1. Malgré le désir d’agencer quelques nouvelles constellations se défiant de tout regroupement par genre, le hasard des publications fait que, de temps à autre, la pile jamais épuisée des lectures en cours rétablisse d’elle-même une forme d’ordonnancement privilégiant certains domaines comme la poésie ou la bande dessinée. C’est ce qui vient de se passer avec ces deux épisodes de Choses lues, choses vues publiés simultanément aujourd’hui, concernant pour le premier six livres de littérature, dont cinq touchant de plus ou moins près à ce qu’on entend par “poésie”, et pour le second (par l’effet d’une symétrie imprévue) six de nouveau, dont cinq proposés au rayon bande dessinée, auxquels s’est agrégé un roman fraîchement imprimé qui a exigé, tel un corps vivant, doué de parole, d’être lu sans plus attendre.

Avant de commencer la lecture des deux volumineux volumes rassemblant les cent-vingt nouvelles de Philip K. Dick, je dois préciser que je ne suis pas particulièrement amateur de science-fiction, n’ayant commencé à en lire que tardivement (en 1985, au moment où Antoine Volodine commençait à publier ses premiers livres dans la collection “Présences du futur”), et m’étant limité à quelques auteurs, Dick et Jim Ballard essentiellement, auxquels il faut ajouter, mais plus épisodiquement, deux-trois singuliers comme Robert Sheckley.

Après Simenon en Pléiade, bientôt rejoint par Tolkien, Philip K. Dick s’invite en Quarto. Les malfaiteurs de la littérature seraient-ils en passe d’être des individus de bonne fréquentation ? Les sous-genres romanesques seraient-ils bientôt légitimes ? N’aurait-on plus à rougir d’avoir dans sa poche, son sac, sa bibliothèque, la couverture bariolée d’un vieux bouquin de science-fiction ou de fantasy ? La question se pose encore dans la mesure où l’idée qu’on se fait d’une littérature l’occulte et parfois même la remplace. Le genre catégorise une œuvre et l’enferme ; mais on peut toujours s’évader, même des plus sûres prisons.