloé
Chloé

CHRISTIAN DIOR. Après le départ de Raf Simons, il faut entendre dire — mais la mode est cruelle, nous on sait — que finalement avec ou sans, c’est pareil. C’est irritant de bafouer le travail de création d’un revers de mots. Les filles défilent dans des robes compliquées à effet pour effet. Quelques jolis passages, jupe + veste avec un clin d’œil au « Tailleur Bar » de M. Dior.

Christian Dior, « Tailleur Bar », 1947
Christian Dior, « Tailleur Bar », 1947
Christian Dior, 2016
Christian Dior, 2016
Christian Dior, 2016
Christian Dior, 2016

HERMES : Troisième collection de Nadège Vanhee-Cybulski, son savoir faire, la maitrise des coupes et l’épure des silhouettes ne sont plus à prouver. On souhaiterait pourtant une petite prise à la taille moins dure que la ceinture cuir, une échancrure à l’encolure moins nonne… Ici tout est beau mais on cherche peut-être un peu de sensualité.

Hermès
Hermès
Hermès
Hermès

LANVIN. Dans le jeu des chaises musicales Albert Elbaz a été éjecté. Dommage pour la maison Lanvin, il avait apporté une modernité sûre à cette endormie, la belle bleue. Silhouettes désolantes pour la mode et la maison.

Lanvin
Lanvin

SAINT LAURENT. Ici Slimane tire sa révérence. Des bruits courent… vers la rue Cambon… Hush Hush.

VALENTINO : Maria Grazia Chiuri et Pierpaolo Piccioli, créateurs à quatre mains. Leur partition est élégante, mesurée, cadencée de beaux contrastes : le noir intense du jour et les pâleurs du soir sur mousselines imprimées.

Valentino
Valentino

Tu as compris, tu peux te déshabiller.