Dans son ultime vidéo au terrible titre de « Lazarus », qui portait déjà sans le savoir pour nous la nouvelle inouïe de sa mort, dont le spectral décorum fut à peine révélé la semaine dernière, David Bowie, plus lynchien que jamais, de sa maigreur toute aristocratique mais déjà aux traits émaciés de mort, nous lançait un appel et nous prévenait : « Regarde-moi, je suis au paradis / Je porte sur moi des cicatrices que l’on ne saurait voir ».

Dans les coulisses de la rédaction cette semaine : la rentrée littéraire d’hiver a commencé. Plus resserrée que l’estivale (qui débouche sur les prix d’automne, ceci expliquant cela) mais 476 publications quand même ! Nos colonnes en rendent compte, mais nous avons aussi parlé de livres qui ne sont pas liés à l’actualité — parce que la littérature n’est pas soumise à ce diktat —, de grands documentaires, de bande dessinée, de cinéma, de Sicile, de cuisine.

Adieu donc, ville jadis fortunée, adieu, bel appareil de tes remparts ! Si Pallas, fille de Zeus, n’avait pas voulu ta ruine, tu serais encore debout sur tes fondements.
Euripide, Les Troyennes.

Eh bien donc, cher père, place-toi sur mon cou ; mes épaules te porteront, et cette charge ne me sera point lourde. Quoi qu’il puisse nous advenir, les dangers nous seront communs à l’un et à l’autre, et le salut aussi. Que mon petit Iule m’accompagne et que ma femme nous suive à quelque distance sans nous perdre de vue.
Virgile, Énéide.

Nous voulons dédier ces vers d’Euripide et de Virgile à tous les exilés, à tous les rescapés, des guerres, des désastres, à tous les hommes contraints de quitter leur ville, leur pays et d’émigrer ailleurs.

Je veux faire depuis plusieurs jours un papier sur le magnifique nouveau roman de Camille Laurens, Celle que vous croyez. Je n’y arrive pas. D’abord je ne suis pas un critique littéraire et puis Camille est une amie dans la vie, c’est troublant de lire une amie. On reconnaît la voix, les inflexions de la pensée et en même temps c’est une tout autre personne, qu’on ne connaît pas ou mal, qui impressionne un peu, l’auteur.

« Nous cherchons des mots, peut-être cherchons-nous aussi des oreilles » clamait lumineux de confiance Nietzsche dans Le Gai Savoir en une formule sans trêve qui pourrait tenir lieu de préambule à Mourir et puis sauter sur son cheval, le nouveau et magistral roman de David Bosc, fiévreux récit de douleur, paru ces jours-ci chez Verdier.