22H22 : Le spleen numérique d’Ariane Moffatt

Au tic tac de l’Horloge de Baudelaire, Ariane Moffatt offre en cette année 2015 un pendant digital sur un 5e album, étrangement crépusculaire. 22H22 ? « L’heure où ma seconde vie commence ». 22H22 ? Bientôt la fin d’un cycle, et le début d’un autre. Mais quel autre ? A l’instar du poète, la québécoise semble s’interroger sur le déclin de la vie tout au long de ce disque magnifique, hanté par le temps qui passe, la jeunesse qui fane (Nostalgie des jours qui tombent), et va jusqu’à imaginer son propre requiem (Domenico).

Ses textes charment toujours par leur écriture aux mots simplement mais finement choisis, rimant parfaitement tandis que tant d’autres artistes francophones se perdent dans des dites métaphores sans queue ni tête. (Je vous invite à lire le texte de Mon Corps, extrait du précédent disque, une réflexion sur son rapport à son aspect physique d’une rare profondeur et maturité). Moins expérimental que son prédécesseur MA sorti en 2012, ce nouveau disque poursuit tout de même le parcours électronique de la musicienne, très minutieuse sur sa production. Elle ralentit certes le tempo sur ses ballades aux abords épurés, mais s’évertue à ce qu’elles prennent de l’ampleur au fur et à mesure que les nappes synthétiques s’ajoutent les unes aux autres.

Et même lorsque sa musique prend des tournures plus pop et dansantes (Debout et Miami), il y a toujours dans ses mots la recherche de l’acceptation de petites fêlures. Mais n’est ce pas aussi cela grandir ? vieillir? La quarantaine approchante, Ariane se recentre sur les êtres qui lui sont les plus chers, ses jumeaux nés en 2013, sa compagne (Matelots et Frères, Les deux cheminées). Elle convoque les esprits de l’au-delà (De Mort à Vivant ou Toute Sa Vie) pour nous offrir un final somptueux et onirique, preuve que le léger spleen que l’on ressent à l’écoute de ce disque n’est que la contrepartie du bonheur qu’elle vit.

Ariane Moffatt, 22H22
En concert le 10 décembre 2015 à la Gaité Lyrique

Le site d’Ariane Moffat
Sa page facebook

Retrouvez le spleen numérique d’Ariane Moffatt quand il prend un tour pop et dansant sur son titre « Debout » extrait de 22h22 :