En cette année de présidentielle, impossible de ne pas évoquer l’Éducation nationale afin de réfléchir à une école de demain. Après cinq années de blanquérisme qui ont considérablement affaibli toute démocratie scolaire et verticalisé pour ne pas dire féodalisé les acteurs de l’école, il est temps de rouvrir l’école à la démocratie. C’est le sens du remarquable et indispensable essai de Christian Laval et Francis Vergne, Éducation démocratique : la révolution scolaire à venir qui vient de paraître à La Découverte. Les deux auteurs indiquent sans détour et avec force combien le système éducatif doit désormais jouer un rôle écologique et social éminent : rendre le monde vivable et préserver la planète exigent une refonte de l’école. C’est le défi de chacun. À l’heure où certains enseignants se droitisent et sont tentés par le zemmourisme, il était plus que nécessaire pour Diacritik d’aller à la rencontre de Christian Laval et Francis Vergne le temps d’un grand entretien autour de leurs décisives propositions pour une véritable révolution scolaire.
pédagogie
Le 11 mai n’aura sans doute pas lieu. Chacun s’accorde désormais à le reconnaître. Après avoir fait miroiter la réouverture des écoles le 11 mai 2020, tous se rendent compte de l’impossibilité matérielle de ce scénario catastrophe dont même aucun producteur hollywoodien ne voudrait. A l’absence d’avis sanitaire non plus que scientifique fondé pour appuyer l’injonction présidentielle de réouverture, les sénateurs qui ont auditionné le ministre blanquer ont ajouté un nouvel et important grief : l’absence totale de projet pédagogique.
Je parle aux murs ? Tout enseignant l’aura pensé, au moins une fois. Je regarde mes élèves, je les écoute parler, je ne comprends rien. Sauf ceci : une distance immense, des kilomètres, des siècles. Plus : la certitude qu’aucun geste de ma part, ni de leur part, ne pourra jamais la réduire cette distance. De quoi s’agit-il ? Ça veut dire quoi que je parle aux murs ? Trouble de l’attention ? Distance générationnelle ? Culturelle ? Sociale ? Que puis-je faire ? Peut-être, au fond, rien.
L’enseignement est un événement qui laisse un signe. L’étymologie nous l’apprend, faisant dériver ce mot du latin insignare : « imprimer un signe, une enseigne, une marque ». L’enseignement est l’expérience de laisser un signe. Qu’en est-il alors de ce signe ?
« Un cours c’est quelque chose qui se prépare énormément. Si vous voulez cinq minutes, dix minutes d’inspiration, il faut préparer beaucoup, beaucoup, beaucoup », affirme Deleuze dans l’Abécédaire. La préparation des cours chez Deleuze est souvent rapprochée d’une série de pratiques artistiques : « Un cours ça se répète. C’est comme au théâtre… c’est comme dans les chansonnettes, y a des répétitions ».