Retour à Nantes : Atlantide, les mots du monde (Jour 2)

© Sophie Quetteville

Après une absence momentanée pour raison de Salon du livre de Paris et autres joyeusetés, votre Diacritik globe-trotteuse revient pour la suite de son journal nantais au Festival Atlantide (le jour 1 est à lire ici).

Samedi 12 mars,

7h00
Avec l’impression d’avoir fait une grasse matinée, je m’engage pour quelques heures studieuses à l’hôtel, c’est-à-dire la préparation des fiches Bristol pour les deux rencontres du jour. On n’oubliera pas de se doucher (et de prendre le fixateur du pommeau de douche sur la tronche), de se brosser les dents et de petit-déjeuner, tout ça dans un ordre non défini.

Coucou l’équipe (Romain Delassalle de la librairie Vent d’ouest et Marie-Sylvie Bitarelle coordinatrice générale du Festival Atlantide) © Sophie Quetteville

12h00
Arrivée au lieu unique deux heures avant la rencontre avec Martin Veyron pour sa dernière BD (ou roman graphique, on appellera ça comme on veut, au final c’est un objet papier, très beau, avec des dessins et du texte, on ne va pas commencer à chipoter) Ce qu’il faut de terre à l’homme (Dargaud).Après avoir fait les coucous d’usage à l’équipe, je retrouve Martin pour déjeuner. Nous ne nous sommes pas vus depuis 2009 et la parution de Blessure d’amour propre et sommes assez ravis de prendre le temps de discuter. Et nous avons parler de quoi ? De livres ! Je lui disais que le titre Ce qu’il faut de terre à l’homme (qui est une nouvelle de Tolstoï) me faisait penser à Quiconque nourrit un homme est son maître de Jack London (publié dans la « petite collection » des éditions du Sonneur). Et de parler des textes politiques du grand Jack, Ce que la vie signifie pour moi (Sonneur), Le Talon de fer ou Martin Eden (« Libretto », Phébus).

14h00
Grande rencontre, donc, avec Martin Veyron. La discussion tourne autour de Tolstoï, de l’adaptation d’une œuvre littéraire en bande dessinée mais surtout du point de départ, de l’envie de Martin à l’origine : parler de notre société de consommation, des dangers du productivisme, des conséquences de l’avidité et de la cupidité humaines, autant de sujets d’actualités qui sont présents dans la fable satirique de Tolstoï. Nous avons aussi parlé « couleurs », car la colorisation de Charles Veyron, qui souligne les saisons, est remarquablement réussie.

Relire la critique de Dominique Bry sur Diacritik, c’est là.

15h00
Je m’accorde un grand plaisir, aller écouter le comédien et metteur en scène Pierre Baux qui continue son cycle de conférences performées avec un texte de Frédéric Boyer, What is like to be a hero ? ou construire une épopée. Texte fabuleux sur l’écriture, la peur ou l’impuissance de l’action, la violence. Drôle, poétique, littéraire… Le duo Baux/Boyer fonctionne une fois de plus à merveille. J’avoue que ces deux-là font partie de mes idoles et m’impressionnent particulièrement. J’en suis encore toute chose !

« Pour faire une épopée il faut donc un enfant qui s’ennuie et une mère qui s’inquiète derrière lui »

« Que le langage envahisse nos solitudes… »

Une heure pour se sortir de ce texte et se remettre en condition pour la grande rencontre avec Hakan le magnifique… Hakan qui juste avant que commence l’entretien me demande des conseils de lecture d’auteurs français, je lui dis de lire Notre château d’Emmanuel Regniez (Le Tripode, article de Christine Marcandier là) et les livres d’Alban Lefranc en commençant par Le Ring invisible (Verticales). On est quand même super cohérent au sein de la rédaction !

17h00
Grande rencontre avec Hakan Günday. L’écrivain turc parle un français parfait et nous évoquons particulièrement son premier livre traduit en France (par Jean Descat et publié chez Galaade) D’un extrême à l’autre et l’incroyable Encore paru en août dernier, lauréat du Médicis étranger. Trafics de clandestins, migrants sont au cœur de la discussion mais aussi l’enfance, le rapport bourreau/victime, les affres identitaires de la Turquie « jouvencelle boulimique et dépressive, se voyant obèse dans le miroir de l’Orient et décharnée dans celui de l’Occident, ne trouvant pas de vêtements à sa mesure. »

Entre ombre et lumière, les actes des humains, la vie des héros de ses livres ressemble aux techniques picturales de la Renaissance qui structurent Encore. Nous finirons en parlant de rédemption, interrogation ultime des romans d’Hakan Günday. Une conversation dense, un auteur charismatique et militant, un public conquis. Nous nous quittons ravis de savoir que nous nous retrouverons les lendemains pour une table ronde avec William Ospina et Lyonel Trouillot sur le thème « Dire l’injustice ».

S’excuser du retard de 7 minutes qu’a pris la rencontre auprès de Robin Renucci qui enchaîne avec une lecture d’extraits de Novellas de Didier Daeninckx (aaaaah Robin Renucci, susurre la midinette qui sommeille en moi…).Hakan18h-22h
Voir les amis nantais, boire des bières, écouter quelques lectures de la soirée « auteurs censurés », prendre le temps d’un dîner fort drôle avec super Delphine (Bretesché), Didier Daeninckx et les amis modérateurs Marie-Madeleine Rigopoulos et Alain Nicolas.

Retour à l’hôtel. Carte magnétique fonctionnera ? Fonctionnera pas ? Merci de barrer l’option 1, redescendre à la réception, remonter avec le réceptionniste qui veut vérifier que tu vas bien rentrer dans ta chambre une bonne fois pour toute. Se dire qu’on fait un métier formidable, mettre son réveil à 5h du mat’, ronfler.