Paru tout récemment aux éditions Ardemment, Affreville est le récit (ni fiction ni essai historique) jusqu’alors inouï du râle de la défaite qui a résonné sur la génération des familles des militaires français en poste en Algérie pendant la guerre d’indépendance. Ce texte dense, rythmé de séquences et tableaux montés entre eux comme les plans d’un film, dépasse largement le cadre habituellement dévolu au genre du « témoignage » et n’est surtout pas, il faut le dire tout de suite, un énième livre sur la guerre d’Algérie.

Qui connaît aujourd’hui Louise Colet, autrice du XIXe siècle, dont l’œuvre très éclectique a été couronnée de succès éditoriaux ? Juliette Adam, sa contemporaine, dont le traité politique Idées anti-proudhoniennes sur la femme, l’amour et le mariage de 1858 a osé démonter point par point la rhétorique misogyne de l’éminent socialiste Proudhon ? Qui connaît encore Alexandrine de Tencin, la mère de Jean d’Alembert, aussi libertaire que libertine, qui a tenu un célèbre salon au XVIIIe siècle et a produit quatre romans à la carrière européenne, republiés avec un égal succès jusqu’à la fin du XIXe siècle ? Comme tant d’autres autrices et artistes, elles ont été  »invisibilisées » par le processus d’effacement des femmes dans l’Histoire, que le dénigrement et les jugements misogynes ont favorisé à dessein.