November 23, 2014 (Fifty-Three Days, journaux américains, 36)

© Franck Gérard. Avec le soutien de l'Institut Français et de la ville de Nantes

LOS ANGELES /Tenth day

Comme ailleurs, malgré le fait que les supermarchés soient tous ouverts, le dimanche est plus calme. Enfin, cela dépend où. Pas sur Hollywood Boulevard, par exemple. Où c’est comme un dimanche au Louvre ou à la Tour Eiffel… Cette fois-ci je pars pour chercher la voiture ; enfin ! Et maintenant, je n’ai qu’une envie, c’est rouler ; Las Vegas, la « Death Valley »… Du classique ; du road-trip ; avaler les bandes blanches en conduite « automatique ». S’arrêter ici ou là pour une image et, surtout, manger du désert. Maintenant que j’y ai goûté, difficile de résister ! Le désert est une drogue que je vous conseille !

Mais pour le moment, je suis sur Figueroa ; il est déjà 11h00 du mat ; j’ai traîné ce matin. Dans un parc, les perroquets verts font la fête dans un arbre. Je photographie un homme sur son escabeau, c’est Rodolpho, peintre de muraux, qui m’entraîne vers sa voiture pour me montrer son « Book » ! Tout y passe, les bars avec des filles nues, des muraux à la gloire de la vierge Marie, des publicités… Juste avant le train, un écureuil me nargue sur son poteau ; nous jouons ensemble à cache-cache, le temps d’attendre le train. On s’observe, guettant les réactions de l’un et l’autre. Comme deux animaux. La lumière du soleil s’arrête sur une fleur ; je la photographie, tout est à photographier je pense. Je sors à Union Station ; je traverse la gare, c’est toujours aussi beau ; décidé : marcher jusqu’au prochain arrêt. On bénéficie de deux heures de correspondance lorsque l’on a validé son « Tap ». Mais là, c’est le vide intersidéral ; je passe devant l’immense « City-Hall ». Les rues ! Seul ! A nouveau le métro. Avec ses écrans : « See something, say something ! ». Tout est dit ! Je descends sur Western/Hollywood pour éviter « Freaks-Land ! ». Je suis loin, loin dans tous les sens. Je suis déjà demain ; je suis déjà dans le désert ; alors que je marche sur Hollywood Boulevard, et ça c’est bien autre chose.

Je pourrais dresser une liste de ce que je vois : L’homme qui s’amuse à slalomer entre les voitures en criant. Le type en fauteuil roulant déguisé en loup, que je vois de loin ; n’y croyant pas, une fois de plus ; je le shoote ; il m’insulte car pour lui je suis américain. Vive la casquette. Je ne résiste plus au « grotesque » ! Ou l’autre, en chemise Hawaïenne, qui gueule, de toutes ses forces : « Hi L.A. ! My pussy is hot ! ». Les cigarettes en vente dans les pharmacies. Une femme d’au moins 90 ans avec une perruque blonde genre « Marilyn Monroe ». Le parasol « Valet » d’un Homeless. Le « Show girls » qui prétend qu’il y a 1000 superbes filles à l’intérieur mais tout de même trois qui sont « Ugly ». Des fesses et des seins (énormes) sur des affiches. Le Homeless qui me dit « Why are you looking at me ? » car ici il faut regarder sans regarder. Comme avec tous ceux que je regarde ; faire semblant de ne pas voir ; difficile, pour moi ! Et je ne vous parle pas des femmes ; « sexual offence » assurée ! Et les regards me manquent ; parfois, tout de même, nous partageons un hochement de tête ; on s’est vu. Cela sauve un peu les choses. De toute manière, plus rien n’a vraiment d’importance car demain je serai enfin dans le désert ! J’ai enfin la voiture ! Et là, ici, avec une voiture, tout est possible ! That’s all Folks !

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