Deleuze aujourd’hui : Philosopher avec l’histoire de la philosophie

Deleuze et Guattari (détail couverture de la biographie signée François Dosse, éditions de la Découverte)

Dans son livre Deleuze et l’histoire de la philosophie (Kimé, 1999), Manola Antonioli montrait comment Gilles Deleuze aborde l’histoire de la philosophie en philosophe plus qu’en historien des idées, puisqu’il s’agit pour lui, lorsqu’il se rapporte aux autres philosophes, et même lorsqu’il consacre une monographie à Bergson, ou Nietzsche ou Spinoza, de rechercher d’abord des intercesseurs pour la pensée. Deleuze transforme ainsi l’histoire de la philosophie en une série de rencontres qui permettent de penser avec et non sur, selon une logique créatrice qui subvertit la pensée autant que l’histoire.

1Ce sont des recherches sur la réception française de la pensée nietzschéenne qui m’ont amenée à m’intéresser à la philosophie de Deleuze, dont j’ai lu dans un premier temps les ouvrages consacrés à Nietzsche.

Selon la « méthode de dramatisation » de l’histoire de la philosophie que le jeune Deleuze avait théorisée dans le texte d’une conférence qui n’a été publiée qu’après sa mort (cf. « La méthode de dramatisation », in L’Île déserte et autres textes, Minuit, 2002), la philosophie nietzschéenne y est présentée à travers ses personnages, animaux, humains ou divins, mais surtout à partir des « forces » qui s’y expriment (forces actives et réactives, volonté de puissance, éternel retour, forces tragiques de La Naissance de la tragédie, forces insoupçonnées du corps dont l’importance rapproche Nietzsche de Spinoza, « grande » et « petite » santé, puissances ascétiques dans La Généalogie de la morale, forces du nihilisme passif ou actif, forces destructrices et forces de création). Ainsi, l’histoire de la philosophie se transforme de simple succession chronologique des étapes du développement d’une pensée « canonique » (conçu souvent comme linéaire, prévisible depuis ses commencements, fait de phases en cohérence les unes avec les autres) en l’analyse des événements, imprévisibles, discontinus, dont l’irruption produit une pensée originale et singulière, qui constituera à son tour un événement philosophique, un seuil de discontinuité à partir duquel il nous sera impossible de penser comme avant.

J’ai découvert chez Deleuze une pratique de l’histoire de la philosophie qui consiste à penser au présent les philosophies du passé, en ayant recours à une sorte de « discours indirect libre » qui brouille les frontières entre la pensée du philosophe-historien (dans ce cas, Deleuze lui-même) et celles des auteurs qu’il étudie. La pensée se produit dans ces pages à partir des rencontres avec d’autres pensées, dans la dissipation des identités, comme ce qui fait parler des « singularités impersonnelles », dynamique comparable à celle introduite par Maurice Blanchot dans le domaine de la critique littéraire.

Les incursions de Deleuze dans l’histoire de la philosophie commencent par la rencontre avec l’empirisme anglais (Empirisme et subjectivité, PUF, 1953). Deleuze découvre chez Hume une philosophie de l’expérience qui se place d’un point de vue purement immanent, qui fait de l’expérience une collection d’impressions et d’images (le « flux du sensible ») et du sujet le lieu provisoire d’un processus de subjectivation. La pensée de Hume restera pour Deleuze un exemple d’hétérodoxie, un épisode de l’histoire de la philosophie qui échappe à la filiation platonicienne, qui met l’immanence à la place de la transcendance, et un sujet « pratique » (sujet des passions, de la politique, de l’économie) à la place d’un sujet prioritairement « connaissant ».

4L’étude de Bergson a été pour Deleuze le point de départ de sa propre pensée sur la multiplicité et sur le virtuel. Bergson n’oppose pas le multiple à l’un, comme la tradition philosophique l’a fait souvent, mais distingue deux types de multiplicité (espace et durée, différence de degré et différence de nature), s’écartant ainsi de la démarche de toute pensée dialectique, qui oppose l’Un au Multiple. Il déplace la notion de durée de l’expérience vécue aux conditions de l’existence, en affirmant – écrit Deleuze – « une sorte de passé pur, un être en soi du passé ». Dans sa philosophie, il n’y a qu’un seul temps, mais ce dernier s’inscrit dans une infinité de flux actuels qui participent du même tout virtuel : les diverses dimensions du temps coexistent ainsi dans une temporalité stratifiée et complexe, faite d’inflexions, de bifurcations et de retours, irréductibles à toute linéarité.

Bergson est également, aux yeux du Deleuze, le grand auteur d’une théorie du « problème » en philosophie : « Porter l’épreuve du vrai et du faux dans les problèmes eux-mêmes, dénoncer les faux problèmes, réconcilier vérité et création au niveau des problèmes ». Cet énoncé deviendra un leitmotiv de toutes les lectures philosophiques de Deleuze et de sa propre philosophie : le problème posé lui semblera toujours plus essentiel que les solutions proposées. La société et le langage que nous utilisons nous transmettent à chaque époque des problèmes « tout faits », et la tâche de la pensée (comme de la pratique) semblerait ne plus être que celle de juger de la vérité ou de la fausseté, de l’opportunité ou de l’inopportunité des solutions qu’on propose pour les résoudre. Pour Deleuze, il s’agit au contraire de remonter à l’origine des problèmes, de dénoncer les faux problèmes, d’évaluer (au sens nietzschéen) l’orientation qu’un problème donné suggère à la pensée et à l’action. Si la tâche exclusive de trouver une solution à un problème donné par ailleurs aboutit à une forme d’esclavage de la pensée, le pouvoir « semi-divin » de constitution de nouveaux problèmes est, pour Bergson comme pour Deleuze, un acte de liberté. Le problème n’est pas dans ce cas simplement découvert, mais inventé, créé. En ce sens, la pensée a une composante esthétique essentielle, puisqu’elle peut devenir une invention, une construction : la création d’un nouveau concept est toujours une œuvre d’art.

Même l’importance essentielle de la notion de virtuel dans la pensée de Deleuze semble dater de cette rencontre inaugurale avec la philosophie de Bergson, qui souligne l’importance de l’idée de virtualité, tout en refusant la notion de « possible ». Le possible s’oppose au réel, alors que le virtuel s’oppose à l’actuel ; le virtuel n’est pas actuel, mais possède dans sa virtualité une réalité qui lui est propre : il est réel, sans être actuel. Le possible peut se réaliser ou ne pas se réaliser ; la réalisation est toujours, par essence, une forme de limitation du possible, par laquelle certains possibles sont repoussés et empêchés, alors que d’autres « passent » dans le réel. Le virtuel ne se « réalise » pas, mais il s’actualise, en suivant des dynamiques de divergence et de création. Si entre le possible et le réel il existe une relation de ressemblance, l’actuel ne « ressemble » pas à la virtualité qu’il incarne. Le parcours qui nous mène du virtuel à l’actuel est donc un parcours de sélection, de création des différences, un parcours qui doit être à chaque fois inventé ou réinventé : le virtuel n’est jamais simplement un possible qui se réalise.

Virtuelle sera également la réalité des devenirs dans la philosophie de Gilles Deleuze et Félix Guattari, telle qu’elle s’affirmera dans Mille plateaux. Les deux auteurs mettent en question dans cet ouvrage l’unité du sujet ou de l’individu, qu’ils décrivent comme étant traversés par une série virtuellement infinie de « devenirs » (devenir-femme, devenir-animal, devenir-enfant, parmi d’autres) qui s’actualisent selon des lois de différenciation imprévisibles qui tracent le parcours singulier de toute vie humaine. L’homme est ainsi en même temps humain et non humain, dieu et animal, il n’est qu’un concept limite du devenir. Le sujet est traversé par des singularités qui ont des vitesses différentes et qui se structurent en des configurations provisoires, destinées à être sans cesse dissoutes et toujours à nouveau redessinées. Pour une philosophie des multiplicités, toute multiplicité implique des éléments actuels et des éléments virtuels : rien n’est purement actuel, mais tout est toujours entouré d’images virtuelles. Ainsi, chez Bergson, la perception actuelle est entourée d’une nébuleuse constituée par des souvenirs imperceptibles, que leur vitesse ou leur brièveté maintient dans un état d’inconscience. Virtuel et actuel ne peuvent pas être séparés, et agissent l’un sur l’autre. Il existe un double parcours qui mène de l’actuel au virtuel, et du virtuel à l’actuel, en un mouvement d’échange et d’oscillation perpétuel.

La lecture de Nietzsche permet à Deleuze de pousser encore plus loin l’affirmation du multiple et de la différence. C’est tout le problème de l’orientation de la pensée qui est remis en question, en imposant à la philosophie de nouvelles dimensions et de nouveaux moyens d’expression. La philosophie nietzschéenne lue par Deleuze est essentiellement un projet critique, jugé beaucoup plus radical que celui de la critique kantienne. Le philosophe devient avec Nietzsche un symptômatologiste, un typologiste, un généalogiste (philosophe médecin qui interprète les symptômes, philosophe artiste qui modèle les types humains, philosophe législateur qui explore et transforme la généalogie de la pensée). Cela entraîne une nouvelle formulation de la question philosophique : à la place du « Qu’est-ce que…? » de tradition socratique et platonicienne on voit s’affirmer la question « Qui ? » du généalogiste et du philosophe critique. La question philosophique de l’essence se confond avec l’histoire de la métaphysique et suppose une manière particulière de penser qui a traditionnellement opposé, dans l’histoire de la philosophie occidentale, l’essence et l’apparence, l’être et le devenir, l’universel et le particulier. Nietzsche redécouvre au contraire l’art des sophistes qui s’opposait à la dialectique platonicienne, un art empiriste et pluraliste qui s’interroge sur les singularités, qui enquête sur les forces et la volonté qui s’emparent des phénomènes. De cette nouvelle forme de questionnement dérive une nouvelle méthode qui traite les concepts comme les symptômes d’une volonté qui veut quelque chose : « Qu’est-ce qu’il veut, celui qui dit ceci, qui pense ou éprouve cela ? Il s’agit de montrer qu’il ne pourrait pas le dire, le penser ou le sentir, s’il n’avait telle volonté, telles forces, telle manière d’être. Qu’est-ce qu’il veut, celui qui parle, qui aime ou qui crée ? Et inversement, qu’est-ce qu’il veut, celui qui prétend au bénéfice d’une action qu’il ne fait pas, celui qui fait appel au ‘désintéressement’ ? ».

6C’est toujours à partir de Nietzsche que Deleuze commence à développer sa propre critique de la philosophie kantienne. Kant est le premier philosophe de la tradition à avoir conçu un projet de critique totale et positive, mais il n’a jamais osé porter réellement atteinte à la dogmatique des théologiens (Dieu, l’âme, la liberté, l’immortalité) qu’il a critiquée pourtant dans la Critique de la raison pure. Au sujet de la Critique de la raison pratique, Deleuze écrit qu’« on n’a jamais vu de critique totale plus conciliante, ni de critique plus respectueux ». Kant a mis en question les pouvoirs et les prétentions de la morale, de la connaissance, de la religion, mais il n’a jamais porté la force de la critique sur la morale elle-même, sur la connaissance elle-même, sur la religion elle-même. La critique ainsi conçue finit par justifier tout ce qu’elle avait commencé par critiquer.

Si Deleuze a parlé de l’ouvrage qu’il a consacré à Kant comme d’un livre écrit sur un « ennemi », il s’agit pourtant d’un ennemi dont on peut être fier, contre lequel on peut être heureux de combattre. Deleuze ne partage pas l’esprit et les conclusions de la philosophie kantienne, mais il reconnaît son aspect révolutionnaire, il admire chez Kant le talent du créateur de nouveaux concepts. Le travail de Deleuze sur Kant commence avec La Philosophie critique de Kant en 1963, se prolonge dans les cours qu’il a donnés à 8l’Université de Vincennes, puis dans les pages de Différence et répétition qui lui sont consacrées, jusqu’à l’article de 1986 « Sur quatre formules poétiques qui pourraient résumer la philosophie kantienne », repris en 1993 dans Critique et clinique. La critique est toujours considérée dans ces différents textes comme un événement majeur de l’histoire de la philosophie, et toute l’œuvre kantienne est définie comme une grande « machine à penser ». En 1963, Deleuze expose la conception kantienne des facultés de l’esprit et oriente toute son analyse en direction de la troisième critique, la Critique de la faculté de juger. Cette dernière est considérée comme l’aboutissement de la philosophie kantienne à cause de son effet subversif dans le système : la faculté de juger fait trembler toutes les distinctions établies dans les précédentes critiques, brouille toutes les frontières que Kant avait soigneusement tracées précédemment. Kant est en outre, pour Deleuze, le philosophe qui a ouvert le domaine d’une pensée de l’immanence, grâce à sa théorie du transcendantal.

7Depuis son livre sur Hume, Deleuze n’a cessé de chercher dans l’expérience ce qui ne se réduit pas à l’expérience (attitude philosophique qu’il a appelée « empirisme transcendantal »). Cette problématique a été posée par la première fois par Kant, explorateur d’une dimension cachée de l’expérience qui n’est pourtant pas un arrière-monde, un monde dans ce monde qui ne peut être confondu avec sa réalité empiriquement constituée. Mais cette découverte kantienne, fondamentale, est compromise, aux yeux de Deleuze, par la réduction du transcendantal aux conditions d’une expérience possible. Or, ce qui intéresse Deleuze (et qu’il trouvera chez Bergson) n’est pas l’expérience possible, mais toutes les possibilités infinies de l’expérience réelle. Il lui faudra donc chercher ces conditions dans des devenirs infimes et imperceptibles, dans des couches plus profondes de l’expérience, qui ne peuvent ni être rapportées à un pôle d’unité objectif, ni à un pôle d’unité subjectif (l’unité garantie chez Kant par le « Je pense »).

C’est surtout dans le chapitre III de Différence et répétition que Deleuze expose les insuffisances et les limites que la démarche kantienne présente à ses yeux. L’un des postulats de l’« image de la pensée » que cet ouvrage se propose de critiquer est celui de la récognition et de l’accord entre les facultés, qui ont été traditionnellement subordonnées prioritairement à l’exercice de la connaissance. Le modèle de la récognition en philosophie suppose ainsi un exercice concordant de toutes les facultés, qui doit aboutir à définir un objet supposé être le lieu du « même » : chaque faculté se voit attribuer des données particulières (le sensible, le mémorable, l’imaginable, l’intelligible), mais l’objet ne sera reconnu dans son identité et dans son unité que par un accord de toutes les facultés. Dans la récognition, c’est le « sens commun » des facultés qui détermine la forme de l’identité de l’objet, identité qui s’enracine à son tour dans l’unité d’un sujet pensant dont toutes les facultés doivent être des modes. Chez Kant (ainsi que chez Descartes) c’est l’identité du Moi dans le « Je pense » qui fonde la concordance de toutes les facultés et leur accord sous la forme d’un objet supposé être le « même ». Une telle orientation de la pensée philosophique entraîne selon Deleuze une orthodoxie fondamentale : penser signifie toujours, dans ces conditions, « retrouver » et « reconnaître ». Ce qui est reconnu, c’est l’objet, mais aussi des valeurs que l’on attribue à l’objet de la connaissance – la récognition devient ainsi, sur le plan éthique et politique, l’alliée de toutes les valeurs établies.

Le propre du nouveau (autre nom de la « différence » deleuzienne) devrait être au contraire sa capacité de solliciter dans la pensée d’autres forces, encore inconnues, qui échappent au pouvoir de la récognition et à tous les pouvoirs dont elle a été toujours complice.

3Dans les nombreux textes que Deleuze a consacrés à Spinoza, Deleuze traite à la fois une problématique ontologique et une problématique de philosophie pratique. Aux yeux de Deleuze, la philosophie de Spinoza n’est pas une « onto-théologie », mais une « onto-éthologie », une science de l’être et du comportement. Au niveau de l’ontologie, elle est définie par la catégorie d’expression, dont découle une philosophie de l’univocité et de l’immanence. Au niveau de la philosophie pratique, Deleuze aspire à montrer, dans Spinoza – Philosophie pratique, que la grande thèse ontologique de Spinoza (une seule substance ayant une infinité d’attributs, toutes les créatures comme des modes de ces attributs ou des modifications de cette substance, la négation de l’existence d’un Dieu anthropomorphe et transcendant) implique des thèses pratiques révolutionnaires, un changement radical d’évaluation de l’action, qui fait de l’Éthique non pas un livre de morale, mais un traité d’éthologie.

Chaque forme de vie n’est pas conçue chez Spinoza comme une entité close, définitivement constituée, mais comme un ensemble de rapports entre des vitesses différentes : la manière de vivre est ainsi une question de vitesses, de rencontres, de rapports, de rythmes. En faisant des corps et des âmes non plus des substances ni des sujets, mais des modes, Spinoza nous propose de changer concrètement nos façons de vivre. Si un corps est défini par son pouvoir d’affecter ou d’être affecté, une forme de vie sera toujours une expérimentation, puisque nous ne savons pas de quoi notre corps et notre âme sont capables avant d’expérimenter des rencontres, des rapports, des événements. L’existence d’une chose, un animal ou un être humain ne peut donc jamais être séparée de ses rapports avec le monde : « l’intérieur est seulement un extérieur sélectionné, l’extérieur un intérieur projeté », écrit Deleuze. Un individu dans le monde n’est jamais donné comme une forme close, un organisme ou un sujet, mais comme la résultante d’un ensemble de vitesses et de lenteurs, de capacités d’être affecté ou d’affecter.

La théorie des affects chez Spinoza n’a pas seulement des conséquences éthiques, mais aussi des effets politiques : elle implique un nouveau regard sur le sens d’une communauté, où il s’agit de comprendre comment des rapports peuvent se composer pour constituer une puissance plus étendue. Comme chez Hume, le problème de la politique ne consiste pas à limiter des libertés, mais à organiser un monde de plus en plus large et intense en composant les puissances individuelles. Il ne s’agit plus prioritairement de limiter et d’interdire, mais de créer et composer. Dans la lecture deleuzienne, la variété de vitesses, de styles, de modes de vie et de connaissance qui traversent l’Éthique fondent la pratique d’une vie et d’une philosophie comme rencontres, agencements, composition de puissances et de vitesses, où la théorie ne peut jamais être séparée de la pratique, l’affect du concept.

Tout comme Maurice Blanchot élabore sa propre pensée au cours de l’« entretien infini » avec les grands textes de la littérature, Gilles Deleuze a « fabriqué » ses propres outils de pensée dans le travail patient de lecture d’une généalogie philosophique personnelle, qui rattache sa philosophie à celles de Nietzsche, Bergson, Spinoza ou Leibniz. Et tout comme les textes de critique littéraire de Blanchot finissent par faire émerger de la linéarité d’une « histoire littéraire » un « espace littéraire » multidimensionnel, les textes d’histoire de la philosophie de Gilles Deleuze font émerger un espace philosophique qui agence de manière inattendue les pensées-événements des auteurs qu’il a étudiés. La lecture croisée des textes d’histoire de la philosophie de Deleuze et des essais, romans et récits de Blanchot, a été ainsi pour moi le point de départ d’une réflexion sur la « géophilosophie », qui a occupé mes recherches par la suite, me permettant de substituer à la linéarité des histoires (de la littérature ou de la philosophie) la dynamique des espaces.

Manola Antonioli a récemment publié, Machines de guerre urbaines, (collectif), éditions LOCO, 2015, 304 pages, 22 €
Poétiques du numérique 4, (collectif), éditions l’Entretemps, 2016, 208 pages, 25 €

Lire ici l’entretien de Jean-Philippe Cazier avec Manola Antonioli, autour de Machines de guerre urbaines